L’Unof-CSMF et MG France ont décidé de demander aux médecins généralistes exerçant en secteur 1 de porter le prix de la consultation de 23 à 25 euros. Ils sont suivis par la plupart des syndicats de médecins qui soutiennent cette offensive tarifaire. Du côté du Syndicat national des jeunes médecins généralistes (SNJMG), la ligne de conduite est beaucoup plus nuancée. On parle de revalorisation de la médecine générale plutôt que du prix de l’acte. D’ailleurs les jeunes MG considèrent ce mode de rémunération comme étant un peu dépassé. Le Dr Emilie Frelat, présidente du SNJMG s’explique.

 

Egora.fr : Que pensez-vous du mot d’ordre de l’Unof et MG France de coter le C à 25 euros ?

Dr Emilie Frelat : Au SNJMG, nous ne sommes ni pour ni contre. Le C à 25 euros, s’il est demandé comme étant la juste reconnaissance de la médecine générale, nous disons oui. Il est nécessaire que l’ensemble des spécialistes cotent la même chose. Les autres spécialistes pouvant coter le C à 25, il est normal que les généralistes puissent faire la même chose.

Si le C à 25 renvoie à une revalorisation de l’acte pur et simple, alors nous ne sommes pas forcement d’accord.

Pour le moment, il s’agit surtout d’une revalorisation du prix de l’acte. Du coup quel mot d’ordre donnez-vous aux généralistes du SNJMG ?

Effectivement le C à 25 euros est pour l’instant demandé comme étant juste une revalorisation de l’acte. Comme nous ne sommes pas complètement d’accord avec cette idée, nous laissons nos adhérents choisir.

Pourquoi n’êtes-vous pas d’accord avec cette demande d’augmenter le prix de l’acte ?

Il est clair que nous ne sommes pas suffisamment payés par rapport à notre nombre d’heures de travail. Mais nous demandons plutôt un accroissement des autres modes de paiement. Je pense par exemple aux forfaits. Nous avons conscience que le paiement pur à l’acte est à bout de souffle. Augmenter l’acte ne va pas dans le sens de notre demande d’une modulation plus importante du mode de rémunération. Lorsque l’on voit un patient qui a un diabète ou un problème cardiaque, les 23 euros de l’acte ne représentent pas grand-chose. Tout le temps que l’on va passer avec le patient en dehors de la consultation doit être pris en charge de manière beaucoup plus globale. C’est pour cela que la revalorisation du prix de l’acte nous gêne un peu. En revanche, la revalorisation de la médecine générale basée sur la revendication d’un tarif équivalent aux autres spécialistes, nous trouvons ça normal.

L’acte est-il appelé à disparaître ?

Non, il ne doit pas disparaître complètement. Il y a des consultations qui ne nécessitent pas de prise en charge complexe et longue. Le métier de généraliste a beaucoup évolué. Nous sommes le premier recours de l’ensemble des patients. Y compris lorsqu’ils ont de gros problèmes de santé, nous faisons le tri dans les prises en charge et les médicaments. L’acte n’est plus adapté à notre manière de travailler dans son ensemble. Il représente une part de notre travail mais il n’y a pas que ça. Ce n’est pas avec la seule revalorisation de l’acte à 25 euros que l’on attirera plus de jeunes vers l’ambulatoire. Il faut un mode de rémunération différent. Les forfaits peuvent être une évolution.

Qu’espérez-vous de la prochaine convention médicale ?

La première chose est la revalorisation de la médecine générale. Il faut avoir conscience que la médecine générale est une spécialité depuis plus d’une dizaine d’année et que, pour l’instant, on parle toujours de généralistes et de spécialistes. Or, il y a les généralistes et les autres spécialistes, de la même manière qu’il y a les cardiologues et les autres spécialistes. Il faudrait déjà arriver à ce que l’on fasse cette différence par le langage. Cela passe aussi par des actes politiques comme une cotation de l’acte à 25 euros parce que nous sommes des spécialistes.

Il va aussi falloir se poser la question de la protection sociale des médecins. Les médecins doivent être vraiment couverts pour les accidents du travail ou les maladies professionnelles. Si demain je me casse la jambe dans mon cabinet, j’ai tout intérêt à ramper jusqu’à la rue parce que je n’ai pas d’assurance accident du travail. C’est quand même problématique. Mon métier consiste à soigner les autres mais je ne suis pas forcément couverte pour mes problèmes de santé.

Lorsque l’on voit que le praticien territorial de médecine générale (PTMG) fonctionne bien, on comprend que ce qui attire énormément les jeunes, c’est la protection sociale. Si on veut des jeunes en ambulatoire, la protection sociale doit suivre. Les jeunes ne sont pas fainéants, ils ne refusent pas de travailler mais ils veulent le faire différemment et sans prendre des risques pour eux ou pour leur famille.

Une enquête menée par l’Unof, MG France et la FMF montre que 82% des médecins généralistes refusent d’appliquer le tiers payant. Quelle est la position du SNJMG sur cette question ?

Pour l’instant nous ne savons pas comment les choses vont se passer. Nous n’avons eu que des écrits et des promesses politiques. Nous faisons déjà le tiers payant pour les ALD, les CMU et les AME. Lorsque l’on voit les difficultés que l’on a, pour certains patients, à se faire payer par les caisses… Personne ne travaille gratuitement. Lorsque nous aurons les assurances qu’il y aura un flux unique, que la sécurité sociale se débrouillera avec les mutuelles ou les patients et que cela fonctionnera à chaque fois, nous dirons OK. Nous ne sommes pas des monstres. Nous sommes plutôt des gens qui avons fait médecine pour sauver le monde. Mais si cela nous oblige à faire 12h de travail en plus par semaine, ça sera non. Cela ne devra pas empiéter sur notre temps médical ou notre vie de famille. Et si cela devient insupportable, j’irai vers le salariat. Pour l’instant les promesses ne sont que des promesses. Je pense que cette enquête correspond à la crainte des médecins de perdre leur temps.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Sandy Bonin