Après un premier livre intitulé Stéthos & Cie, le Dr Jonathan Hammel récidive avec un nouveau roman. Des îles et d’elle (éditions Coëtquen) retrace son expérience de deux mois, en tant que médecin généraliste sur les îles de Saint-Pierre et Miquelon (en Amérique du Nord).

Egora.fr : Pourquoi avoir intitulé votre livre Des îles et d’elle ?

Jonathan Hammel : Tout simplement parce que je suis parti sur les îles de Saint-Pierre et Miquelon suite à une rupture avec elle. Le jeu de mot s’est imposé !

Pourquoi avoir choisi les îles de Saint-Pierre et Miquelon ?

Cela devait être l’attrait de l’inconnu. J’avais envie de découvrir un endroit où je ne serais jamais allé ! Et puis j’ai eu l’opportunité d’y faire des remplacements. J’avais envie de me lancer un défi. Voir si j’étais capable d’être le seul médecin sur une île isolée. J’étais curieux de connaître mes limites, tant sur le plan personnel que médical.

Est-ce que l’exercice de la médecine générale à Saint-Pierre et Miquelon est différent de celui en métropole ?

Oui il faut s’adapter en permanence. Par exemple sur Miquelon, pour les prises de sang, on est limité car on doit prendre en compte les rotations des avions qui viennent de Saint-Pierre deux fois par semaine. Il faut alors piquer tout le monde en même temps et les résultats mettent un peu plus de temps à arriver, il faut donc faire plus attention à ce que l’on demande. On doit aussi bien réfléchir avant de demander l’évacuation de quelqu’un sur Saint-Pierre, appeler soit l’avion soit le bateau, en cas de brouillard. Je devais me débrouiller tout seul au maximum. En métropole, comme on a tout sous la main, il est plus facile de mettre les patients dans une ambulance en cas de problème. A Miquelon, il n’y a qu’une ambulance et un avion !

Les pathologies étaient-elles différentes ?

Il s’agissait de pathologies que l’on retrouve sur beaucoup d’îles. Il y avait beaucoup de diabète et d’hypertension. Je pense que c’était du à l’alimentation qui est proche de celle consommée en Amérique du nord. Il y avait beaucoup de difficultés d’approvisionnement, notamment en fruits et légumes.

Qu’est-ce qui vous a marqué de votre expérience à Miquelon ?

Tout d’abord le fait que sur cette île d’environ 600 habitants, il n’y ait qu’un généraliste, une infirmière et une aide soignante. Du coup nous étions de garde tout le temps, 24 heures sur 24. Sur l’île, tout le monde se connait, ils étaient nombreux à être des cousins plus ou moins éloignés,  ce qui rendait les choses un peu particulières. Je me rappelle avoir été réveillé en pleine nuit par le mari d’une femme qui avait tenté de se suicider. J’avais du trouver la maison en plein milieu du village. Sur place j’ai appelé l’aide soignante, qui était avec l’infirmière. Elles sont arrivées ensemble.  Puis j’ai essayé de joindre le réanimateur à Saint-Pierre qui dormait. Il m’a demandé de lui envoyer la patiente. Mais, du fait de la tempête et des mauvaises conditions météo, l’avion ne pouvait pas voler. J’ai alors emmené la patiente au centre médical. Finalement les gardes côtes sont arrivés deux ou trois heures plus tard. C’est ainsi que je me suis retrouvé au milieu de la nuit, avec une température glaciale, dans le brouillard, à essayer de transférer la patiente de l’ambulance au bateau. Heureusement, elle s’en est sortie.

Tout cela a été très formateur !

Et à Saint-Pierre ?

L’organisation du travail y était beaucoup plus classique. Nous étions cinq ou six généralistes dans un centre de santé. Il y avait un petit hôpital, des ambulanciers, un petit service de réanimation donc j’étais plus à l’aise. Sur Saint-Pierre il y a environ 5 000 habitants.

Un fait m’a pourtant marqué bien qu’il ne soit pas très joyeux, l’incroyable nombre de suicides. Le réanimateur m’a confié qu’il y en avait en moyenne un par semaine ce qui est énorme. L’isolement, le froid rendent la vie sur l’île assez rude. Je n’aurais pas pu rester y vivre.

Partir remplacer à Saint-Pierre et Miquelon, est-ce une expérience que vous conseilleriez à d’autres médecins ?

Oui pour Saint-Pierre. En revanche je conseillerai Miquelon à des médecins qui ont un peu d’expérience et qui s’y connaissent en médecine d’urgence. A Miquelon on est quand même très isolé, il ne faut pas avoir peur de la solitude.

C’est votre deuxième roman, avez-vous d’autres projets de livre?

J’espère. La prochaine fois je ferais peut être un peu plus de fiction. En revanche,  cela tournera surement et encore autour du monde médical.

Etre médecin et écrivain, est-ce facilement conciliable ?

Tant que je suis remplaçant, oui. Si j’étais installé, je pense que cela serait plus difficile. Après une journée de consultation, je ne sais si je pourrais me concentrer pour écrire !

http://desilesetdelle.jonathanhammel.com/
http://www.coetquen.com/

 

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Sandy Berrebi