Chaque année, plusieurs centaines d’étudiants échouent à passer en deuxième année de médecine et sont nombreux à redoubler. Pour ceux qui craquent en cours de route ou n’accèdent pas en Pcem2, l’école d’ingénieur ECE leur propose de se réorienter sans perdre une année de plus.

 

"Rater médecine, c’est dur à encaisser, c’est comme faire un deuil. On se dit qu’on a bossé pendant un an et demi pour pas grand-chose. Aujourd’hui je prends finalement un nouveau départ." Vivien a 19 ans et depuis un mois il a repris les cours… En école d’ingénieur. Etre médecin, c’était pour lui une vocation. Issu d’une famille de professionnels de santé, il avoue "avoir rêvé" de ce métier. "On soigne des vies, on se donne corps et âme pour des gens, c’est ça qui m’a poussé vers la médecine. Au final, ce n’est pas ce qu’on croit. Il y a beaucoup de théorie, notamment en P1 et surtout beaucoup de compétition".

 

Souvenir amer

Malgré un bon classement (400ème sur 1607), il n’a pas tenu le choc et garde un souvenir amer de cette période. "L’ambiance oppressante fait qu’on se sent mal. C’est ce qui m’a donné envie de tout quitter" explique-t-il. L’ambiance, c’est aussi ce qui a fait craquer Ariane, inscrite dans la même promo que Vivien. Elle était bien classée mais "c’est le côté psychologique qui n’a pas tenu" confie-t-elle avant d’ajouter : "l’atmosphère en médecine est très particulière. Ne serait-ce que de penser que l’on peut se faire voler ses polys, ça met une mauvaise ambiance !"

Aujourd’hui pour Ariane, les années de médecine ne sont plus qu’un mauvais souvenir. Et bien qu’elle ait encore des "regrets" de ne pas avoir fait le métier de ses rêves, en discuter avec ses camarades de classe lui permet de relativiser. [Voir la vidéo pour plus de détails] 


 

Depuis un mois Vivien et Ariane ont donc repris les cours. Une rentrée en plein milieu de l’année très prisée par les étudiants qui ont échoué en médecine et qui représentent plus de 80 % de leur promotion. Pendant 6 mois et pour 5 500 euros, ils vont suivre un programme intensif qui leur permettra de passer directement en deuxième année d’école d’ingénieur. "C’est vrai que le rythme de travail est compliqué mais l’avantage quand on a été étudiant en médecine c’est qu’on a    l’habitude de travailler. Du coup il suffit d’être sérieux, d’écouter en cours et de faire le travail que l’on nous demande pour que tout se passe très bien" juge Jérémy, élève de deuxième année. Contrairement au concours de médecine, il y a une grande solidarité et beaucoup d’entraide entre les étudiants. [Voir la vidéo pour plus de détails]


 

C’est Pascal Brouaye et Nelly Rouyres, respectivement directeur et directrice adjointe de l’ECE, qui ont créé ce programme de réorientation baptisé Prepac. L’idée est venue d’un constat : "nous avions beaucoup d’étudiants en médecine qui s’inscrivaient en première année. Nous nous sommes dit que c’était dommage qu’ils repartent à zéro après deux ans d’études, donc nous avons voulu leur proposer une alternative", expliquent-ils. Une idée brillante puisque quatre ans après la création du programme, l’effectif a doublé. "En 2009, il y avait 18 inscrits. Cette année, ils sont 52" se réjouit Pascal Brouaye.

 

"Contente de ne pas être à leur place"

Valentine est une ancienne du programme Prepac. Aujourd’hui en quatrième année, elle ne cache pas sa joie. "C’est génial qu’ils aient inventé ça. Avant quand on voulait se réorienter après la médecine on allait soit en fac de bio, soit il fallait repartir de zéro. Je termine mes études l’année prochaine et je sais qu’avec mon diplôme, je pourrais faire pleins de choses". L’étudiante ne regrette son choix pour rien au monde.

"Cela n’a pas été facile de se décider à arrêter la médecine car c’était pour moi une vocation, mais aujourd’hui je suis très heureuse. J’ai de très bonnes amies qui y sont encore et je suis très contente de ne pas être à leur place. Etre étudiante pendant 10 ans, ça n’était pas pour moi", analyse-t-elle. Depuis qu’ils sont en école d’ingénieur, les étudiants retrouvent la vie sociale qu’ils avaient perdue alors qu’ils étudiaient la médecine.

 

Sentiment d’injustice

"La différence est incomparable, je voit beaucoup plus de gens. Quand j’étais en P1, je ne sortais plus de chez moi" déclare Ariane. Et elle n’est pas la seule. Vivien a fait le calcul. "En un mois de Prepac, j’ai plus d’amis qu’en un an et demi de médecine". Une formule gagnant gagnant, autant pour les élèves que pour la direction. "Les anciens étudiants de médecine sont parfaits. Ils ont un très bon niveau, de très bonnes méthodes de travail", constate Nelly Rouyres.

Et Pascal Brouaye de noter : "les conditions de travail en médecine sont scandaleuses. On a du mal à imaginer que les étudiants que l’on récupère ne pourraient pas être de bons médecins. Ils ont vraiment de très bons dossiers". Ce n’est pas le jeune Vivien qui viendra la contredire. Comblé depuis qu’il est en Prepac, le concours de médecine restera pour lui synonyme d’un fort sentiment d’injustice. [Voir la vidéo pour plus de détails]


 

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Sandy Berrebi