En plein cœur des années folles, un énigmatique anglais du nom d’Otto Overbeck fait fortune avec un appareil de son invention le “Rejuvenator”. Le concept : se poser des électrodes sur la tête et recevoir la décharge électrique, pour profiter d’une exceptionnelle cure de jouvence…

 

Dans les années 1920, un drôle de scientifique s’affiche dans la presse du monde entier : Otto Overbeck jure qu’il a trouvé le moyen de stopper le vieillissement. Avec sa machine miraculeuse, le “Rejuvenator”, “fini les tracas de l’âge”, assure-t-il. Il suffit de brancher la batterie de la machine et de se poser les électrodes sur la tête, le visage ou le dos, au choix. La puissance de la décharge est dîte “douce”, donc aucun souci pour la santé, assure l’inventeur.

L’idée parait saugrenue, pourtant les “Rejuvenator” s’arrachent en Angleterre et dans le reste du monde. Il faut dire que son inventeur ne lésine pas sur la communication. Pour donner une plus grande crédibilité à son appareil, il publie un livre A new Electronic Theory of Life, dans lequel il démontre à quel point l’électrothérapie peut être utile pour tous les déçus de la médecine traditionnelle. Il jure que ses électrodes sont capables de traiter n’importe quelle maladie (sauf les maladies infectieuses et les difformités), mais sont surtout très efficaces pour inverser le processus de vieillissement, notamment la perte et la décoloration des cheveux.

 

“Charlatan”

Les médecins, eux, ont vu d’un très mauvais œil les méthodes d’Overbeck et n’ont pas hésité à le traiter de “charlatan”. L’association de médecine britannique met en garde contre les risques de brûlures liées à l’utilisation de cette machine. Mais rien n’affecte le succès du Rejuvenator.

Overbeck croyait-il réellement à l’efficacité de son appareil, ou a-t-il seulement profité d’un bon filon pour faire fortune ? C’est la question que se pose l’historien de la médecine anglais James Starck, qui rappelle qu’hormis son livre, aucun écrit ni journal intime d’Overbeck n’a été retrouvé.

Cet original, né en 1860, était chimiste de formation. Il a travaillé un temps comme directeur scientifique dans une brasserie, puis s’est mis à créer des inventions en tout genre. Il a déposé plusieurs brevets pour des machines diverses, un produit à base de levure et un procédé de désalcoolisation. Au début des années 1920, il souffre d’une maladie rénale chronique que rien ne semble soulager. C’est alors qu’il aurait eu l’idée de s’appliquer un courant électrique et de commercialiser son incroyable machine. Trois ans après son lancement, Otto Overbeck va beaucoup mieux et s’offre une magnifique demeure dans le comté de Devon en Grande-Bretagne. Il faudra attendre la fin des années 30, pour que le grand public ne se lasse de l’électrothérapie.

 

Des expériences douteuses

Comme lui, à la même époque, plusieurs scientifiques se sont lancés dans des expériences douteuses et certains ont juré avoir trouvé le remède au vieillissement. C’est le cas de l’autrichien Eugen Steinach. Il assurait que la vasectomie chez les hommes vieillissants permettait de limiter la production de spermatozoïdes, tout en boostant la testostérone. Plus folle encore, l’idée de Serge Voronoff qui a tenté de greffer des testicules de singes sur les hommes pour leur assurer vitalité, virilité et jeunesse.

Si aujourd’hui, le principe du Rejuvenator parait totalement fou, la méthode de l’électrothérapie n’a pas été totalement abandonnée par les scientifiques. En effet, la stimulation transcranienne à courant continu (tDCS) suscite aujourd’hui de grands espoirs en psychiatrie. Une équipe australienne, dirigée par Colleen Loo a cherché à démontrer que de faibles courants électriques (1 ou 2 milliampères) peuvent être utiles pour traiter la dépression. Une étude sur 64 patients a montré des résultats positifs.

 

Recherches récentes

En France, une équipe de Lyon I étudie depuis 2009 l’efficacité de la tDCS sur les hallucinations auditives de personnes souffrant de schizophrénie. Et, depuis 2012, six équipes de Grenoble, Lyon, Rennes, Ville-Evrard, Strasbourg et Besançon suivent, pour trois ans, 120 patients qui subiront deux cessions quotidiennes de 30 minutes de tDCS, pendant cinq jours, quinze jours puis un mois, afin de voir les effets sur la dépression.

Enfin, des recherches sont également menées sur la migraine, la démence, la schizophrénie, les douleurs chroniques, ou les troubles de l’attention. Des résultats qui pourraient, peut-être, donner un nouveau souffle à la méthode Overbeck.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : A.B.

 

D’après un article du Monde des sciences, n°8, avril, mai 2013.