Château-Chinon, le Faou, Garlin… Le départ ou le non-remplacement des médecins en zone rurale préoccupe de plus en plus les habitants. Ils craignent pour leur santé, mais aussi pour l’équilibre de l’économie locale. Et ils se mobilisent pour faire entendre leur inquiétude.

 

“Maison médicale en danger, santé menacée”, “Sans médecins, c’est la fin”. C’est en scandant ces mots qu’un millier d’habitants de Château-Chinon, près de Nevers, ont battu le pavé le 19 novembre dernier. En cause, le départ des tout derniers médecins généralistes de la commune.

Il y a encore un an, la maison médicale comptait quatre généralistes. Le premier a plié bagage fin 2013. Le second s’en ira dans les prochains jours pour raisons de santé. Les docteurs Didier Savajols et Jaime Gaston-Echeverria n’ont pas l’intention de prendre en charge seuls la patientèle de quatre praticiens. Ils ont annoncé leur départ pour la fin du mois de janvier. “Les motivations de notre départ sont la surcharge de travail, le nombre trop important de gardes et les charges trop lourdes à supporter par deux médecins. À nos âges, on ne peut plus travailler 11 à 12 h par jour, assurer des permanences de soins 24 h sur 24, y compris les week-ends, effectuer 158 gardes par an…”, expliquait Didier Savajols au quotidien local le Journal du Centre en précisant : “À Château-Chinon, il faudrait être trois médecins libéraux à plein-temps pour travailler dans des conditions convenables”.

 

Cercueil couvert de gerbes de fleurs

En tête de cortège, un cercueil couvert de gerbes de fleurs, symbole de la mort de la médecine libérale dans cette petite ville de la Nièvre. Les habitants de la commune ont pris la mesure du problème et se sont massivement déplacés. Une pétition lancée par un collectif de soutien à la maison médicale de Château-Chinon a recueilli quelque 5 000 signatures dans sa version papier et quelque 900 soutiens supplémentaires sur le web. Sur Facebook, une page a été créée et regroupe plus de 700 membres qui s’échangent les dernières infos sur la mobilisation.

Derrière le départ des derniers généralistes, ce que craignent les habitants, c’est une réaction en chaîne dont pâtirait toute l’économie locale. En signe de solidarité, de nombreux commerces de la ville affichaient d’ailleurs portes closes le jour de la manifestation. Déjà, l’avenir de la maison médicale, où exercent des infirmiers, des kinésithérapeutes et une orthophoniste, est compromis et les secrétaires médicales seront licenciées. Mais sans prescripteurs, le sort des pharmacies aussi est incertain. “Si les gens partent se faire soigner ailleurs ça va jouer sur les commerces, et donc sur nos emplois”, résume Isabelle, une habitante de Château-Chinon.

 

Au Faou, 150 personnes contre le départ de spécialistes

Si l’action des habitants de Château-Chinon a été particulièrement médiatisée, dans d’autres communes aussi les patients se mobilisent contre le départ de leurs médecins. Au Faou, dans le Finistère, 150 personnes se sont rassemblées vendredi dernier devant la maison de santé de l’Aulne Maritime.

En cause cette fois, le départ des médecins ORL et de chirurgiens orthopédiques venant d’une clinique brestoise, à plus de 30 kilomètres, pour proposer des consultations dans cette commune de 2 000 habitants. “Nous avons été très contents de la mobilisation des patients, c’est essentiel pour le maintien d’une médecine de proximité et de consultations de spécialistes”, assure le Dr Sophie Lallemand, médecin généraliste et présidente de la maison de santé du Faou.

Et pourtant, lors de son inauguration en octobre 2012, la maison de santé du Faou faisait figure de modèle. La collaboration de médecins spécialistes en zone rurale, venant d’une clinique, avait même été saluée par Marisol Touraine lors d’une visite. Mais aujourd’hui voilà que l’Ordre national des médecins, qui aurait reçu des plaintes de la part d’une clinique concurrente, demande la fin de cette pratique, “alors que leur départ irait à l’encontre d’une médecine de proximité et de qualité”, regrette le Dr Sophie Lallemand.

 

100 patients à la dernière consultation d’un MG

Dans l’attente de la décision du tribunal administratif de Rennes, les patients ont brandi les banderoles “Pour le maintien des spécialistes en milieu rural”, et la grisaille ne les a pas empêchés de sortir les guitares et de donner de la voix en musique, témoigne la généraliste.

Enfin, en septembre dernier, c’est un médecin généraliste de Garlin, dans les Pyrénées Atlantiques, qui avait provoqué le rassemblement surprise d’une centaine de patients devant la porte de son cabinet. Installé en 1977 dans ce village d’un millier d’habitant, à quelques 80 kilomètres de Dax, il partait en retraite sans avoir trouvé de successeur. Ses patients s’étaient rassemblés au terme de sa dernière consultation pour lui témoigner leur reconnaissance et interpeller les élus sur son non remplacement.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Fanny Napolier