La crise inciterait à fumer. Telle est l’une des hypothèses soulevée par la ministre de la Santé, appelée à commenter les derniers chiffres du baromètre santé 2010 de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes), consacré à l’évolution et à la prévalence du tabagisme depuis 2005.
Ces chiffres mettent en avant la « première hausse véritablement significative du tabagisme depuis la loi Evin ». La baisse du tabagisme observée dans la population masculine depuis les années 70 semble enrayée, note l’Inpes, qui s’alarme de la reprise du tabagisme féminin, en particulier parmi les femmes nées entre 1945 et 1965.
Chez les personnes âgées de 15 à 75 ans, les fumeurs quotidiens ont augmenté de deux points entre 2005 et 2010, passant de 26,9 % à  28,7 %. Cette augmentation se révèle assez forte parmi les femmes (de 23 à 25,7 %), alors qu’elle ne semble pas significative parmi les hommes (de 31 à 31,8 %). Le tabagisme occasionnel reste stable pour les deux sexes.
Des mouvements apparaissent : la prévalence du tabagisme quotidien baisse de 5 points chez les hommes de 20 à 25 ans, elle augmente d’autant chez ceux âgés de 26 à 34 ans. Mais la hausse est de 7 points parmi les femmes âgées de 45 à 64 ans (passant de 15,6 % à 22,5 %), et relativement modeste sur d’autres tranches d’âges.
Trois explications peuvent être avancées s’agissant de l’augmentation sensible notée parmi les femmes : elles sont entrées dans le tabagisme 20 ans après les hommes ; cette période de la vie (45 à 64 ans) semble plus propice à une reprise du tabagisme ; la hausse des prix du tabac a été moindre depuis 2005.
« Pratiquement 50 % des chômeurs sont fumeurs et à l’évidence, l’augmentation du chômage a eu un effet sur l’augmentation du tabagisme », a noté Roselyne Bachelot dont les services vont se rapprocher de Pôle emploi pour mener une action spécifique. La ministre a demandé à ce que la législation soit « mieux respectée », notamment en ce qui concerne l’interdiction de fumer, notamment sur les terrasses des cafés et restaurants, et concernant la vente de tabac aux mineurs.
Par ailleurs, le représentant en France du fabricant de cigarettes américain British Tobacco a fait savoir à l’AFP qu’il contestait ces chiffres, affirmant que la proportion de fumeurs était la même qu’en 2005, la proportion d’achats faits à l’étranger faisant la différence. Il y aurait, selon ses sources, entre 18 et 22 % d’achats transfrontaliers ou de contrebande, une proportion en baisse, tandis que le nombre de consommateurs restait stable.