Lorsque Ségolène Royal a pris l’initiative, en juillet 2010, de lancer un pass contraception pour les lycéennes dans sa région du Poitou-Charentes, Luc Chatel, le ministre de l’Education nationale, l’avait vertement critiquée. Aujourd’hui, le ministre était aux côtés de Jean-Paul Huchon, président PS du conseil régional d’Ile-de-France pour lancer dans un lycée parisien l’expérimentation du pass santé contraception, un système accessible aux élèves des lycées publics ou privés sous contrat (à partir de la seconde) et de centres de formation des apprentis. En pratique, une infirmières scolaire remettra à tout élève qui en fera la demande, un carnet de cinq coupons donnant accès gratuitement et anonymement (sur une période de six mois) à deux visites chez le médecin de son choix, chez une sage-femme ou au planning familial, une prise de sang, la délivrance de contraceptif et leur renouvellement. Le conseil régional espère qu’une fois l’habitude prise, la jeune fille se rendra régulièrement chez un médecin pour sa contraception.
La région Ile-de-France considère qu’elle est dans son rôle en finançant intégralement le dispositif – y compris le remboursement de l’acte médical auprès d’un généraliste, d’un gynécologue ou d’une sage-femme. L’expérimentation a en effet pour but de faire baisser le nombre d’IVG pratiqués sur des mineures, dont le nombre dépasse 13 500/an en France. « Nous gérons plus de 650 000 élèves dans les lycées d’Ile-de-France », explique le président du conseil régional dans Le Parisien. Des lycéens qui découvrent généralement la sexualité en classe de seconde. « Certains élèves n’osent pas en parler à leurs parents. Et comme ils n’ont pas de carte Vitale avant leurs 18 ans, ils sont obligés d’en parler à leurs parents ou d’avorter. C’est un dilemme », explique Jean-Paul Huchon en proposant « d’abaisser l’âge d’accès à la carte Vitale à 16 ans ». Le coût du pass contraception serait de l’ordre de 7 à 9 millions d’euros par an, soit à peu près la somme consacrée à la gratuité des livres scolaires, explique-t-il également. La mesure initiée par Ségolène Royal continue à être appliquée en Poitou-Charentes. Installé depuis plus de 10 ans à Strasbourg par le Pr. Israël Nisand et basé sur un principe similaire, le réseau de prévention « Info ado » aurait permis de diminuer par deux le nombre d’IVG de mineures dans la ville.
Critiqué par la Peep (Fédération des parents d’élèves des établissements publics) pour « exclure les parents » et les « discréditer en tant qu’éducateurs », le pass d’Ile de France a été vivement rejeté par Alliance pour les Droits de la Vie, une association notamment connue pour ses positons résolument anti-IVG. Cette dernière a immédiatement contesté le « harcèlement contraceptif » de l’Education nationale et le « revirement irresponsable du ministre de l’Education nationale » qui ne rend service « ni aux jeunes, ni à leurs parents ». Selon l’Alliance, l’accès facilité à la contraception conduirait au contraire à une augmentation des IVG. « Les Pass contraception, et les autres méthodes supposées sécuriser la sexualité précoce, produisent à terme une sorte d’injonction aux lycéens et lycéennes de faire d’une sexualité précoce un rite initiatique. Or, celui-ci est trop souvent corrélé à des formes de souffrances sociales, affectives et personnelles qu’il faudrait avoir le courage de reconnaître » souligne l’association.
Députée (UMP) des Ardennes, vice-présidente de la Délégation aux Droits des femmes de l’Assemblée nationale et auteure du rapport d’information sur le suivi de la loi relative à l’IVG et à la contraception, Bérangère Poletti s’est au contraire réjouie du lancement « par le ministère de l’Education nationale, du pass santé contraception pour les lycéens d’Ile de France ». Souhaitant comme Luc Chatel, promouvoir également une meilleure éducation à la sexualité dans tous les établissements de France, la députée a estimé que cette expérimentation est « une initiative pertinente » qui mériterait de s’appliquer « à tout le territoire français pour obtenir des réponses nationales aux problèmes de contraception et d’IVG qui sont aussi des problèmes de santé publique ».
« Je salue l’avancée que représente le « Pass santé contraception » présenté aujourd’hui par la région Ile-de-France. Et je me félicite que Luc Châtel ait renchéri en proposant le prolongement de la prescription par les infirmières scolaires », a réagi Jean-Marie le Guen, député (PS) de Paris. Le conseiller santé du maire de la capitale estime qu’il faut « aller encore plus loin » pour faire vraiment reculer le nombre d’IVG chez les moins de 18 ans. Et envisager, « comme le propose le Pr. Nisand, la gratuité de la pilule contraceptive pour les mineures. « Bien évidemment, il faudrait parallèlement, renforcer et améliorer l’éducation sexuelle et affective en milieu scolaire », fait-il valoir.

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Catherine Le Borgne