A raison de 6 consultations par semaine perdues en moyenne à cause des rendez-vous non honorés, non excusés des patients, la région Franche-Comté perd l’équivalent du travail hebdomadaire de 137 médecins spécialistes et 60 généralistes ! Dans un contexte de désertification médicale, l’Union régionale des professions de santé vient de sonner l’alerte.

 

Pour la première fois, l’Union régionale des professions de santé (URPS) de Franche-Comté s’est employée à chiffrer l’impact de ces rendez-vous non honorés et non excusés qui agacent tous les médecins, à partir des résultats d’un important questionnaire envoyé par courrier puis e-mail aux 1140 médecins généralistes et 747 spécialistes libéraux de la région (taux de réponse moyen de 17 %, plus élevé parmi les spécialistes).

 

4 800 consultations perdues par semaine

Extrapolés à toute la Franche-Comté*, les résultats sont impressionnants. A raison d’une moyenne de 6 consultations par semaine non honorées non excusées (7,4 patients pour les spécialistes et 4,2 pour les généralistes), ces lapins représentent pour les médecins spécialistes, plus touchés par le phénomène, environ 5 500 consultations perdues par semaine. Soit encore l’équivalent de 137 médecins spécialistes équivalents temps plein.

Les généralistes perdent 4 800 consultations par semaines, soit encore ¬le travail hebdomadaire de 60 médecins généralistes en équivalent temps plein. En ces périodes de pénurie médicale, où les pouvoirs publics vont installer un observatoire de l’accès aux soins prenant en compte le temps d’attente avant un rendez-vous, et où les patients viennent d’en faire de même, pour surveiller la qualité et les modes d’accès aux soins, voilà un bilan qui fait plus qu’interroger.

En tout cas, il a stupéfié les élus de l’Union régionale de Franche-Comté qui n’imaginaient pas l’ampleur réelle du phénomène. Et a particulièrement saisi la CPAM du Doubs où la présidente de l’URPS, le Dr. Christine Bertin-Belot, médecin homéopathe du SML, a présenté les résultats de cette enquête en Commission paritaire locale (CPL).

 

Décomptes

Qui sont ces patients qui abusent ? Des habitués pourrait-on dire puisque 63 % des rendez-vous non honorés sont le fait de patient repérés pour ces faits, dont 39 % de façon coutumière. Plus de la moitié (60 %) de ces rendez-vous manqués sont le fait de malades en tiers-payant, essentiellement titulaires de la CMU. Tous les actes sont concernés, majoritairement les consultations, mais aussi les actes techniques (48,8 %) et les actes chirurgicaux (13,6 %). 90 % des rendez-manqués ne sont pas excusés et lorsque le patient prévient, c’est presque tout le temps (88 %), le jour même.

“Imaginez l’état d’esprit d’un ORL par exemple, qui travaille 70 heures par semaine à qui on demande en plus de faire une permanence des soins, confronté à ce genre de comportements. C’est insupportable !” témoigne Thomas Penn, le directeur de l’Urps.

Interrogés sur les solutions à un problème qui empoisonne la vie du cabinet, et qui est souvent vécu comme une véritable plaie, les médecins répondent majoritairement (51 %) qu’il faut les faire payer. Mais comment faire avec un patient en tiers payant ? 28 autres pour cent préconisent d’exclure temporairement ou définitivement le malade de la patientèle. Autre solution : le rappel systématique par la secrétaire, la veille du rendez-vous.

La CPAM du Doubs pour sa part, envisage de mener une campagne d’information auprès des patients par le biais d’un message sur les décomptes de remboursements. Estimant devoir poursuivre sa mission de soutien des confrères et d’aide à l’exercice professionnel, l’URPS va maintenant saisir l’ARS de Franche-Comté, les syndicats médicaux nationaux, les représentants des autres professions de santé et les institutionnels. Mais aussi les hôpitaux publics et les cliniques privées qui, eux aussi, sont impactés par le problème.

 

*Données France-Comté 2011 : 1 887 médecins libéraux dont 1140 généralistes et 747 spécialistes, qui génèrent 4 093 actes annuels en moyenne par généraliste, soit 79 actes/semaine et 2 022 actes moyens par spécialiste, soit 40 actes/semaine.