La ministre de la Santé Marisol Touraine était en visite, hier après midi, à l’hôpital privé Saint-Joseph, dans le 14ème arrondissement parisien. Depuis avril 2010, cette structure emploie quatre “gestionnaires de lits”, responsables du placement des patients en aval des urgences.

 

“Notre mission est d’optimiser l’occupation des lits dans l’hôpital. Nous travaillons en collaboration avec les urgences mais aussi avec tous les autres services, pour avoir une vision globale des lits disponibles ou prochainement disponibles au sein de l’hôpital”, raconte Victoria Soldourdin, gestionnaire de lit à Saint-Joseph depuis deux ans et demi.

Grâce au travail de ces gestionnaires, une fonction nouvelle en France mais qui existe déjà dans les pays anglo-saxons, l’hôpital affiche un taux d’occupation des lits de 80% et un taux de transfert de moins de 7%, qui concerne essentiellement les spécialités qui ne sont pas assurées sur place.

Une efficacité qui semble séduire les pouvoirs publics. Déjà, en présentant son pacte de confiance pour l’hôpital début mars, Marisol Touraine avait expliqué la nécessité d’aborder les questions d’organisation à l’hôpital. On sait désormais que cette réorganisation passera notamment par ces “gestionnaires de lits”. S’ils existent déjà au sein d’une vingtaine d’établissements en France, la ministre a annoncé qu’ils concerneraient bientôt 150 autres hôpitaux. “J’ai la conviction qu’il s’agit d’une structure innovante et d’avenir”, s’est enthousiasmé Marisol Touraine.

Les ARS vont être chargées de faire la sélection, selon des critères “d’affluence, de temps d’attente aux urgences et de désorganisation” et de fournir une liste dans les deux ou trois semaines à venir. La mise en place des gestionnaires devrait être effective dans les 18 mois. “Nous verrons si des postes doivent être créés ou bien seulement réaffectés“, a précisé la ministre.

 

“Des gestionnaires de lits sans lits, ça sert à quoi ?”

Les objectifs affichés sont multiples. Une supervision globale des lits permettra de faire gagner du temps aux patients en réduisant les délais d’admissions, de réaliser des économies grâce à une meilleure organisation interne, mais surtout de libérer du temps médical. Le chef du service des urgences, Olivier Ganancia, travaille à Saint-Joseph depuis cinq mois et apprécie grandement le travail des gestionnaires. “C’est simple, on économise deux heures par jour de coups de fil que l’on passait pour trouver des lits à nos patients”, note-t-il.

Mais ces annonces ne sont pas du goût de tous. “Ce sont des mots de communicants”, tempête Gérald Kierzek, urgentiste à l’hôpital parisien de l’Hôtel-Dieu où la survie du service des urgences semble compromise. “On vient de nous supprimer 40 lits. Des gestionnaires de lits sans lits, ça sert à quoi ?, s’exclame-t-il. Il faut revenir au pragmatisme”.

De son côté le président de l’Association des médecins urgentistes de France, Patrick Pelloux, ne comprend pas comment un fonctionnement en place dans une structure privée pourrait être copié dans des établissements publics. “Dans le privé, ils ont de la place, ils n’ont pas ce problème de manque de lits d’aval !, fait-il remarquer. On est dans une telle pénurie dans les hôpitaux publics, que pointer les problèmes d’organisation ne changera rien.”

Pourtant, la ministre semble bien décidée à prendre le problème par ce bout là de la lorgnette. “L’amélioration des services des urgences ne relève pas d’un manque de moyens et de personnes, mais avant tout d’organisation”, a-t-elle répété au cours de sa visite.

 

“Organisation pensée collectivement”

“Les urgences ne sont pas programmables, mais elles sont prévisibles. Les flux sont stables. On a zéro déprogrammation aujourd’hui”, assure Olivier Ganancia.

Les gestionnaires de lits travaillant avec tous les services de l’hôpital, ils permettent une amélioration de l’organisation non seulement des urgences mais aussi de l’hôpital dans sa globalité. “Il s’agit d’avoir une organisation pensée collectivement, a souhaité la ministre. Le problème des urgences n’est pas seulement celui du service des urgences. Il faut que la communauté médicale s’implique dans son ensemble.”

Pierre Carli, chef de service du Samu de Paris, qui accompagnait Marisol Touraine à Saint-Joseph s’est félicité de ses annonces. Pour lui, prendre conscience du problème des lits d’aval aux urgences permet de prendre conscience de la nécessité d’organiser les lits à l’hôpital. “C’est là qu’on voit que les urgences ne sont pas le problème, mais une partie de la solution, s’est-il amusé. C’est une bonne nouvelle !”

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Fanny Napolier