Le Dr Christophe Lamarre héberge depuis plus de trois semaines 50 roms dans son ancien cabinet médical du quartier de l’Hommelet à Roubaix. La nuit, ils s’entassent à plus de 150. Il estime qu’il avait “le devoir” de les aider.

 

“Les chiens on les emmène à la SPA, mais les roms on les laisse mourir de froid dans la rue”. Le Dr Christophe Lamarre, médecin généraliste à Roubaix est indigné.

Tout a commencé, le 27 septembre, jour de l’évacuation du campement du Gallon d’eau à Roubaix. “Le lieu était immonde, à coté les favelas de Rio c’était du quatre étoiles. Il y avait des rats énormes” commente le Dr Lamarre qui comprend le principe de l’évacuation du lieu. Il regrette cependant qu’aucune solution n’ait été trouvée pour les familles, laissées sur le carreau. “Le jour de l’évacuation, je me suis convaincu de ne pas m’y rendre. Je me connais, j’aurais été capable d’héberger des familles chez moi. Mais à midi, j’ai craqué et j’y suis allé. Je suis tombé sur une famille que je soigne dont l’un des membres est malade”, se souvient le généraliste. Le praticien passe des dizaines de coups de téléphone pour tenter de leur trouver un lieu d’hébergements mais rien ne fonctionne.

 

“Je n’ai mis ni eau chaude, ni chauffage, ni électricité pour ne pas que la situation perdure”

C’est alors que le médecin pense à son ancienne maison médicale, un ancien entrepôt rénové de 400 m2. “Je les emmené, mais je les ai prévenu de ne le dire à personne. Je n’ai mis ni eau chaude, ni chauffage, ni électricité pour ne pas que la situation perdure” explique-t-il, craignant un attroupement de roms dans l’immeuble. Une fois la famille installée, le Dr Lamarre part à la recherche de deux autres familles précaires, l’une avec un petit garçon tétraplégique de 5 ans et l’autre avec une polyarthrite rhumatoïde grave. Il apprend que la première a obtenu deux semaines d’hébergement à l’hôtel et installe l’autre dans le cabinet.

“Deux jours plus tard, j’ai reçu des coups de téléphone affolés des voisins qui sont tous mes patients. Des roms arrivaient de partout. Ils transportaient des caddies contenant le peu de choses qu’ils avaient, de vieux frigos ou des matelas” raconte le généraliste.

 

De 10 à 50 personnes

Le dimanche après-midi, ils étaient 200 à l’intérieur et à l’extérieur de l’immeuble. “Ils commençaient à se battre, entre eux pour rentrer. Des voisins menaçaient d’incendier l’immeuble. Le maire a du faire venir la police municipale” déplore le Dr Lamarre. Bilan, il passe de l’hébergement de deux familles de 10 personnes en tout à 50 personnes. “On a du faire un tri. On a gardé les plus fragiles, les femmes enceintes ou les enfants malades. On ne pouvait pas les remettre à la rue” se défend le praticien qui a cependant tenu “à mettre les points sur les i. Ils ont interdiction que les locaux soient sales. La journée, ils ne sont pas plus d’une cinquantaine” ajoute le généraliste.

Il a été entendu puisqu’à ce jour la maison médicale est parfaitement entretenue. En revanche le soir, d’autres roms rejoignent l’immeuble pour y passer la nuit. “Ils s’entassent au moins à 150, dorment dans les couloirs mais repartent très tôt le matin sans se faire remarquer. Ils n’ont aucun lieu pour dormir et il commence à faire vraiment froid” soupire le médecin.

Finalement l’eau courante a été remise et des chauffages électriques ont été installés en attendant qu’un plombier bénévole ne répare le chauffage central. Une douche devrait également être posée liste le Dr Lamarre qui dit avoir agi avec sa “sensibilité d’être humain”. “Pour les deux premières familles, j’estime que j’avais obligation de les aider à trouver une solution. Cela fait parti de mon serment d’Hippocrate” juge le médecin avant d’anticiper les futures attaques “je ne dis pas que les médecins doivent héberger des roms, mais lorsqu’on laisse à la rue un enfant tétraplégique, on se doit de l’aider” souligne-t-il.

 

“Actes gratuits”

Le Dr Lamarre se défend également de vouloir faire de l’argent avec les consultations des roms qu’il héberge. “Ce n’est plus moi qui les soigne et lorsque cela m’arrive de le faire, je fais des actes gratuits. Je veux être irréprochable” plaide le praticien qui est en bisbilles avec le conseil de l’Ordre. Il passe désormais la main à des associations et assure que de s’occuper des roms lui prend moins de 10% de son temps. Prochaine étape : obliger le préfet à s’occuper de ces familles. “Je voudrais faire un prêt gratuit de mon bâtiment à la préfecture et les obliger à en assumer le coût. J’y travaille avec des conseillers juridiques” indique-t-il avant de conclure “le préfet doit assumer ses responsabilité”.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Sandy Berrebi-Bonin