C’est traditionnel : les universités d’été de la Csmf (Confédération des syndicats médicaux français) se tiennent toujours à la fin septembre, lorsque les contours du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale se dessinent.

Tel fut le cas, ce dernier week-end à Cannes  où les congressistes ont pu abondamment discuter de l’Objectif nationale de dépenses d’assurance maladie (Ondam) 2012, fixé à 2,8 %, dont 2,7 % pour la ville, autant pour l’hôpital et 4,2 % pour le secteur médico-social. C’est donc sous cet éclairage, et celui d’une croissance en berne qui souligne les maux spécifiques dont souffre notre système – désertification médicale ou dépassements d’honoraires non maîtrisés, que s’est réunie à Cannes une table ronde « politique ».

« La profession a été méprisée pendant quatre ans » (J.M Le Guen, PS)

Autour d’Alain Trebucq, le directeur de GM Santé*, et devant un parterre de syndicalistes militants de l’incitation contre la coercition, plusieurs élus médecins se sont employés à délivrer leur credo. A quelques mois de la présidentielle, alors que la droite perdait le Sénat et qu’à gauche,  la candidature de François Hollande semblait se détacher du peloton des postulants à la primaire, ce sont évidemment les propos de Jean-Marie Le Guen, ex-supporter de Dominique Strauss Khan, rangé depuis au côté du député de Corrèze, qui ont été particulièrement écoutés.

Confiant parler « en son nom », le député de Paris a rappelé son opposition aux « mesures coercitives » en matière d’installation « la meilleure manière de faire fuir les médecins », et, toujours très politique, a insisté sur les mauvais traitements subis par les médecins depuis quatre, sous ce gouvernement. « Les actes sont dévalorisés, la profession a été méprisée pendant quatre ans » alors que le contexte économique n’était pas si mauvais, a-t-il lâché. Il n’y a eu ni dialogue ni respect ». Mais le secteur optionnel  « n’est pas sa politique car il pourrait aboutir à un déremboursement des actes de médecine de proximité ».

Et puisqu’il s’agit de se colleter au trou de l’assurance maladie, Jean-Marie Le Guen a choisi sa méthode : « Respecter l’Ondam, faire des économies, rééquilibrer les recettes pour remédier au sous-financement structurel de l’assurance maladie de 5 à 10 milliards d’euros ». Comment ? Par un cocktail de mesures touchant la fiscalité directe et indirecte (l’écologie notamment) et en traquant les niches. Le député veut également « repenser le parcours de soins. Les médecins doivent faire ce chemin ».

« Il faut  mettre en place le secteur optionnel » (J.P Door, UMP)

Devant ce parterre de libéraux, il était bien risqué tant en matière de démographie médicale que de liberté d’honoraires, de défendre un autre chemin que celui de l’incitation. Voie empruntée avec naturel par Jean-Pierre Door, député UMP du Loiret, et connaisseur avisé du Plfss. « Il faut aller le plus loin possible sur ce chemin, regarder ce que fait l’Allemagne, favoriser le regroupement des professionnels dans des maisons médicales, autour d’un projet.  Oui, il faut encadrer les dépassements d’honoraires et pour cela, mettre en place le secteur optionnel » a-t-il martelé. Son choix pour le déficit de la sécu : le bouclier sanitaire et une nouvelle assiette de la TVA, ainsi qu’une contribution sociale assise sur les produits de consommation de provenance extra européenne.

Quasiment sur la même ligne se classe  Jean-Luc Préel, député Nouveau Centre de Vendée. Partisan en matière de projet de loi de financement de la sécurité sociale, d’un vote d’équilibre garantissant des recettes égales aux dépenses prévues, il se prononce pour une augmentation de la CSG ou de la TVA élargie à tous les produits. En revanche, il dit non au bouclier sanitaire, « qui ne laisse plus de place aux organismes de protection  complémentaire ». Prenant l’axe du «temps médical disponible », qui pourrait croitre grâce à la délégation de tâche, le député Nouveau défend les mesures incitatives à l’installation, et un numerus  clausus régional par spécialité. Mais « le secteur optionnel n’est pas la panacée, je comprends la position de l’Unocam », a-t-il lâché en référence à l’organisme qui regroupe mutuelles, assurances privées et organismes de prévoyance, qui n’a pas poursuivi les négociations en cours avec l’assurance maladie et les syndicats médicaux, sur le sujet.

« Une réforme pour retrouver l’esprit de solidarité » (J.L Véret, Europe écologie Les verts)

Le représentant d’Europe écologie Les verts (Eelv), Jean-Luc Véret,  est venu briser ce discours tout en arrondis. Reconnaissant qu’en matière d’installation, « la coercition n’est pas la méthode la plus efficace » pour répondre à l’objectif de « soigner une population » – mais sans dire à quelle alternative il pensait –   le Dr Véret a appelé de ses vœux un regroupement du sanitaire et du social et  « une réforme pour retrouver l’esprit de solidarité ». Son parti veut « supprimer la Cades » – la caisse qui gère la dette sociale –  et mener une « réflexion systémique sur la Sécu, confrontée à une explosion des maladies chroniques ». Farouchement partisan d’un plafonnement des dépassements d’honoraires « qui incitent au renoncement aux soins », le président de la Commission santé d’Eelv  affiche l’ambition de « rendre la vie plus agréable ». La campagne est bel et bien commencée.

*(dont le site egora fait partie. Ndlr)

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Catherine Le Borgne