87% des prescriptions d’antibiotiques sont réalisées en ville, dans un pays qui fait partie des plus gros consommateurs de médicaments de l’Union européenne, et ce même si la tendance est à la baisse.

Alors pour aider les généralistes à supporter cette lourde responsabilité, différents référentiels d’aide à la prescription leur sont proposés, avec l’appui financier du gouvernement. Le but : généraliser cette pratique, pour prescrire mieux et surtout prescrire moins.

Le site AntibioClic, lancé demain, mercredi 26 octobre, s’inscrit dans cette tendance. Le Dr Jean-Pierre Aubert, médecin généraliste dans le 18earrondissement de Paris, est l’un de ses créateurs. Il y a huit ans, alors qu’il intervient à la faculté de médecine de Paris Diderot sur l’antibiothérapie, il observe chez les futurs généralistes une forte volonté d’avoir des outils pour travailler.

En 2009, une interne vient carrément le voir avec un exemple de plaquette d’aide à la prescription qu’on lui a donnée pendant son stage au service des maladies infectieuses de l’hôpital Bichat. Pourquoi ne pas faire la même chose, à l’échelle de toute la médecine générale et sur une interface Internet? Le projet d’AntibioClic était né.

Pendant deux ans, le groupe de pilotage, composé de deux infectiologues et de trois médecins généralistes, planche sur les recommandations nationales disponibles, les écrits des sociétés savantes, les documents qui font référence afin d’établir cet outil d’aide à la prescription d’antibiotiques en soins primaires.

« En principe, le site répond à plus de 90% des prescriptions en médecine générale, explique Jean-Pierre Aubert. Le médecin part de son diagnostic et en quatre clics maximum, il tombe sur un résultat qui préconise ou non une prescription d’antibiotiques ».

L’équipe a repris les conseils standard dans les cas de l’adulte et de l’enfant, mais aussi les recommandations concernant les insuffisants rénaux, les femmes enceintes et celles qui allaitent avec au total 700 fiches explicatives. « AntibioClic doit ainsi permettre au généraliste de gagner du temps et de mieux prescrire ».

Car les médecins généralistes sont en première ligne en matière de prescription d’antibiotiques.


 

Une tâche loin d’être évidente. Au cours de la consultation, le médecin généraliste répond par exemple bien souvent à une représentation qu’il se fait du patient, qu’il imagine toujours être en demande de médicaments.


 

Pour contrer cette tendance et aider les médecins à mieux prescrire, le gouvernement va d’ailleurs jusqu’à les inciter financièrement. Ainsi, l’utilisation d’un logiciel d’aide à la prescription certifié fait partie des indicateurs à respecter dans le cadre du paiement à la performance détaillé dans la convention médicale signée en juillet dernier. Il correspond à 50 points dans le barème des rémunérations sur un total de 1 300 points.

Reste à savoir comment les médecins vont  accueillir cette intrusion dans « leur liberté de prescription », qu’ils défendent si chèrement. Jean-Pierre Aubert assure que le logiciel a suscité des réactions extrêmement positives chez les internes, de même que chez les généralistes qui l’ont déjà testé.

Sur Egora.fr, lors d’un précédent article pour annoncer le lancement du site, les internautes avaient également fait part de leur enthousiasme. AnneGM avait ainsi écrit : « Merci aux collègues qui ont travaillé pour faciliter notre pratique dans ce domaine complexe, et bravo pour votre engagement! » Jepaul s’exclamait aussi : « Enfin un outil qui va nous servir dans notre pratique quotidienne, je l’attends avec impatience. »

D’autres réactions sont toutefois plus mitigées. En effet, certains généralistes craignent de trop laisser de côté leur processus intellectuel.

Une remarque que comprend tout à fait Jean-Pierre Aubert. « AntibioClic est un très bel outil mais c’est vrai qu’il diminue le niveau de réflexion du médecin en soins primaires sur les maladies infectieuses, reconnaît-il. C’est pour cela qu’il est important qu’il y ait, à côté de ces logiciels, des outils de formation et des outils qui incitent le généraliste à avoir une position critique car beaucoup de recommandations sont discutables. Il n’y a pas de vérité absolue. Le médecin doit continuer à se poser des questions, à s’intéresser à ce qu’il prescrit et à s’interroger sur les raisons pour lesquelles on lui recommande de prescrire tel ou tel médicament. » 

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : M. Debry et C. Alvarez