“Je veux attirer l’attention sur la désertification médicale la plus inquiétante, celle des zones suburbaines, liées à une insécurité croissante qui touche les professions de santé au même titre que tous les représentants de l’autorité. Alors que la profession se féminise, l’insécurité joue un rôle primordial dans la sous médicalisation de certains territoires”, a solennellement déclaré le Président du conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM) Michel Legmann, en présentant le bilan décennal de l’Observatoire de la sécurité des médecins.

Voilà en effet dix ans que cet observatoire a été installé sous l’impulsion de l’Ordre, et le nombre d’incidents recensés annuellement reste aujourd’hui bien supérieur à la moyenne enregistrée depuis sa création en 2003, soit 666 faits notifiés. En effet, 798 incidents ont été recensés en 2012, contre 822 en 2011, un petit recul assez peu signifiant, si l’on tient aussi compte du fait que la sous-déclaration est manifeste. D’ailleurs, seuls 33 % des incidents recensés en 2012 ont été suivis d’un dépôt de plainte, sans doute de peur des représailles. Pour pallier ce problème, Michel Legmann a rappelé que les conseils départementaux pouvaient porter plainte en lieu et place du médecin victime.

Autre “nouveauté” du bilan 2012 : si les généralistes sont les plus touchés (56 % des agressions), les spécialistes sont de plus en plus concernés. Arrivent ainsi en tête les ophtalmologistes (6 % du total), les psychiatres, les dermatologues, les médecins du travail et les gynécologues-obstétriciens. Au total, les spécialistes sont concernés par 44 % des agressions recensées. Sans surprise, on apprend que le médecin est la victime dans 90 % des cas, et qu’un incident sur deux est le fait du patient (critiques sur la prise en charge, vol, protestations après refus de prescription, temps d’attente jugé excessif) et de son entourage pour les 50 % restant. Les agressions physiques représentent 12 % des cas, et 8 % ont suscité un arrêt de travail.

Malgré une amélioration sensible, le pire département vis-à-vis de l’insécurité reste la Seine-Saint-Denis (46 incidents en 2012 contre 67 un an auparavant), suivi par le Nord (45) et Paris (41). Les Yvelines (26 déclarations) ainsi que le Val d’Oise complètent le classement du “top ten” des départements dangereux. Mais ce classement change si l’on prend en compte le taux de victimation, c’est-à-dire le nombre d’incidents par rapport au nombre de médecins en activité. On trouve alors le Vaucluse en tête (1,9 % des médecins y a déclaré un incident), puis la Loire (1,5 %), le Cher (1,2 %) et la Seine-Saint-Denis (1,2 %) qui ne se situe plus qu’en quatrième position. L’Ordre s’interroge sur ce classement et promet de chercher à en savoir plus. Mais affirme néanmoins que “l’insécurité est un phénomène qui touche toute la France”.

En avril 2011, un protocole national pour la prévention et le traitement de la violence à l’encontre des professions de santé était co rédigé entre les ordres nationaux et les représentants des Ministères de l’Intérieur, de la Santé et de la Justice.

Depuis sa signature en avril 2011, 68 départements ont pris en compte le processus de santé et 43 d’entre eux sont déjà dotés une procédure départementale validée avec référent sécurité dédié identifié.