L’Inspection Générale des Affaires Sociales (Igas) rend public mardi  son rapport d’enquête sur les nombreux accidents – fugues, agressions, parfois meurtres ou viols – intervenant dans les hôpitaux psychiatriques, et pointe de nombreux dysfonctionnements. Un document dévoilé le jour même où l’Assemblée doit adopter un projet de loi très vivement critiqué par les syndicats de psychiatres, qui renforce les pouvoirs des directeurs d’hôpitaux en matière d’hospitalisation sous contrainte et instaure notamment la possibilité de soins à domicile sans consentement.

A l’issue d’une enquête à Paris, Lille, Amiens, Nice et Poitiers, l’Igas a ainsi recensé 19 meurtres ces cinq dernières années au sein des structures psychiatriques, tous commis par des malades de sexe masculin, hospitalisés de force et ayant des antécédents de violence. Les victimes sont des femmes, proches de malades, autres malades ou personnels soignants. Le rapport recense aussi 1 870 agressions du personnel en 2009. « Les viols et les agressions sexuelles à l’intérieur des établissements ne sont pas des phénomènes exceptionnels », assure l’Igas, et « la maltraitance physique, dans des unités isolées, reste souvent cachée pendant plusieurs années ».

Est aussi mise en cause la surveillance des établissements dont il est, selon les inspecteurs, trop facile de sortir. Le chiffre de 10 000 fugues annuelles représente 12% du total des patients internés. Des évasions apparemment aisées : « Les modes opératoires ne demandent le plus souvent aucun effort particulier », relève l’Igas. Tout aussi grave, « la fugue d’un patient potentiellement dangereux n’est pas toujours signalée à temps aux forces de sécurité ».

Organisation et politique de prise en charge  

Selon les inspecteurs, plusieurs facteurs accroissant la dangerosité des malades sont directement imputables à la politique de prise en charge des établissements. « Le confinement, la promiscuité et le désœuvrement des malades créent les conditions favorables au passage à l’acte », affirment-ils. La conduite des hôpitaux vis-à-vis des addictions de leurs patients est aussi « marquée par l’incohérence » : tandis que l’alcool est partout prohibé, le tabac est très largement consommé et les hôpitaux psychiatriques « assistent impuissants aux trafics quotidiens de cannabis, alors que le cannabis est un facteur de psychose ».

Par ailleurs, de très nombreux problèmes d’organisation matérielle sont soulevés : la conception des unités « pose souvent problème », « les accès sont généralement mal aménagés et peu surveillés »,la réunion dans un même établissement de malades atteints de pathologies de gravités différentes est problématique (le rapport cite le cas d’un autiste de onze ans qui a dû être placé dans une cage grillagée en Guyane en 2007 pour le protéger), « le temps de présence des personnels est presque partout réduit » malgré une croissance régulière des effectifs rapportés aux lits…

Voir l’ensemble du rapport sur le site de la documentation française

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Catherine Holué