Avoir un rendez-vous avec un ophtalmo en secteur 1 en moins de 48h, alors que la durée moyenne est de 100 jours, c’est ce que propose le groupe Point Vision qui inaugurait hier son nouvel espace situé sur le parvis de la Défense (Hauts-de-Seine). L’occasion pour Egora de se prêter au jeu du parcours de soin “en 20 minutes” et surtout d’en savoir plus sur ce nouveau concept.

 

Au pied d’une des nombreuses tours de la Défense, des fléchettes sur les murs vitrés indiquent l’entrée du centre ophtalmologique “Point Vision”. Derrière la porte, c’est l’ébullition. Le groupe fête l’inauguration de son 4ème centre et a convié les journalistes à une journée portes-ouvertes. Ces derniers côtoient les patients venus profiter des cours délais de rendez-vous au tarif de la sécurité sociale. Une visite des lieux en compagnie de Patrice Pouts, président et co-fondateur de Point Vision est prévue au programme. Il me propose d’emblée de tester le parcours de soins. J’accepte.

 

“Transparence pour dédramatiser l’acte médical”

Retour à la case départ. Je me présente auprès d’une des trois hôtesses d’accueil et lui confie ma carte vitale. “On va venir vous chercher” m’indique-t-elle. Je patiente moins de cinq minutes, le regard happé par l’écran de télévision fixé au mur qui présente les divers examens ophtalmologiques. Une jeune femme de 25 ans m’appelle par mon nom, il s’agit de l’orthoptiste. Nous traversons un couloir en parquet clair et franchissons une sorte d’open-space high-tech entouré de cloisons vitrées. “Nous avons voulu jouer sur le jeu de transparence pour dédramatiser l’acte médical” explique Patrice Pouts.

Prise de tension oculaire, contrôle de la réfraction via une tête de réfracteur automatique, contrôle du fond d’œil sans dilatation préalable avec un rétinographe non-mydriatique, j’enchaîne les machines dernier cri pendant environ 15 minutes. C’est également le cas d’un patient pris en charge par une autre orthoptiste dans le même espace. En période de pointe, quatre patients peuvent être examinés en même temps.“C’est un plaisir de travailler sur un matériel si performant. On ne trouve même pas ces machines à l’hôpital” confie la salariée du groupe qui se réjouit également de pouvoir échanger en permanence avec les ophtalmos.

C’est d’ailleurs vers l’un des quatre médecins qu’elle m’envoie. En attendant que l’un d’eux se libère, je patiente dans une salle d’attente ouverte, installée sur une chaise en plexi. Là encore, je n’attends pas longtemps, moins de 10 minutes. Les cabinets des médecins sont également vitrés, mais opaques. La praticienne qui me reçoit me questionne et m’examine de façon approfondie. Toutes les informations recueillies par l’orthoptiste sont partagées en réseau et donc visibles sur son ordinateur.

 

Retraités ou jeunes diplômés

Agée de 67 ans, l’ophtalmologue est retraitée et ne travaille ici que deux jours par semaine et un samedi par moi pour arrondir ses fins de mois. Ancienne libérale, elle a exercé en cabinet privé à la Défense, de 1994 à 2010 avant que ne soit décidé la fermeture de ses locaux pour cause de désamiantage. “Travailler ici est une bonne façon de poursuivre mon activité. J’aime la modernité du centre et le fait d’être aidé par les orthoptistes. Je ne me consacre qu’au médical, pas de paperasse, ni de comptabilité ! Pour le travail que je fournis et le temps que je passe ici, je trouve que mes revenus sont honnêtes” juge-t-elle. Si la praticienne considère que le salariat est idéal pour les retraités, elle glisse à demi-mot qu’il est sans doute plus intéressant pour les jeunes diplômés de s’installer en libéral. “La demande est tellement importante que ce n’est pas périlleux” estime-t-elle.

