Une étude du Collectif citoyen des restes à charge en santé portant sur les patients à 100 % dans le cadre d’une ALD démontre qu’ils supportent en moyenne, une facture annuelle de de 752 euros avant intervention des mutuelles. Mais la somme peut être beaucoup plus lourde. Une situation dénoncée par le Collectif, dans une étude portant sur la situation des patients atteints de cancer du sein, diabète, insuffisance rénale chronique et porteurs du VIH. Gérard Raymond, président de la Fédération française des diabétiques, membre du CISS, résume la situation.

 

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Egora : Quels sont les principaux enseignements de l’enquête menée sur le reste à charge des patients en ALD à 100 % ?

Gérard Raymond : Je retiens que ces restes à charge ne sont pas du tout anodins et sont assez hétérogènes pathologies par pathologies, et à l’intérieur même des pathologies. Ce qui montre bien que la prise en charge des patients atteints de pathologies chroniques est personnalisée et qu’il faut tenir compte de nombreux critères. Ensuite, on voit, ce qui est normal, que les personnes en ALD consomment bien plus de soins que les personnes qui n’ont pas ce statut, et que leur reste à charge est globalement supérieur, une moyenne de 750 euros annuels, avec de gros extrêmes.

Ce que l’on peut dire aussi, c’est que les complémentaires santés sont utiles, et notamment lorsque la maladie s’aggrave, mais qu’il faut savoir faire le bon choix en fonction de sa maladie, des risques encourus et des complications à venir.

Pourquoi les frais ne sont-ils pas pris totalement en charge dans un cadre d’ALD donnant droit au 100 % ?

La prise en charge à 100 % concerne un panier de soins défini par l’assurance maladie et la Haute autorité de santé. Mais tout n’est pas forcément pris en charge pour que le patient en ALD soit correctement soigné. Je prends l’exemple du diabétique de type 2 où le premier des soins concerne l’équilibre nutritionnel et l’activité physique : les diététiciennes et les coachs sportifs ne sont pas pris en charge. Sur la prévention de la neuropathie diabétique, les podologues n’interviennent que sur des actes chirurgicaux et pas avant. Si l’on veut avoir un suivi podologique, il faut payer. Idem pour les soins dentaires. On sait que 50 % des personnes diabétiques ont des problèmes de parodontologie, mais il n’y a que 30 % des personnes qui vont voir leur dentiste une fois par an. Il y a un véritable décalage. La prise en charge dite à 100 % se base sur un panier de soins qui mériterait vraiment d’être révisé, pour certaines pathologies plus que d’autres y compris la néphropathie terminale.

La mutuelle peut jouer son rôle de complémentaire, mais à condition qu’elle soit bien choisie. Et cela nous ramène à une véritable formation du patient vis-à-vis de sa maladie. Il faut qu’il la connaisse, se l’approprie, participe bien à ses soins et ait connaissance de l’évolution de sa pathologie pour porter un avis éclairé sur le choix de sa protection complémentaire santé, qui risque d’être plus chère en fonction de la dureté de sa maladie, et des risques qu’il encourt. A noter également pour le diabète, qu’une très forte proportion de malades est titulaire de la CMUc, 1,3 fois de plus que dans la population générale. Le diabète de type 2 touche une population socialement défavorisée qui a une méconnaissance totale du système de santé. Ce que l’on peut dire aussi, c’est que la prise charge dite à 100 % en ALD est extrêmement complexe pour les patients et parfois aussi, pour les médecins généralistes. On voit bien aussi que les patients qui ne font pas l’effort de financer ces soins non pris en charge se retrouvent en hospitalisation, ce qui coûte plus cher au régime général.

Quelles sont vos propositions pour améliorer la situation ?

Nous faisons des propositions globales, comme réviser le panier de soins selon les pathologies et les recommandations de la Haute autorité de santé. Il faut simplifier, en tout cas, bien expliquer ce qu’est le régime d’ALD pour les personnes et les professionnels de santé. Pour notre part, nous continuerons à dénoncer les dépassements d’honoraires ou des pratiques médicales qui ne nous semblent pas rentrer dans le cadre de la solidarité.

Il faut également que dans le cadre des complémentaires santés, on puisse bénéficier de contrats un peu plus lisibles et comparables.

L’accord ANI qui étend la protection complémentaire pour tous sera-t-il de nature à améliorer la situation ?

Les retraités en sont exclus, or, l’âge moyen d’un malade en ALD est 65 ans. Donc, ce n’est pas encore la bonne solution, mais nous y travaillons. Je pense que cette étude, à cette période de l’année, permet de comprendre que ne n’est pas parce qu’un malade est à 100 % que tout est gratuit pour lui et qu’il profite du système de solidarité.

Parmi les candidats à la primaire de la droite et du centre, Nicolas Sarkozy est le seul à proposer le paiement par forfait, pour la prise en charge des patients diabétiques. Qu’en pensez-vous ?

Tout dépend ce que l’on met dans le forfait. Pourquoi pas si cela concerne une prise en charge globale de la santé, de manière pluriprofessionnelle, dans un panier de soins bien défini comportant éducation thérapeutique, accompagnement du patient dans son mode de vie ? Mais il me semble que Nicolas Sarkozy souhaite également que l’on sanctionne les patients qui se déroberaient au protocole. Alors, nous répondrons qu’il faudra également sanctionner les professionnels de santé qui n’accepteraient pas le protocole, soit en pratiquant des dépassements d’honoraires, soit en s’appuyant sur des stratégies médicamenteuses inappropriées. Si on évalue les patients, on doit pouvoir évaluer aussi les professionnels de santé. 

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Catherine Le Borgne