La Carmf ne veut plus gérer l’ASV ! A peine publiés au journal officiel de ce samedi, les décrets ASV ont été voués aux gémonies par le conseil d’administration de la Caisse autonome de retraite des médecins de France (Carmf).

Réunis le 21 novembre dernier, en possession des projets de texte, les membres du conseil ont repoussé unanimement la reforme. Et ils ont demandé par lettre à Xavier Bertrand de décharger la Carmf de la gestion du régime.

 « Nous ne sommes plus maîtres de rien, on ne nous écoute pas, les décisions sont politiques, le financement est assuré à 50 % par les caisses maladie, c’est un régime conventionnel. Et la pérennité du régime n’est pas garantie sur le moyen terme. Nous n’en voulons plus », explique le Dr Gérard Maudrux , président du CA.

Comme pour l’allocation de remplacement (ADR) ou le défunt MICA, la Carmf demande qu’un organisme extérieur se charge de cette gestion à sa place, un fond d’action conventionnel inspiré du  Formmel (Fond de réorganisation et de modernisation de la médecine libérale).

« Il y a aura de gros problèmes techniques de recouvrement car nous n’avons pas de bases d’appel, nous demandons que les statuts de l’ASV soient détachés ailleurs ! » insiste l’ancien créateur d’SOS retraite, en lutte contre la pérennisation de l’ASV depuis de longues années. 

C’est donc la guerre. Pour en comprendre l’origine, il suffit de rappeler que le texte publié samedi est le fruit d’un très long travail. Une première version, consensuelle, avait mis d’accord les syndicats médicaux et la caisse autonome, ainsi que l’assurance maladie. C’est à partir de cet engagement de maintenir l’ASV dans des conditions acceptables par les actifs et les retraités que trois syndicats la Csmf, le SML et MG France, ont signé la convention médicale en juillet dernier.

Mais le gouvernement a repris les choses en main à l’automne, et a reconstruit tout autre chose, sans tenir compte du projet consensuel promu par la Carmf.

Que dit le texte ? 

Pour les cotisants actifs : la part forfaitaire de  la cotisation passera de 1 140 euros en 2011 à 4 850 euros en 2016, et sera ensuite revalorisée chaque année en fonction du revenu moyen des affilés constaté entre les années N – 2 et N – 1. La part proportionnelle, crée par cette réforme, passera de 0,25 % en 2012 à 2,8 % à partir de 2017.

Pour les retraités : la valeur du point des pensions liquidées jusqu’au 31 décembre 2010 passera de 15,55 euros à 14 euros à compter de 2015, celle du point des pensions liquidées à partir du 1er janvier 2011 passera de 15,55 euros à 13 euros dès le 2ème semestre 2012 et le restera au moins jusqu’en 2015.Les 300 premiers points des pensions de réversion liquidées jusqu’au 31 décembre 2010 resteront à 15,55 euros au moins jusqu’en 2015.

Un rapport quinquennal proposera à partir du 1er semestre 2015, l’évolution nécessaire du point pour « garantir l’équilibre financer du régime à long terme ».

Rétroactivité de baisse de valeur d’un an 

Décryptage par le Dr Maudrux : « Nous revenons de très loin ! Lors d’une réunion avec le ministère le 21 avril dernier, ses services voulaient faire remonter jusqu’en 2006 , date de la loi de réforme de l’ASV, le départ de la baisse de valeur des points ! Nous leur avons dit que nous irions en justice, car la Cour européenne casse toutes les lois rétroactives. Désormais, nous n’en sommes plus là. La loi prend effet au 1er janvier 2012, avec une rétroactivité de baisse de valeur d’un an ».

Il n’empêche, certains retraités ont avalé de travers en apprenant cette disposition, et des membres de la Fara (Fédération des associations régionales des allocataires de la Carmf) redoutent des recours en série…

S’agissant par ailleurs de l’équilibre financier du régime, le Dr Maudrux est clair : « Tout a été fait pour que cela coûte le moins cher aux caisses, il n’y aura plus que 9 mois de réserves, ce qui nous permettra de tenir dix ans au plus. Ensuite, mystère … ».

L’avis du Dr Claude Poulain, le président de la Fara est à peu près identique. Il vient d’écrire à Xavier Bertrand pour s’élever contre les projections du ministère, qui ne tiendraient pas compte de la réalité.

Car, en se basant sur les projections de la Carmf, il apparaît que le maintien des réserves positives ne pourra être obtenu qu’à la condition de poursuivre le gel de la valeur du point jusqu’en … 2025. Ce qui amputerait la valeur du point de 60 %.

« Vous comprendrez, dans ces conditions, que nous ne pourrons cautionner auprès des allocataires, une telle évolution de la réforme », écrit le Dr Poulain à Xavier Bertrand.

« On s’y attendait, le gouvernement a même refusé de reprendre les mesures d’exonération pour les bas revenus, que nous propositions. Nous ne voulons plus gérer ce régime ». Une décision unanime en forme de fin de non recevoir.

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Catherine Le Borgne