“De nombreux indicateurs laissent à penser que la situation de la PDS pourrait se dégrader dans les années à venir”. Le dernier bilan sur la permanence des soins réalisé par l’Ordre des médecins est pessimiste. La faute en partie aux ARS et à leur “manque de mesures d’adaptation”.

 

La situation est claire. De moins en moins de médecins se portent volontaires pour la permanence des soins. En 2014, seuls 60% des départements rapportent un taux de médecins généralistes volontaires supérieur à 60% (contre 73% des départements en 2012) indique le rapport de l’Ordre.

“Cela va être lent et long mais l’effondrement de la PDS est inexorable. C’est la suite logique de la désertification médicale”, constate, amer, le Dr Claude Leicher, président de MG France. “La surcharge de travail des généralistes additionnée à l’accroissement des tâches administratives a un impact négatif sur la permanence des soins qui devient de plus en plus difficile. Le réservoir se vide par le bas et il y a très peu de nouvelles installations”, déplore le Dr Jean-Michel Beral, en charge de la PDS au conseil de l’Ordre et auteur du rapport.

 

“L’insatisfaction de la profession commence à se voir”

“Depuis que le Conseil national recueille des données chiffrées, la tendance au recul du volontariat est constante en dépit de mesures prises pour alléger les astreintes (renforcement de la régulation libérale, garde postée, arrêt de gardes en nuit profonde)”, constate le rapport de l’Ordre. “L’insatisfaction de la profession commence à se voir”, ajoute le Dr Beral.

Plusieurs facteurs sont mis en cause, à commencer par le manque de mesures prises par les financeurs, soit l’Etat au travers des ARS. “Les mécanismes d’adaptation prévus par les ARS arrivent à leurs limites” juge le Dr Beral qui déplore un nombre de création de maison médicale de garde quasi nul. “La pérennité financière de ces structures est mauvaise. Certaines menacent déjà de fermer”, constate-t-il.

Autre difficulté, le regroupement de territoires mis en œuvre pour répondre au déficit de praticiens dans les zones rurales s’étend à présent sur des zones géographiques trop étendues. Bilan: “les médecins ne se connaissent plus entre eux, il y a donc moins de solidarité entre praticiens”, note le conseiller ordinal.

 

“Politique de gribouille à l’encontre du système libéral et en faveur de l’hôpital”

Enfin, l’arrêt de la garde en nuit profonde se poursuit à un rythme soutenu et concerne désormais 67% des territoires de PDS, contre 61 % l’année dernière et 55 %, il y a deux ans. “Après avoir connu une époque où les ARS réquisitionnaient les médecins, elle supprime maintenant des tranches horaires qui fonctionnent pourtant très bien. Il s’agit là d’une politique illisible et détestable pour les généralistes”, peste le Dr Luc Duquesnel, président de l’UNOF-CSMF. “Dans le Nord-Pas-de-Calais ou en Lorraine, les gardes en nuit profondes marchaient très bien. Leur suppression, y compris pour SOS est scandaleuse. Les populations, notamment rurales et éloignées des hôpitaux, ne comprennent pas”, ajoute le généraliste exaspéré.

Ainsi entre minuit et 8 heures, les patients sont envoyés vers les hôpitaux, parfois en ambulance. “Le financeur mène une politique de gribouille à l’encontre du système libéral et en faveur de l’hôpital. C’est l’inverse de ce qu’il faudrait faire et de ce qui est prôné dans la loi de santé. Un patient envoyé aux urgences coûte 270 euros alors qu’il ne coûtera que 50 euros en libéral”, s’insurge le Dr Duquesnel.

 

“Nous demandons aux ARS de faire le travail”

L’Ordre des médecins souhaite donc que s’instaure davantage de concertation entre les ARS et les représentants de la profession “afin que la poursuite de la PDS, mission essentielle de service public, puisse être assurée de manière pérenne”. Il prône notamment un renforcement de la régulation médicale libérale. “La régulation est la porte d’entrée du dispositif. Nous constatons pourtant que près d’un acte sur deux n’est pas régulé alors qu’entre 50 et 80% des appels aboutissent à une télé-prescription”, indique le Dr Béral qui prône le développement de la régulation libérale. “La régulation doit être faite par des médecins spécifiques. Les généralistes consacrent plus de temps lors des appels que le Samu qui ne peut pas se le permettre. Pourtant dans un tiers des départements, c’est le Samu qui régule”, insiste-t-il.

“Il faut que les ARS mettent des moyens sur la table pour développer la PDS et la régulation. Nous attendons les moyens. L’Ordre a été dépossédé de l’organisation de la PDS, nous demandons donc aux ARS de faire le travail et nous n’hésiterons pas à pointer du doigt les dysfonctionnements”, prévient le Dr Béral.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Sandy Berrebi-Bonin