« Nous n’avons pas du tout l’intention d’attaquer les médecins. Et nous avons même spécifiquement précisé, au moment de la constitution du Fonds d’indemnisation, que nous prendrions également en compte les dossiers des patients qui ont consommé le médicament prescrit hors AMM » a tenu immédiatement à corriger Lucy Vincent, la porte-parole de la firme, réagissant pour egora.fr à l’article de Libération de ce jour, titré : « Servier s’attaque aux médecins ». Selon le quotidien du matin « pour se couvrir, le laboratoire Servier a décidé de s’attaquer lors des procédures civiles, aux praticiens qui ont prescrit du Mediator en dehors de son indication officielle ».Une affaire qui commence à faire grand bruit dans la communauté médicale. En effet, selon une étude publiée le 8 août dernier sur le site de l’Afssaps (Agence française de sécurité sanitaire et des produits de santé), 77 % des prescriptions de Mediator l’auraient été auprès de patients en surpoids alors que son indication le réserve aux patients souffrant de diabète.
« Les laboratoires Servier confirment qu’ils n’ont jamais appelé en justice un médecin dans une procédure concernant le Mediator, ni dans d’autres procédures concernant d’autres produits » précise également un communiqué. « Les médecins impliqués dans les procédures concernant le Mediator l’ont été à l’initiative des patients et/ou de leurs conseils, ou d’autres parties appelées à la cause, comme l’Oniam », est-il détaillé. « Dans le cas cité dans le journal Libération du 25 aout 2011, le médecin a été impliqué dans la procédure à la demande de la patiente, assistée de son conseil ».
De fait, certaines associations de défense de victime entendent mettre en cause la responsabilité de médecins qui ont prescrit le médicament hors AMM et dont la responsabilité serait alors également engagée.
Pour étayer ses accusations, le journal s’est appuyé sur le cas du Dr. F, une endocrinologue qui a prescrit du Mediator à Mme V, dont la valvulopathie a été jugée liée à la consommation de Mediator par les experts désigné par la Commission régionale de conciliation et d’indemnisation (Crci) du Rhône* .Reproduisant quelques éléments du mémoire produit par Maître Nathalie Carrere, conseil des Laboratoires Servier, le journal affirme que ces derniers ont décliné toute responsabilité dans la survenue de la pathologie de la patiente, se défaussant sur le médecin prescripteur « qui a commis une faute en lien causal avec le dommage », en vue d’un « résultat thérapeutique qui n’était pas prévu dans les indications réglementaires ». La dernière phrase du document permet de lire que le conseil des laboratoires Servier, demande à la commission de « conclure à la responsabilité du Dr… dans la production du dommage ».
Un document « très largement tronqué, étant constitué de huit lignes extraites d’un mémoire de douze pages », rétorque la firme. « Il s’agit d’un article partial et partiel », précise Lucy Vincent. « Les conclusions du mémoire réclament la réouverture des opérations d’expertise car tous les éléments du dossier n’avaient pas été communiqués. Les conclusions concernant la responsabilité du médecin paraissent au 4ème sous chapitre sous le titre « Plus subsidiairement, sur la responsabilité du Docteur F. »
Les laboratoires Servier rappellent que le Mediator « n’a jamais eu d’indication comme anorexigène, et n’a jamais été promu en tant que tel auprès des médecins. »
Dans Libération, Maître Carole Younes, avocat de MG France, explique que « prescrire hors AMM n’est pas une faute en soi », dès lors que cette indication peut être justifiée scientifiquement. Mais l’avocate reconnaît néanmoins qu’il y a « une inquiétude » parmi les prescripteurs.
*Les Crci sont les antennes régionales de l’Oniam (Office national d’indemnisation des accidents médicaux), chargé dès le 1er septembre prochain, de gérer le fonds public d’indemnisation des victimes.
Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Catherine Le Borgne