Situation inédite au fonds de financement de la CMU, dont les ressources provenant des organismes de protection complémentaire (mutuelles, assurance privées et instituts de prévoyance) risquent d’être mises à mal par la crise économique.
Le chiffre d’affaires des organismes de protection complémentaire santé (OC) n’a augmenté que de 2,61 % entre le 2ème trimestre 2010 et le 2ème trimestre 2009, et de 3,42 % en comparaison avec le semestre 2010/2009. Des taux qu’il faut mettre en rapport avec les + 10,6 % en moyenne de 2004, ou les + 5,2 % et + 6,5 % de 2007 à 2009. Cette décélération inquiète le Fonds de financement de la couverture maladie, qui fournit ces chiffres.
Depuis le 1er janvier 2009, explique Jean-François Chadelat, le directeur du fonds CMU, le fonds est exclusivement financé par la contribution des organismes complémentaires d’assurance maladie (Ocam), prélevée sur leur chiffre d’affaires santé hors taxe. D’un taux fixé à 5,9 %, la contribution a rapporté près de 1,8 milliards d’euros de ressources au fonds en 2009. « Avec une croissance réduite à + 3,4 % au premier semestre 2010, nous sommes manifestement en présence d’un cas de figure que nous n’avions jamais connu », expose Jean-François Chadelat.
La plus faible progression semestrielle (+ 0,7 %), correspond aux institutions de prévoyance, les entreprises moyennes et grandes couvertes par des contrats collectifs ayant été plus durement touchées par les effets de la crise économique.
Jean-François Chadelat est d’autant plus inquiet que l’annonce d’une prochaine taxe sur les conventions d’assurance (TCA), au taux de 3,5 % sur les contrats complémentaires santé, dans le cadre de la prochaine loi de Finances « n’est pas une bonne nouvelle pour le Fonds ». L’assiette étant le chiffre d’affaire hors taxe, « c’est une perte d’assiette de 1,1 milliards d’euros et donc une perte de ressources pour le Fonds de plus de 60 millions d’euros », fait-il valoir.
Et le directeur de se lancer dans un réquisitoire contre cette disposition, avançant que les contrats responsables (promus par la quasi-totalité des Ocam) ont contribué à la maîtrise des dépenses de santé en favorisant le respect du parcours de soins et le choix du médecin traitant. « La logique aurait voulu que l’on renforce les critères pour être « responsables », en particulier en faisant rentrer dans la rubrique « irresponsables » les contrats haut de gamme qui solvabilisent les dépassements d’honoraires à des niveaux que l’on ne peut que considérer comme choquants », explique-t-il. Or, ajoute-t-il « tant que ces contrats ne seront pas clairement pénalisés, il est vain d’espérer stopper le dérapage des dépassements d’honoraires ni même d’instaurer un secteur optionnel ».
Et de conclure en affirmant que le Fonds CMU et la Caisse nationale d’assurance maladie seront perdants avec la taxation des contrats responsables, ce qui pourrait mettre à mal l’accès aux soins et la maîtrise des dépenses de santé.