Entre 450 et 1 400 euros en moyenne de reste à charge après une mastectomie, c’est le constat alarmant relevé dans le rapport 2014 sur l’observatoire sociétal des cancers. Une enquête, menée par BVA pour la Ligue contre le cancer, sur les frais restant à la charge des femmes à la suite d’une mastectomie montre que plus d’une femme sur deux opérée d’une mastectomie a rencontré des difficultés financières malgré les remboursements de la sécurité sociale et de leur complémentaire.

 

“En payant 60 euros par mois pour ma mutuelle, j’ai dû choisir entre le remboursement d’une perruque ou celui d’une prothèse mammaire externe. J’ai choisi la prothèse”, raconte Suumeya opérée d’une mastectomie il y a deux ans. Cette femme de 45 ans aurait pu être remboursée de sa prothèse ET de sa perruque mais pour avoir les deux, il aurait fallu débourser 150 euros de cotisation mensuelle à sa mutuelle. “Devoir faire un tel choix est inacceptable”, s’agace Graziella Fumagali, administratrice nationale de la Ligue contre le cancer et représentante des malades.

C’est parce que le reste à charge des patients victimes de cancer est sous-estimé par les pouvoirs publics que la Ligue contre le cancer s’est particulièrement intéressée à ce sujet dans son quatrième rapport de l’observatoire sociétal des cancers. “Cette année, nous avons donné la parole aux femmes concernées par la mastectomie… Parfois en colère, parfois résignées, elles témoignent des difficultés notamment financières d’un parcours où la reconstruction chirurgicale n’est pas forcément un passage obligé. Elles font face à des dépenses importantes, parfois récurrentes qui continuent à les pénaliser, même après leur guérison. Fragilisant d’autant plus les femmes les plus modestes ainsi que leurs familles, ces restes à charges creusent un peu plus les inégalités face au cancer, enjeu crucial du Plan cancer 2014-2019”, explique le professeur Jacqueline Godet, présidente de la Ligue contre le cancer.

 

1 330 euros sont consacrés aux dépassements d’honoraires

Ainsi, il apparait que les femmes ayant subi une mastectomie ont en moyenne 456 euros de restes à charge, après remboursement de la sécurité sociale et de la complémentaire. “Les femmes payent souvent de leur poche un accompagnement psychologique. Elles doivent aussi faire face aux dépassements d’honoraires notamment en kinésithérapie. Les crèmes pour soulager leurs cicatrices ne sont pas non plus prises en charge car elles sont considérées comme un médicament de confort. Les patientes ont également à payer des prothèses mammaires externes qui coûtent en moyenne 150 euros mais ne sont remboursée par la sécurité sociale qu’à hauteur de 69,75 euros”, explique l’un des auteurs de l’étude.

Pour les femmes ayant eu recours à une reconstruction mammaire post-mastectomie, le reste à charge grimpe en moyenne à 1391 euros, parmi lesquels 1 330 euros sont consacrés aux dépassements d’honoraires des chirurgiens et des anesthésistes. Des dépassements jugés “inacceptables” pour 9 femmes interrogées sur 10.

 

Et que dire de l’hypocrisie des mutuelles

“Je viens de verser 800 euros à mon chirurgien pour avoir accès à ce “droit à la reconstruction”. Et que dire de l’hypocrisie de nombre de mutuelles qui refusent de considérer tout dépassement d’honoraires. Il n’y a de toute façon pas assez de place dans le service public, en particulier dans les grandes villes pour traiter toutes les femmes dans un délai correct. Oui, pour sauver sa peau on peut être obligée de se faire opérer en libéral et ça coûte fort cher. Oui, la reconstruction par la méthode de son choix doit être proposée à chaque femme, prise intégralement en charge par la Sécurité sociale et dans des délais normaux !” témoigne une patiente citée dans l’Observatoire.

“Nous voulons rappeler que les dépassements d’honoraires ne sont pas un dû. Les médecins doivent respecter le tact et mesure et s’adapter aux difficultés des patientes. Les dépassements d’honoraires sont une double peine pour les malades. Nous voudrions que s’engage une réflexion avec les médecins autour de ce sujet pour établir un état des lieux. Les dépassements ne doivent pas être un frein à la reconstruction”, juge Graziella Fumagali. L’étude dévoile cependant que 14% des femmes refusent la reconstruction pour raisons financières.

Ainsi, près d’une femme sur 5 a dû solliciter une aide financière extérieure pour faire face au reste à charge. 15 % ont fait appel à des membres de leur famille, 8% ont fait appel à des associations et 6 % ont fait un prêt auprès d’une banque ou d’un organisme de crédit.

La Ligue contre le cancer demande donc une prise de conscience des pouvoirs publics et rappelle que “le cancer est un marqueur social qui touche encore plus durement les femmes déjà fragilisées les faisant souvent basculer dans la pauvreté”.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Fanny Napolier