Le Dr Joëlle Mélin, ancienne généraliste se concentre aujourd’hui sur sa carrière de médecin rééducateur fonctionnel qu’elle concilie avec un poste de conseiller régional de Provence-Alpes-Côte-D’azur sous l’étiquette du Front National. Elle est également candidate pour les élections municipales dans la ville d’Aubagne qui compte 46 000 habitants. Conseillère santé attitrée de Marine le Pen, elle nous éclaire sur les idées du parti en matière de santé.

 

 

Egora.fr : Municipales, législatives, cantonales… Vous avez plus de 20 campagnes électorales à votre actif, n’avez-vous pas peur que cela décrédibilise votre candidature ?

Dr Joëlle Mélin : C’est la mission des personnes qui sont très implantées pour le parti, ce que je suis depuis 19 ans, que d’aller au combat. La relève se prépare aussi. En attendant, je considère que c’est tout à fait normal d’y aller.

Il se trouve aussi que dans le cas de ces municipales, tous les conseillers régionaux du mouvement, ce que je suis également, ont reçu comme instruction d‘être tête de liste aux municipales dans la commune où ils sont implantés. Nous avons de plus pour Aubagne un projet extraordinaire alors que notre ville est à deux doigts d’être mise sous tutelle. Nous voulons la sortir de la spirale vicieuse dans laquelle elle est en train d’être bloquée.

 

Une carrière politique est-elle facilement conciliable avec une carrière de médecin ?

Je ne suis plus médecin généraliste, je l’ai été 10 ans. Aujourd’hui je suis médecin rééducateur fonctionnel et j’ai des activités expertales. Les fonctions sont compatibles mais il faut une très grande vigilance pour les séparer complétement.

 

Pourquoi avoir arrêté votre carrière de généraliste ?

La spécialité de rééducateur fonctionnel suppose un plateau technique lourd, ce qui n’est pas compatible avec le métier de généraliste. D’autant que j’exerçais la MG en campagne, ce qui était une activité plus que temps plein. C’était du 24 heures sur 24. A cette époque, la médecine de famille était une autre médecine. Elle était tournée vers les gens, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui.

La médecine générale telle que je la conçois est exclusive de toutes autres activités. La politique d’une part, surtout au niveau où je suis, à savoir conseiller régional, membre du bureau politique et coordinatrice du programme de Marine, voire même la vie de famille. Ceux qui pensent qu’on peut faire de la MG en étant aux 35h n’ont pas compris, je crois, l’esprit du métier. C’est terrible mais je crois que le confort pour le patient passe par l’inconfort pour le médecin. C’est comme ça !

 

Est-ce que la santé occupe une place principale dans votre programme ?

Les pouvoirs du maire en matière de santé ne sont pas très importants. Il s’occupe en revanche de l’hygiène, ce qui est très large. Cela peut aller de la salubrité jusqu’à l’hygiène physique et mentale des employés de mairie par exemple. Concernant la santé, il peut favoriser le développement de certaines activités ou structures. En tout état de cause, on ne peut pas dire que la santé dépende des maires.

 

Certains maires ont pourtant influé dans la recherche de médecins généraliste où dans la création de maison de santé ?

Bien sûr que les maires jouent un rôle, mais le problème se joue surtout au niveau national. Nous menons un combat avec Marine pour éclater le numerus clausus, qui est une machine à faire des déserts médicaux. Le maire à un rôle indirect en permettant que la ville vive, que les gens restent implantés et qu’ils aient besoin d’un médecin. Pourquoi les médecins partent de la campagne ? Parce qu’il n’y a plus assez de clientèle. C’est aussi un problème d’infrastructures, il faut qu’il y ait une Poste, une école… Il ne suffit pas de dire “je construis une maison médicale” ou “j’installe gratuitement un médecin” pour que cela fonctionne. L’expérience a prouvé en milieu rural, particulièrement dans le Nord de la France, où il y a eu énormément de médecins dont le diplôme était polonais. Ils sont tous partis au bout de deux ans. Ils sont venus bénéficier des avantages d’installation, puis au bout du 24ème mois, quand il a fallu payer la Carmf et les taxes, ils sont partis.

 

En tant que femme, médecin et membre du Front National, qu’avez-vous pensé du débat posé par ces 19 députés UMP qui voulaient, par amendement, dé rembourser l’IVG ?

Je ne pense pas. C’est un faux débat. Cela fait partie des vieilles questions d’arrières gardes qui masquent la réalité qui est bien plus grave, à savoir celle de la détresse des femmes. Savoir que la notion de détresse n’apparait plus… Il faut être femme pour savoir ce représente la demande d’une IVG. C’est un moment grave pour les femmes. Le problème n’est pas de savoir si c’est remboursé ou non, il faut prendre la valeur d’un acte grave.

C’est une question de société et je continue de penser que c’est un faux débat. C’est un tout. C’est un problème d’éducation, de savoir ce qu’on fait de sa vie privée. En face il faut se demander qu’est-ce que la solidarité ? L’argent de la sécurité sociale ? Comment on la finance ? Pourquoi ? Lorsque l’on met tout cela face à face, on s’aperçoit qu’il y a un décalage.

 

Le Conseil d’Etat statuera avant l’été sur l’affaire Lambert. Est-ce son rôle ? Est-ce celui des médecins ?

Je pense que les médecins ne devraient en aucun cas, avoir à dire quoi que ce soit sur des volontés qui sont de l’ordre des familles. Les médecins sont là pour la vie et pour rien d’autre. Ils sont là pour que l’accompagnement de la fin de vie soit fait dans de bonnes conditions. Dès l’instant où on laisse aux médecins le choix de décider, les compléments de la loi feront que les médecins seront poursuivis pour ne pas avoir abrégé la vie à temps. C’est encore un faux débat dans lequel nous ne devons pas entrer. La fin de vie est médicalisée tant qu’il y a de la vie, cela ne doit pas être le cas sur l’échéance. Certaines choses me font terriblement peur, notamment une éventuelle régulation de la vie et de la mort. Cela en tant que médecin, je ne peux pas l’entendre.

Dans le cas de l’affaire Lambert, la loi Leonetti suffisait largement.

 

On reproche au Front National d’avoir des idées rétrogrades sur certaines avancées sociales, notamment en matière de santé, est-ce un faux procès ?

Cela fait partie des balivernes que l’on raconte à longueur de temps. Si au bout de 40 ans d’existence du Front, de 40 ans de propos verbaux, écrit, on peut encore penser cela, c’est qu’il faut se renseigner un peu.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Sandy Berrebi-Bonin