L’année 2017 s’ouvre par un mot d’ordre général de boycott du tiers payant généralisé et sera rythmée par le bruissement de la campagne pour la présidentielle. Tour d’horizon des étapes et des enjeux, alors que la loi de Santé et la nouvelle convention médicale se mettent doucement en place sur le terrain.

 

Tiers payant généralisé : les ciseaux du conseil constitutionnel

Le conseil constitutionnel a censuré, fin 2015, l’obligation de tiers payant pour la part complémentaire des remboursements, liée à la loi de modernisation de notre système de santé (dite loi de Santé). L’Unocam – organisme qui regroupe lesdits organismes mutuelles, assurances privées et institutions de prévoyance – n’a pas remisé pour autant les travaux lancés afin d’être opérationnels pour tous les patients (et les médecins volontaires) au 1er janvier 2017, parallèlement aux malades en ALD et aux femmes enceintes, pris en charge à 100 %. Le tiers payant généralisé (TPG) sera un droit pour tous au 30 novembre 2017.

Sourd aux refus des médecins généralistes et aux appels au boycott, lancés depuis la fin 2016, et réitérés en ce 1er janvier 2017, la Cnam a publié un bilan laissant entrevoir que la pratique du TPG a progressé de manière “significative” chez les médecins généralistes (de 66 à 73,7 % entre le premier trimestre 2016 et le 30 octobre pour les patients en ALD et de 55,8 % à 64,5 % pour les femmes enceintes). Même satisfecit pour les chirurgiens-dentistes.

La Caisse nationale se félicite du taux de rejet “quasiment divisé par deux, de 1,90 % à 1,08 % entre janvier et octobre 2016”, et relève que le délai moyen de paiement des feuilles de soins électroniques (FSE) en tiers payant est de 3 jours, et dans 90 % des cas, de 4 jours calendaires.

 

Convention 2016 : 1,3 milliard d’euros sur la table

C’est sur cette ligne de fracture politique que s’est déroulée la négociation de la convention médicale, entamée en février et signée en août dernier, censée décréter la fin de la guerre tarifaire avec le très symbolique C à 25 euros… en mai prochain. Erreur, les pratiques, quoique marginales, continuent sur le terrain, les généralistes sachant bien qu’en périodes électorales, les caisses lèvent le pied sur les poursuites. 

Une convention 2016 à 1,3 milliard d’euros, où pas un mot de plus que la précédente n’est dit sur la limitation du secteur 2 (entravé, de facto, par l’accord ANI sur les “mutuelles pour tous”, qui limite les remboursements des honoraires libres). D’entrée de jeu, le texte paraphé fin août a conforté le régime de retraite ASV. Il avantage sérieusement la médecine générale par rapport à la médecine de deuxième recours, apaise les praticiens à plateau technique avec un contrat d’accès aux soins revisité et particulièrement attractif pour les chirurgiens et “met le paquet” pour contrer la désertification médicale en offrant – notamment – une enveloppe de 50 000 euros sur trois ans, pour l’aide à l’installation dans les zones de fragilité démographique.

La convention, autre innovation, propose plusieurs types de consultations selon leur degré d’expertise et d’urgence, simplifie les forfaits existants en mettant notamment en place un forfait structure et donne un “coup de booster” sur la prévention au travers de la ROSP, modernisée et élargie. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, doit permettre par ailleurs de bonifier la protection sociale des consœurs, dont la période de congé maternité sera allongée et mieux rémunérée.

A la grande surprise des observateurs, les plus fervents opposants du début – la FMF et le BLOC – ont signé avec MG France, fin août, cette nouvelle convention. Alors que la CSMF l’a refusée (au terme d’un débat houleux entre les spécialistes qui ont voté contre, et les généralistes qui étaient partisans de la signature). Le SML s’y est opposé avec 95 % des voix, ce qui, en revanche, n’aura surpris personne.

Mise en place dès décembre, la négociation d’avenants (ROSP du médecin traitant de l’enfant, télémédecine) doit permettre une mise en place de ces avancées, d’ici février prochain.

