Des médecins et des parlementaires ont constitué une association qui vise à éradiquer les violences sexuelles en France, en s’y attaquant sous l’angle de la santé publique. Leur programme repose sur l’analogie que l’on peut faire entre ces agressions et une épidémie virale.

 

Que vous le sachiez ou non, quelqu’un de votre entourage, plusieurs de vos patients, ont, un jour, été victimes de violences sexuelles. Environ un homme sur six et une femme sur quatre sont victimes de telles violences dans leur vie, des milliers d’enfants tous les jours.

Ces violences engendrent de nombreux maux, conscients ou inconscients, le plus souvent non ou mal traités. Elles sont bien souvent la racine d’autres agressions. Pour le Dr Violaine Guérin (Paris), endocrinologue et gynécologue médicale,”il est temps que les choses changent, que la planète et notre pays en particulier disent stop aux violences sexuelles, de façon déterminée, avec une vraie stratégie d’éradication, et prennent soin des personnes en souffrance pour les conduire à la guérison, une vraie guérison grâce à des protocoles de soins pertinents”.

L’association “Stop aux violences sexuelles” (SVS), qui réunit médecins et paramédicaux, politiques, magistrats, témoins et intervenants dans le monde scolaire et sportif, se propose de s’attaquer à ce problème de manière originale et innovante, avec une stratégie de santé publique. Sa présidente, le Dr Violaine Guérin, a souligné, lors d’une conférence de presse le 6 juin dernier, que “tout se passe comme si les violences sexuelles étaient une épidémie virale. Tel un virus, l’infection détourne les ressources de l’être atteint pour faire progresser le mal dans des aspects multiformes” :

– une fragilisation psychologique ayant des répercussions dans tous les domaines de la vie, avec au centre le manque de confiance en soi ;
– des troubles psychiatriques plus ou moins sévères ;
– des maladies, dont les racines sont le plus souvent occultées par la formation insuffisante des médecins sur les violences sexuelles.

Le potentiel infectant peut être dirigé contre la victime ou contre un tiers. Outre la pathologie suicidaire, de nombreux malades sont des victimes ayant activé leur potentiel auto-infectant, d’où la fréquence des maladies auto-immunes chez les personnes victimes de violences sexuelles (endométrioses, dysthyroïdies, maladies de Crohn, psoriasis localisés aux parties génitales, …) ou des cancers en lien avec les traumatismes subis. Dans d’autres cas, la victime devient agresseur de tiers. D’où l’idée de mettre sur pied une campagne d’éradication des violences sexuelles, comme s’il s’agissait d’un virus et d’une stratégie vaccinale.

Le programme SVS a débuté officiellement le 11 mars 2013 avec une réunion multidisciplinaire dans l’enceinte du Sénat. L’association prépare aujourd’hui des Assises Nationales qui se dérouleront en janvier 2014 et qui entérineront le programme de lutte qui s’attaque à tous les aspects de l’épidémie :

– Prévention : information, éducation sexuelle, formation des encadrants (notamment dans le sport ou les internats), rappel des limites (respect de l’intimité des enfants) ;
-“Vaccination” : faire voter l’imprescriptibilité et la tolérance zéro pour tout type d’agression sexuelle ;
– Lutte contre la contagion : prise en charge des agresseurs, enfants ou adultes, dans des réseaux de soin qu’il convient de développer et de structurer ;
– Soin des sujets malades : mise en place d’une ALD 30 pour les victimes de violence sexuelle, avec un remboursement à 100% des traitements. “Le soin fait appel à de multiples thérapeutes et reste inaccessible pour la plupart des victimes. Nous travaillons avec des médecins, psychiatres, kinésithérapeutes, ostéopathes mais aussi la thérapie corporelle (nous avons par exemple mis en place un programme avec la fédération française d’escrime), ou les coach en réinsertion professionnelle”, précise le Dr Guérin ;
– Dépistage : faire en sorte que “avez-vous subi des violences sexuelles ?” entre dans le questionnaire de base proposé aux étudiants en médecine lors de la consultation. Cette question est pour l’instant évacuée des grandes études de cohortes, malgré la prévalence de ces violences.

L’association va mettre à disposition des médecins, sur son site internet www.stopauxviolencessexuelles.com, des protocoles de soins validés. “Après le diagnostic de ce qui s’est passé, il faut faire l’état des lieux des dégâts, puis mettre en place un protocole de réparation”, résume le Dr Violaine Guérin, qui précise aussi que des recommandations seront édictées pour aider les ex-victimes demandeuses de conseils pour leurs propres enfants.

 

Cinq erreurs à ne pas commettre

Pour bien comprendre les violences sexuelles, il ne faut pas…

1) méconnaitre les dégâts d’un attouchement : il conduit souvent aux mêmes dégâts qu’un viol.
2) méconnaitre l’ampleur des dégâts : colossaux et aux multiples facettes, de manière immédiate ou retardée.
3) méconnaitre le refoulement et les délais d’émergence du traumatisme, d’où la recherche de l’imprescriptibilité sur le plan juridique
4) faire des violences sexuelles un problème essentiellement féminin : la violence sexuelle concerne hommes et femmes dans des proportions très proche, ses racines se situent dans l’enfance
5) méconnaitre la nature d’un agresseur : qu’il soit agresseur adulte ou enfant, c’est un malade à prendre en charge.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Dr Philippe Massol

 

Note : Le Dr Violaine Guérin est l’auteur de STOP aux violences sexuelles, Écoutons donc ces corps qui parlent !. Auto Edition, 2011.