Dans un contexte de recrudescence inquiétante des agressions de praticiens, Xavier Bertrand s’était engagé, lors des assises du Centre national des professions de santé le 17 mars dernier, à officialiser très rapidement le protocole national négocié entre les ministères de la Santé, de l’Intérieur et de la Justice, visant à mieux garantir la sécurité des professionnels de santé. Les hospitaliers bénéficiaient d’un dispositif similaire depuis 2005. Voilà qui est chose faite : les trois ministres viennent de parapher un texte « pour la sécurité des professionnels de santé » et « garantir un service de santé sur l’ensemble du territoire », place Beauvau, siège du ministère de l’Intérieur à Paris. Voilà plusieurs mois que l’Ordre des médecins, qui abrite l’Observatoire pour la sécurité des médecins, travaillait sur ce projet avec six autres ordres nationaux.
Pour l’année 2010, le bilan de l’Observatoire national pour la sécurité des médecins avait fait apparaître une montée très inquiétante des agressions, verbales ou physiques concernant les médecins avec un accroissement de 80 % du nombre de signalements. Ainsi, 920 incidents ont été signalés à l’Observatoire en 2009, dont 63 % verbaux ou menaçants, et 25 % de vols et tentatives. Les médecins généralistes sont particulièrement visés : ils représentent 62 % des plaintes, tout comme les femmes qui représentent 43 % des victimes, un taux bien supérieur à leur représentation démographique. L’Ordre des médecins, les syndicats et particulièrement la Confédération des syndicats médicaux français, se sont emparés du dossier, lequel a été un peu retardé par le dernier remaniement. Mais voilà qui est enfin fait.
« Il est profondément immoral de s’attaquer aux professionnels de santé », a jugé Claude Guéant, le ministre de l’Intérieur. Ce protocole représente pour lui, le moyen de « garantir un service de santé dense, de qualité, sur l’ensemble du territoire ».
En pratique, plusieurs mesures protocole visent à améliorer le traitement de ces violences. Il en va ainsi de la sensibilisation à la conduite à tenir en cas de problèmes ou le renforcement de la circulation de l’information entre les différents acteurs. Dans chaque département, des interlocuteurs dédiés, « référents spécialisés » pour les professionnels de santé seront notamment désignés au sein des commissariats de police et des brigades de gendarmerie. Des procédures d’alerte seront mises en place, comme un numéro d’appel dédié vers police-secours ou la géolocalisation des médecins en intervention. Claude Guéant a informé que des boitiers étaient en cours d’expérimentation, permettant de déclencher l’intervention des secours par le simple appui sur une touche. Pour le ministère de l’Intérieur, « la première des dissuasions reste la certitude de la sanction, et plusieurs mesures tendent aussi à mieux sanctionner les violences visant les professionnels de santé ».
Faisant état de "161 condamnations fermes prononcées (en ce domaine) en 2009, contre 98 en 2005", le ministre de la Justice Michel Mercie a estimé que la « réponse pénale à de tels actes doit être ferme ».
Le dispositif a été imaginé pour coller aux réalités du terrain. Ce seront donc les instances territoriales des ordres qui seront les véritables acteurs de la politique de sécurité, en concertation étroite avec les préfets, les forces de sécurité et les procureurs de la République.
Le ministre de la Justice a souligné que conformément aux dispositions du Code de procédure pénale, les procureurs "pourront autoriser la domiciliation (des plaignants) à leur adresse professionnelle ou au service de police ou de gendarmerie" ayant enregistré leur plainte. Le garde des Sceaux a également informé que les procureurs aviseront les intéressés des suites procédurales données à leur plainte.
Xavier Bertrand s’est, de son côté, félicité que ce protocole s’adresse à tous les professionnels de santé, et non plus aux seuls établissements publics et privés, jusqu’ici concernés par le précédent texte datant de 2005.