Marisol Touraine a jugé préférable d’éteindre rapidement le feu qui était en train de gagner toute la population des médecins du premier secteur. Et c’est à Cannes, devant les cadres de la CSMF réunis pour leur 18ème université d’été, que la Ministre a clairement confirmé qu’elle n’avait pas l’intention de toucher aux “exonérations” sur le montant de leurs cotisations sociales, bénéficiant aux médecins en secteur conventionné strict. Ouf, la balle n’est pas passée loin.

Ce qui a mis le feu aux poudres ? Le dernier rapport de la Cour des Comptes sur la sécurité sociale, pointant du doigt les avantages accordés “sans contrepartie” aux médecins du premier secteur. On appréciera le terme, car c’est bien en échange de la contrainte des honoraires stricts, que ces praticiens bénéficient depuis l’origine du système conventionnel, d’une prise en charge partielle par les caisses de leurs cotisations de sécurité sociale, allocations familiales et surtout, ASV. Un acte côté 23 euros devient en fait à 26 euros à l’assurance maladie.

Pas touche à ces avantages conventionnels, ont répondu unanimement la Csmf, l’Unof, l’Umespe et toutes les organisations syndicales de médecins. La Confédération évoquait même un “casus belli” si le contrat conventionnel venait à être écorné à l’avenir. Le moindre des paradoxes n’est-il pas en effet que les magistrats de la rue Cambon se mettent à explorer la piste des avantages liés au secteur conventionné strict, au moment où le secteur 2 est passé à la loupe, et les honoraires “excessifs”, voués aux gémonies ?

Selon la Cour, ces honoraires différés ont représenté en 2011, 2,2 milliards d’euros. Une somme qu’elle n’a pas hésité à mettre en regard avec les 2,5 milliards d’euros, liés aux dépassements d’honoraires. Dans ses recommandations iconoclastes, la Cour expliquait vouloir utiliser l’enveloppe des honoraires différés, pour améliorer l’accès aux soins, à la fois géographique et financier.  

L’idée : moduler le financement partiel des cotisations de tous les médecins du secteur 1 par les caisses, en fonction de leur lieu d’installation, afin de mieux les répartir sur le territoire. La participation serait faible en cas de pléthore médicale, et forte dans les déserts.

S’agissant par ailleurs des médecins à honoraires libres tentés par l’option de coordination deuxième formule (la mouture finale du secteur optionnel), la Cour des Comptes recommandait de procéder à une « analyse coût-avantages rigoureuse, de la récente réforme, qui consacre l’élargissement de la prise en charge des cotisations par l’assurance maladie, à des praticiens du secteur 2”.

Dans son élan vengeur, la Cour recommandait également de « tout réorganiser » en matière de respect du tact et mesure dans l’application des dépassements d’honoraires, puisque l’Ordre des médecins s’était avéré “inefficace » dans sa mission de contrôle de déontologie, et notamment à l’égard des dépassements d’honoraires excessifs.

Sur les quatre dernières années, a-t-il été relevé, une seule radiation sur les 61 dossiers analysés par l’instance ordinale est intervenue, tandis qu’une douzaine de simples rappels à l’ordre était notifié. Un manque de zèle certain, qui a conduit la Cnam à développer ses propres procédures, au risque de créer un « conflit de juridictions ».

Marisol Touraine a, là encore, bridé les ardeurs des magistrats en confirmant à Cannes, sont souhait de calmer le jeu. Et de voir se mettre en place, une “disposition de sanctions dissuasif et opérationnel, clair et lisible, sous l’égide de la Cnam, mais où le Conseil national de l’Ordre a un rôle à jouer”.