Encore interne et déjà chef d’entreprise : Grégory Coin a créé il y a deux ans “Smartfiches”, une encyclopédie médicale sur smartphone. Seul à son bureau, il a rédigé des fiches dans 15 spécialités et réunit plus de 80 000 utilisateurs. Et il ne compte pas en rester là.

 

Accéder aux dernières recommandations dans chaque spécialité médicale partout et tout le temps, c’est le leitmotiv de Grégory Coin, interne en anesthésie au CHU de Nîmes, et créateur de “Smartfiches médecine”.

L’idée de créer une encyclopédie médicale sur smartphone lui trotte dans la tête depuis ses premières années d’études. “Je faisais beaucoup de handball en compétition, et donc beaucoup de déplacements. Sur un trajet de six heures, j’aurais voulu pouvoir réviser, mais les livres sont trop lourds.” Il faut trouver un moyen pour avoir toujours tout sur soi. Mais les cours le rattrapent, les compétitions se font plus rares et très vite, arrive le temps des révisions des ECN.

 

“Pourquoi tu t’embêtes à passer du temps sur ça ?”

“Quand on prépare les ECN, on sait beaucoup de choses, dans toutes les spécialités, se souvient Grégory Coin. Mais au fur et à mesure que l’internat avance, qu’on se spécialise, on oublie des choses qu’on a pourtant sues…” Pour rafraichir ses connaissances, il n’y a que deux solutions, qui ne lui conviennent pas. Se replonger dans les livres à la bibliothèque universitaire prend trop de temps ; aller fouiner sur le net peut être plus rapide, mais nettement moins fiable. “Mon idée repointe alors le bout de son nez.” Le jeune homme commence à en parler autour de lui et reçoit le soutien de ses externes. Il est temps de se lancer. “J’ai récolté un peu d’argent autour de moi, dans ma famille pour lancer le projet”, explique Grégory Coin.

Il commence par créer une petite SARL, dont il est l’unique membre, et se met à la rédaction de sa première fiche sur l’orthopédie. L’accueil est tel qu’il décide, à l’hiver 2012, de prendre une disponibilité de six mois pour avancer la rédaction. “J’y passais toutes mes journées, assis à mon bureau”. Voilà bientôt une dizaine de fiches supplémentaires prêtes pour la relecture. “Pour la rédaction, je me base sur les recommandations émises par la société savante française. Ensuite, je les fais relire par des universitaires, spécialistes de la discipline”. En bout de chaîne, Grégory travaille avec des prestataires développeurs et infographistes qui gèrent l’aspect technique.

“Depuis deux ans, je ne fais que ça. J’ai mis de côté le sport. J’y passe mes week-end et mes repos de garde”, confie l’interne. Un investissement conséquent en temps, mais pas seulement. Sur l’appli et le site, quelques publicités. Pour ceux qui n’en veulent pas, une version payante, mais qui reste peu utilisée. “Pour l’instant, le modèle n’est pas rentable et je paie les développeurs de ma poche”, assure le jeune homme. Un handicap qui n’a pas manqué d’inquiéter son père. “Il me disait : puisque tu vas être anesthésiste, pourquoi tu t’embêtes à passer du temps sur ça ?” Pour l’étudiant, la réponse est claire : “C’est quelque chose dont les gens ont besoin, donc ça me plaît. C’est mon bébé”. D’autant qu’il est hors de question pour lui de songer à passer en accès payant ou sur abonnement : “Je ne veux pas que l’utilisateur paye”. L’année dernière, il a tout de même reçu un petit coup de pouce d’une commission régionale qui lui a octroyé un prêt de 50 000 euros à taux zéro, dans lequel il puise depuis avec parcimonie.

 

Le second distributeur d’applications de santé français

Mais ces questions financières sont loin de freiner les ambitions du jeune homme. En deux ans, il a mis au point des fiches sur 15 spécialités. Il lui en reste sept pour terminer sa collection. “Je n’ai pas de fiche médecine générale, parce que ça touche toutes les spécialités. J’invite donc les généralistes à aller consulter la fiche qui correspond à leur question du moment.”

Depuis son lancement début 2012, “Smartfiches médecine” a réuni plus de 80 000 utilisateurs, qui y accèdent via leur smartphone, tablette ou depuis le tout récent site web. “Avec 600 000 téléchargements nous sommes le second distributeur d’applications de santé français, derrière le Vidal”, se réjouit ce jeune chef d’entreprise. Et il n’entend pas s’arrêter là. “Etant unique sur le marché, nous visons 50% de la population médicale francophone mondiale.” Ses prétentions se limitent pour le moment au marché francophone. Il est conscient que le caractère national des recommandations handicape son développement à l’international.

Pour le moment, avec 20 000 externes, 14 000 internes et 12 000 docteurs inscrits sa marge de progression se situe dans la population médicale : “Le message que je voudrais faire passer c’est que Smartfiches n’est pas dédié aux étudiants. Le médecin qui recherche une information qu’il a su et qu’il a oublié pourra la retrouver rapidement sur cette application”.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Fanny Napolier