 

2017 : Le choc des programmes

La caisse nationale a rappelé ses quatre engagements de service pour que le TPG soit opérationnel ce 1er janvier : garantie de paiement sur la base des droits en carte Vitale ; suppression des rejets liés aux droits et aux exonérations des patients ; assurance d’un paiement rapide, assortie de pénalités en cas de retard de plus de 7 jours ouvrés et enfin, mise en place d’une équipe dédiée pour répondre aux questions relatives à la facturation du tiers payant.

Mais les libéraux restent insensibles à ces avancées affichées auxquelles ils ne croient pas. Et ce refus a donné du grain à moudre aux candidats de la primaire de la Droite et du Centre qui, tous autant qu’ils sont, ont promis aux médecins fin 2016 l’abrogation du TPG issu de la loi de santé, une fois élus.

Promesses de revalorisations substantielles d’honoraires, d’allègement de la tutelle administrative, redéfinition des rôles respectifs de l’assurance maladie et des mutuelles et assurances privées, liberté d’installation, franchises, tour de vis pour traquer les gaspillages et retrouver l’équilibre des comptes… On a rasé gratis jusqu’au dimanche 29 novembre, où François Fillon a été déclaré vainqueur, avec un programme de retour à l’équilibre des finances publiques tellement radical qu’il a dû faire rapidement disparaître de son site internet son projet de réforme de l’assurance maladie… Et mettre de l’eau dans son vin sur son intention de supprimer 500 000 fonctionnaires sur la durée du quinquennat.

Dès 2017, en tout cas, les effets concrets de la loi de Santé vont devenir visibles, alors que le contexte politique, à cinq mois de la présidentielle, deviendra de plus en plus prégnant, une fois connu le choix des primaires de la Belle alliance populaire, les 22 et 29 janvier prochains. Sans François Hollande. Marisol Touraine – un temps pressentie pour incarner une alternative à Vincent Peillon pour représenter le PS – se félicite en tout cas de son bilan, avec des comptes de la Sécurité sociale “quasiment” à l’équilibre, un recul des renoncements aux soins, la généralisation du tiers payant, une reconnaissance du droit des aidants, l’accès de tous aux traitements innovants, une complémentaire pour tous les salariés et un renforcement de l’accès à l’IVG notamment.

 

La loi de Santé prend forme, la médecine du travail et la retraite, à la réforme

Issues de la loi de Santé, les nouvelles formalités concernant le don d’organes s’imposent. Ainsi, les personnes de plus de 13 ans refusant de donner leurs organes après leur décès devront-elles communiquer leur décision à un proche ou s’inscrire en ligne sur le registre national des refus et non plus seulement par courrier postal. En outre, les centres hospitaliers et les cliniques devront remettre une lettre de liaison aux patients sortant d’hospitalisation, de manière à assurer la continuité des soins.

Et puis, à l’occasion de la prochaine campagne de vaccination contre la grippe, les pharmaciens d’officine volontaires feront l’objet d’une expérimentation de vaccination, tout comme les médecins généralistes, qui pourront entreposer des vaccins dans leurs cabinets, dès lors qu’ils ont un espace réfrigéré.

Conséquence de la loi travail de Myriam El Khomri, qui a fait passer des “nuits debouts” à la France en 2016, et marcher les citoyens dans les rues, la réforme de la médecine du travail se met également en place depuis le 1er janvier. Prenant en compte la pénurie de médecins du travail, la réforme qui a suscité de gros remous parmi les professionnels, s’articule principalement sur la révision de la fréquence des visites médicales (qui pourront être réalisées par des infirmières), selon que l’employé exerce ou non un métier à risque.

Enfin, ce 1er janvier, la réforme de la retraite “en temps choisi” touchant la retraite complémentaire et l’ASV est entrée en vigueur, à la grande satisfaction de la Carmf et de tous les syndicats médicaux siégeant au conseil d’administration. Elle part du principe que les médecins qui prolongent leur activité au-delà de l’âge légal de la retraite se verront récompensés par des coefficients majorant leurs retraites complémentaire et ASV.

Selon la Carmf, après application de la réforme de la retraite en temps choisi, la retraite versée sera au minimum égale à la retraite actuelle. Dans la plupart des cas, elle sera supérieure. 

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Catherine le Borgne