MAIL  Les Généralistes CSMF  ///  Jeudi 27 février 2020

SOS Parcours…

Depuis 20 ans, la plupart des pays occidentaux, face à une mauvaise organisation de leur système de santé centré sur l’hôpital, ont théorisé sur le fameux virage ambulatoire.
Des lois et des textes réglementaires s’en sont suivis, censés favoriser ce fameux virage. Où en sommes-nous 20 ans plus tard, en France, de ce vaste chantier qui tarde à permettre à notre système de santé d’effectuer sa mue ? Les freins sont multiples : le changement fait peur, les différents acteurs sont réticents à confier à d’autres certaines de leurs prérogatives, les moyens financiers manquent parfois pour investir dans les nouvelles organisations à mettre en place,…

Le système hospitalier public s’est lui réorganisé au sein de Groupements Hospitaliers de Territoire (GHT) et accuse volontiers le système de santé ambulatoire de tarder à se réorganiser lui aussi au sein de Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS). Ceci est en partie vrai, même si depuis plusieurs années un mouvement est engagé par la médecine générale et les professionnels des soins primaires pour se regrouper au sein de maisons et centres de santé pluriprofessionnels et, depuis peu, au sein de CPTS. Leur objectif est de mieux répondre aux besoins de santé de la population grâce à un exercice coordonné. Par contre, il est vrai que la médecine spécialisée de second recours rencontre plus de difficultés à se réorganiser même si l’on voit un certain nombre de ses médecins rejoindre les CPTS ou créer les premières équipes de soins spécialisées (ESS).

Si aujourd’hui le système de santé français tarde tant à se réformer, on est en droit de se poser la question de savoir si le principal frein n’est pas idéologique et ne se situe pas au Ministère de la Santé et à l’Assemblée Nationale. En effet, c’est là que l’on élabore les lois et les textes réglementaires qui permettent à l’hôpital de rester le pivot autour duquel le système de santé doit se réorganiser.

Les preuves sont nombreuses et parfois caricaturales.

Ainsi, les GHT ont rédigé des projets de santé territoriaux desquels les établissements de soins privés sont souvent exclus. De même, dans la plupart des départements, les professionnels de santé libéraux n’ont pas été associés aux travaux sur le lien ville – hôpital !

Autre exemple, les travaux sur le Service d’Accès aux Soins (SAS). Alors que l’idée de départ était une réorganisation de la réponse aux demandes de soins en ambulatoire afin de désengorger les services d’urgence hospitaliers et d’éviter des hospitalisations, on risque d’aboutir à une nouvelle organisation managée par les hôpitaux et les Centres 15 !

Si l’on veut éviter que ce virage ambulatoire ne se transforme en un simple « demi-tour » où les hôpitaux resteraient le centre de gravité de notre système de santé, il faut revenir aux fondamentaux qui ont amené la plupart des pays occidentaux à vouloir réformer leur système de santé.

La raison première est que les besoins de la population ont changé car la population a changé. L’enjeu prioritaire aujourd’hui est la prise en charge des patients atteints de pathologies chroniques et de celles du vieillissement.

Le vécu des patients doit nous amener à apporter, entre autres, des réponses à la problématique de l’annonce de la pathologie chronique, de l’absence de prise de conscience de l’existence d’un plan de soins, aux difficultés de la relation généraliste – spécialiste car elle n’est pas structurée (l’information circule mal, pas de dossier partagé), …

Il est donc urgent de permettre aux médecins généralistes et aux autres médecins spécialistes, sans condescendance et chacun avec son niveau d’expertise, de mieux se coordonner autour des patients atteints de pathologies chroniques afin d’améliorer leur parcours de santé et de les rendre acteurs de leurs propres parcours.

Aujourd’hui, le principal frein à des parcours efficients pour ces patients est l’Assurance Maladie qui a refusé en 2016 de valoriser cette coordination et a fait, en autre, de la téléexpertise un outil voué à l’abandon alors que les expérimentations menées en régions, financées par les ARS, ont démontré que la téléexpertise améliorait l’accès aux soins et l’efficience des parcours de soins, permettant ainsi aux médecins de premier et de deuxième recours de mieux se coordonner.

C’est cette coordination, inscrite dans les nouvelles organisations territoriales ambulatoires, qui sera un des éléments fondateurs du virage ambulatoire.

Dr Luc DUQUESNEL,
Président Les Généralistes CSMF

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