Pourtant les profils des ophtalmologues des centres Point Vision sont variés. “Nous avons de plus en plus de demandes de jeunes diplômés. Il y a aussi des praticiens qui n’ont jamais voulu s’installer, beaucoup de femmes, des retraités, d’anciens libéraux qui veulent ralentir le rythme”, souligne Patrice Pouts. Si la plupart des médecins sont embauchés en salariat, chaque centre compte “deux patrons” ophtalmos en libéral. Ils sont associés aux trois fondateurs de Point Vision et investissent dans le centre. Patrice Pouts ne souhaite pas entrer dans les détails sur ce sujet, mais précise néanmoins que les “patrons” ou “chefs de centre” sont “majoritaires en droit de vote et ont une liberté de décision”. Ainsi, l’une des chefs du centre de Bordeaux, ancienne PH et spécialiste en contactologie organise des journées concentrées uniquement sur les lentilles de contact.

Les centres Point Vision sont nés dans la tête du Dr François Pelen, ophtalmologue, lorsqu’il était encore vice-président du laboratoire Pfizer. “J’avais remarqué que l’accès au premier recours chez les ophtalmos était très compliqué pour des millions de Français” se souvient-il. Il pense alors à l’aide des orthoptistes, qui ont légalement le droit de soulager les praticiens d’un travail qu’ils ont toujours fait seul. Il imagine un concept qui serait étendu sur tout le territoire national. Le Dr Pelen quitte le laboratoire en 2009, tout comme Patrice Pouts, également embauché par Pfizer et avec qui il a partagé son projet. Les deux hommes s’associent avec un juriste et le premier centre ouvre en janvier 2012, boulevard de Madeleine à Paris.

 

Pas du low-cost

En plus de proposer des rendez-vous dans des délais de 48h, ils proposent des tarifs de secteur 1 mais se défendent de pratiquer de la médecine low cost. “L’objectif n’est pas de casser le marché, mais d’offrir une prestation de qualité, dans un délai réduit, au juste prix. On se contente d’être au tarif de la sécurité sociale sur les actes pris en charge. Sur les actes non remboursés comme la chirurgie réfractive, on s’est calé sur le tarif moyen pratiqué par les ophtalmos” revendique Patrice Pouts. Le prix moyen d’une consultation tourne autour de 40 euros.

“C’est une très bonne chose” estime le Dr Jean-Bernard Rottier, président du syndicat national des ophtalmologistes de France (SNOF) qui ne voit pas de concurrence déloyale. “Le concept est surprenant, les praticiens ont choisi de se concentrer sur la réfraction et non sur les pathologies lourdes. C’est nouveau et très astucieux” constate-t-il. Si le groupe Point Vision a eu quelques différents avec le conseil de l’Ordre sur le statut juridique de la société, le problème est aujourd’hui résolu.

En plus des 4 centres déjà ouverts, six ouvertures sont programmées cette année. Créteil, Aubagne, Marseille, Montpellier et Lyon sont concernés. Le groupe envisage d’ouvrir une cinquantaine de centres à l’horizon 2019. Avec quatre ophtalmos, quatre orthoptistes et quatre secrétaires, les centres accueillent en moyennes 200 patients par jour. “Il faut compter 16 mois avant d’être bénéficiaire. C’est déjà le cas du centre de la Madeleine” indique le Dr Pelen.

 

Des délais de 24 jours à 7 mois pour avoir un rendez-vous

77 jours, c’est le délai moyen en France pour obtenir un rendez-vous chez l’ophtalmologue, et ce délai peut atteindre 7 mois dans certains départements, voire un an chez certains praticiens, selon une enquête auprès de plus de 2.600 d’entre eux réalisée pour Point Vision.

15% des ophtalmos ne sont plus en mesure d’accepter de nouveaux patients. Dans 10 départements, les refus de rendez-vous pour cause d’agenda saturé concernent 30 à 65% des spécialistes libéraux.

C’est à Paris, dans les Hauts-de-Seine (92), les Alpes-Maritimes (06) et les Bouches-du-Rhône (13) que les délais d’attente pour un rendez-vous sont les plus courts (de 24 à 40 jours en moyenne).

A l’inverse, dans la Loire (42), dans le Finistère (29), en Isère (38) et en Seine-Maritime (76), les délais restent très longs : supérieurs à 152 jours d’attente.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Sandy Berrebi-Bonin