Manque de temps, peur du médecin, défiance vis-à-vis de la médecine… Les Français sont nombreux à essayer de se soigner eux-mêmes et tester l’automédication avant, en tout dernier recours, d’aller consulter. Selon le 10ème baromètre Afipa, 68 % des 18 à 64 ans assurent avoir pratiqué l’automédication en 2011. Après avoir stagné durant plusieurs années, le marché démarre vraiment. Une conséquence de la vague de déremboursements de médicaments par l’assurance maladie.

 

17 heures, c’est l’heure de pointe dans la pharmacie des écoles de Boulogne-Billancourt en région parisienne. La file d’attente s’allonge de malades emmitouflés dans leurs manteaux, le nez rougi par le froid. La plupart d’entres eux ne possèdent pas d’ordonnance. Ils viennent demander conseil à la pharmacienne où connaissent déjà leurs médicaments miracles. C’est notamment le cas de Brigitte, dentiste de 60 ans. Pour elle, l’ordonnance est surtout utile lorsqu’elle veut se faire rembourser ses médicaments (voir la vidéo pour plus de détails).

 


 

Dans le top 3 des meilleures ventes en automédication, Oscillococcinum – un médicament homéopathique, Doliprane et Magnevie B6. Selon l’Afipa, le chiffre d’affaire de ces produits oscille pour chacun entre 5 ,5 et 9 millions d’euros.

A la sortie de l’officine, Michel, aide-soignant de 53 ans confie : "avant de consulter, j’essaie l’homéopathie. Je n’aime pas trop prendre de médicaments."

 

"Le meilleur remède, c’est la vitamine C"

Yvon, chef d’entreprise de 58 ans est quant à lui beaucoup plus catégorique. "Un rhume, avec des médicaments, ça se soigne au bout de 5 jours et sans médicaments, ça se soigne aussi au bout de 5 jours. Le meilleur remède c’est la vitamine C, en prévention." Et il n’est pas le seul à miser sur les vitamines. Ce marché a fait un bond de près de 16 % par rapport à l’année 2010. Notamment en cause dans cet essor selon l’Afipa : les innovations, les délistages de molécules, les investissements des laboratoires et le développement du libre-accès dans 16 000 officines, soit les 2/3 du patrimoine français. Tous s’accordent à dire qu’aller chez le médecin ne doit pas être systématique.

Jeannine, retraitée de 74 ans, essaie, lorsqu’elle a "des petits bobos" de se "soigner toute seule" (voir la vidéo pour plus de détails).

 


 

Nombreux sont ainsi les patients à attendre que "ça parte". C’est le cas d’Erwan, barman de 26 ans. Pour lui, le généraliste est vraiment le tout dernier recours.

"Je n’y vais que quand j’ai beaucoup de fièvre, que je ne peux même pas me lever." Dans ces cas là, médecin rime souvent avec arrêt médical. C’est aussi l’avis de Marie, 23 ans : "Je ne vais chez le médecin que si j’ai besoin d’un arrêt et que je suis vraiment faible. Sinon je n’ai pas le temps. Je suis nounou et je travaille de 8h à 19h. Faire la queue des heures dans la salle d’attente, je ne peux pas me le permettre".

Le manque de temps, c’est le principal problème rencontré par Jean-Charles, directeur financier de 49 ans. De manière générale il admet ne pas aimer aller chez le médecin (voir la vidéo pour plus de détails).

 

 

 Alors quand consulter pose trop de problèmes, les pharmaciens prennent le relais. Carole Quintaine, de la pharmacie des écoles, reconnaît avoir "pas mal de gens qui viennent sans prescriptions pour les pathologies actuelles de type rhume, gastro voire même douleurs musculaires". Et peu importe la longueur de la file d’attente, la pharmacienne prend son temps pour prodiguer ses conseils.

 

Le prix du médicament ne fait pas reculer

Dans un contexte d’activité officinale plutôt morose, l’automédication ne connaît pas la crise. Le marché d’une valeur de plus de deux milliards d’euros a progressé de près de 2 % en 2011, alors que les ventes de médicaments de prescription ont enregistré la même année une baisse de 1,3 %.

Par manque de temps, les malades ne reculent pas devant le prix des médicaments. D’autant plus que les prix sont en diminution depuis 4 ans. Le panier classique d’un patient désirant soigner un rhume est passé en 3 ans de 10,98 euros à 10,47 euros, soit une baisse de 50 centimes pour un traitement complet. Pour Carole Quintaine, "il y a encore des patients qui vont consulter pour avoir des remboursements, mais beaucoup de médecins pratiquent des dépassements d’honoraires, alors c’est plus rapide de prendre pour 10 ou 15 euros de médicaments chez nous".

Les Français sont donc de plus en plus nombreux à s’occuper eux-mêmes de leur santé. Beaucoup se servent d’internet pour s’informer. Un sondage réalisé en janvier dernier a démontré que 24 % des malades se sont soignés grâce aux informations recueillies sur la toile, sans passer par la case médecin. 

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Sandy Berrebi