Deux médecins nommés conseillers techniques au cabinet de Xavier Bertrand, à son arrivée au ministère de la Santé en 2005, avaient-ils des liens avec les laboratoires Servier ? C’est ce qu’affirme le Canard enchaîné qui, dans son édition du jour, cite nommément Gérard Bréart, praticien hospitalier et spécialiste de santé publique, « chargé de la recherche au cabinet » et Françoise Forette, professeur de gériatrie et directrice de la Fondation nationale de la gérontologie, en charge des personnes âgées. Interrogé par le Canard, Xavier Bertrand a fait répondre qu’il « n’avait pas connaissance » des liens de ces collaborateurs avec le laboratoire, et a fait diffuser  hier soir un communiqué aux medias, où, certaines « précisions et rectifications » sont apportées à l’article du journal satirique.  

Dans son article du jour, Le Canard enchaîné a prétendu qu’outre des relations fréquentes et rémunérées avec le laboratoire Servier, liées à leurs activités professionnelles hors du cabinet : conférences, coordination d’études, remise de prix notamment, ces deux personnalités  médicales participent à la Fondation de coopération scientifique, aux côtés du laboratoire Servier et d’autres laboratoires, dans le cadre du plan Alzheimer.

Le ministre précise que «  les trois conseillères qui ont successivement suivi les dossiers du médicament, Mesdames Fabienne Bartoli (du début de la mandature jusqu’en décembre 2005), Françoise Weber (de décembre 2005 à avril 2006) et Marine Jeantet (de mai 2006 à la fin de la mandature) ont été recontactées. Elles ont indiqué ne pas avoir eu de tels liens. A noter que Madame Weber avait travaillé par le passé jusqu’en 2000 pour une autre entreprise pharmaceutique, ce dont le ministre était informé. Concernant Monsieur Gérard Bréart et Madame Françoise Forette, tous deux praticiens hospitalo-universitaires reconnus, ils étaient respectivement en charge de la recherche d’une part, et des personnes âgées, d’autre part. Ils n’avaient pas la responsabilité de la politique du médicament au sein du cabinet du Ministre. »

Par ailleurs, Xavier Bertrand s’est exprimé hier à l’Assemblée nationale, où il a été interpellé par Gérard Bapt, le député (SRC) de Haute-Garonne qui devrait présider la mission d’information parlementaire sur le Mediator, installée aujourd’hui. Exigeant toute la transparence sur l’affaire, tant en matière de dysfonctionnement du circuit de décision, que des conflits d’intérêts  qui ont pu y être mêlés (y compris dans le champ du ministère, avait-il insisté dans Les Echos mardi), le député a par ailleurs questionné Xavier Bertrand sur ses intentions en matière d’indemnisation des victimes.

« Cette question d’indemnisation, je veux l’aborder avec les associations que je réunirai dans les cadre du Comité de suivi des patients », a répondu le ministre. Elle sera également évoquée avec les parlementaires, dans le cadre des conclusions de la mission d’information  car l’indemnisation doit être  « juste » et « rapide, en n’oubliant pas qu’il y a à la fois l’exigence d’indemnisation mais qu’il y a aussi l’exigence morale due à la reconnaissance de la responsabilité clairement établie ». Xavier Bertrand a également informé l’Assemblée nationale de son souhait que les membres des cabinets ministériels aient, eux aussi, à faire une déclaration d’intérêt, qu’ils suivent ou non la politique du médicament. Cette proposition sera transmise à Jean-Marc Sauvé, vice-président du Conseil d’Etat, chargé d’une mission pour la prévention des conflits d’intérêt dans la vie publique, a précisé par la suite son cabinet.

Le dernier événement en date est à lire dans Libération. Dans une longue tribune publiée en  rubrique « Rebonds », Jean Marimbert, le directeur  de l’Afssaps (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé) y annonce son intention de quitter son poste « dans un contexte de crise sans précédent, celle du Mediator, médicament dont j’ai suspendu l’autorisation de mise sur le marché en novembre 2009 ». Le directeur qui dit sa « fierté d’avoir dirigé cet organisme », avoue son « interrogation lancinante  sur ce qui aurait pu et dû être fait pour que l’usage et le mésusage de ce médicament cessent plus tôt » (…). Il préconise une « rénovation du dispositif » reposant sur la réforme des processus d’évaluation et de décisions qui doivent être élargis, l’introduction de plus de transparence, une lutte sans merci contre les conflits d’intérêts et le renouvellement des méthodes de la pharmacovigilance.

Enfin, Xavier Bertrand a également souligné dans son communiqué, que « la proposition de dérembourser le Mediator ne lui a pas été soumise par la commission de la transparence de la Haute Autorité de Santé, instance compétente sur le sujet », comme le relate le Canard dans son édition du jour pour expliquer que le ministre aurait repoussé cette proposition.

Le ministre, pour finir, s’est engagé à rendre public dès le 15 janvier, le rapport de l’Igas qui doit lui être remis le même jour.