Les libéraux du Centre national des professions de santé (Cnps), qui se sont réunis ce matin en convention sous le slogan « un an pour tout changer », se souviendront sans doute de la prestation de Xavier Bertrand, le ministre de la santé. Invité à prononcer un discours d’ouverture, ce dernier a préféré stopper sa montre, « repousser les propos conventionnels et la langue de bois » et se prêter à un jeu de questions-réponses avec la salle sur le thème d’une « confiance retrouvée », qui sonnerait le glas de l’ère de la « défiance ». « On peut faire beaucoup en un an », a-t-il promis. Il a tenu près de deux heures face à la salle.

Le ministre a d’ailleurs fixé immédiatement un rendez-vous à Michel Chassang, le président du Cnps (et de la Confédération des syndicats médicaux français) : octobre prochain période où, peut-on penser, le texte de la convention aura été négocié ce qui permettra de mesurer le chemin parcouru. Car le ministre « croit » à la négociation conventionnelle « qui reste alors que les ministres passent ». Il y croit et assume même un certain « interventionnisme » pour faire évoluer le système. Propos qui ne pouvaient que séduire  Frédéric Van Roekeghem, le directeur de la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam), venant tout juste d’évoquer une « nécessaire impulsion politique très claire, en  direction d’un renouveau de la vie conventionnelle ».

Interpellé par la salle, sur le respect « de la parole donnée », Xavier Bertrand a pris quelques engagements. Oui, il est prêt à inscrire dans le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, « si nécessaire »,  un amendement permettant de donner une « base juridique nouvelle à l’ASV », fruit du contrat conventionnel offrant à son origine, une prise en charge partielle des cotisations retraite et maladie par les caisses en contrepartie du respect des tarifs conventionnels. Oui, la taxe sur la télétransmission, qui touchera l’an prochain les praticiens télétransmettant moins de 75 % de leurs feuilles de soins, ne sera pas appliquée « n’importe comment. Je pense même qu’il faudra revoir le système »… Oui enfin, le ministre de la Santé serait prêt à défendre un amendement précisant que « le Sros ambulatoire n’est pas opposable et ne l’a jamais été ». Voilà pour calmer les inquiétudes des médecins, qui ne croient plus que ce qu’ils voient.

D’autres aménagements à des textes existants et très critiqués ont également été annoncés. Il en va ainsi de la finalisation des décrets manquants sur le DPC (développement professionnel continu), où les représentants des libéraux devraient pouvoir siéger à parité avec les représentants de l’Etat et de l’assurance maladie, dans le cœur du dispositif. En attendant que celui-ci soit opérationnel, la période transitoire est prolongée d’un an et les appels d’offre 2012 seront lancés selon les modalités de l’ancien système, à la grande satisfaction du Syndicat des médecins libéraux(SML). Autre engagement : l’accroissement à 13 du nombre des représentants de libéraux de santé à la conférence nationale de santé (CNP). Celle-ci sera mise en place d’ici le mois de juin.

En outre, les questions de sécurité des professionnels de santé ont fait l’objet de discussions avec Claude Guéant, le nouveau ministre de l’Intérieur. En vue : un protocole Santé-Intérieur-Justice, étendant notamment aux professionnels libéraux, les dispositions de prévention et sécurité mises en place pour les hôpitaux publics. A savoir : des procédures d’alerte au niveau local, un mécanisme de dépôt de plaintes facilité, la possibilité d’un accès prioritaire dans les commissariats, un système de vidéo-protection (en lien avec les collectivités), etc. Et pour conclure, la mise en place « dès cette année », des préconisations du rapport Johanet et de ses annexes sur l’assurance en responsabilité civile professionnelle (RCP) a été promise. Un sujet « qui concerne tout le monde et qui doit avoir une approche globale et des solutions durables », a développé le ministre en imaginant une traduction concrète de ce rapport dans le cadre de la future proposition de loi de Guy Lefrand (UMP).

Sur le strict plan conventionnel, Xavier Bertrand a donné quelques pistes s’agissant du lien entre rémunération et lutte contre la désertification médicale. « L’avenant 20 (bonus de 20 % sur les honoraires des praticiens exerçant en groupe dans les zones concernées. Ndlr) a mieux marché que ce que l’on en a dit. Les Agences régionales d’hospitalisation n’ont pas joué le jeu notamment en matière de zonage ».  Un dialogue est en cours entre les ARS et l’assurance maladie pour qu’un un zonage « réellement efficace » se mette en place. « On peut réussir dans le cadre d’une démarche pragmatique », a-t-il fait valoir. Autre sujet, la rémunération. « 2,8 % d’évolution de l’Ondam, c’est deux fois la croissance ! » Dans le respect de ce taux, les partenaires « doivent travailler sur  une diversification de la rémunération prenant notamment en compte les grandes questions de santé publique, comme la maladie d’Alzheimer par exemple, « un thème qui sera au cœur de la discussion ». Le ministre souhaite que le Capi soit intégré à la convention « pour prendre en compte la prévention ». Il a contesté à cette occasion, avoir l’intention de bloquer la discussion sur la mise en place de la Ccam (nomenclature) clinique. S’agissant de la négociation conventionnelle, le ministre de la Santé ne cache pas son impatience : « L’heure est venue pour que les discussions s’ouvrent », a-t-il lancé en direction de Frédéric Van Roekeghem, tout sourire.

Pour les résultats concrets de la proposition de loi Fourcade qui doit gommer les angles trop saillants de la loi Hpst, et sera prochainement examinée par l’Assemblée après avoir été adoptée par le Sénat, Xavier Bertrand a donné rendez-vous à la profession au 30 juin prochain.


Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : G. D. L.