Le Canard enchaîné de ce mercredi s´en est allé caqueter du côté de l´assurance maladie. Et fouiner plus précisément dans les zones déficitaires – campagnes, quartiers difficiles – celles où depuis 2007, les médecins peuvent prétendre à un bonus forfaitaire de 20 % du montant de leurs honoraires s´ils s´installent en groupe ou continuent à y exercer, malgré la démédicalisation ambiante. La création de l´option conventionnelle destinée à favoriser l´installation et le maintien des médecins généralistes en zones déficitaires est inscrite dans l´avenant n°20 de la convention médicale, publié au JO le 28 mars 2007. Belle pêche pour le canard, car il a dégoté le cas de ce médecin exerçant en banlieue parisienne, qui a touché cette année un bonus de 63 998 euros. Ce qui représente un chiffre d´affaires de 319 990 euros, soit 49 consultations quotidiennes en moyenne, 298 jours dans l´année. Un « stakhanoviste de la prise de tension », siffle le volatile.

Au total, 718 généralistes ont bénéficié de ce système de bonus en France métropolitaine ou dans les départements d´Outre mer, pour un total de 13,6 millions d´euros. Une douzaine de praticiens ont bénéficié d´un bonus de 60 000 euros environ, soit 300 00 euros de chiffre d´affaires, soit encore « 14 000 consultations environ », ce qui représente « trois consultations par heure, quinze heures par jour et six jours sur sept, pendant un an ». « Impossible de tenir un tel rythme, estime le Canard, sauf peut être en faisant chauffer la Carte Vitale du patient : une vraie consultation pour lui et deux ou trois fictives pour sa petite famille »… Supputation a priori non recevable pour Pierre Albertini, le directeur de la Cpam de Seine-Saint-Denis, qui met en avant la densité de la clientèle, présente dans le cabinet du médecin tôt le matin et tard le soir, l´hyperactivité de ce dernier et les contrôles dont son activité fait l´objet. Le directeur général de la caisse nationale d´assurance maladie (Cnam), Frédéric Van Roekeghem, quoiqu´un peu gêné devant l´énormité de ces chiffres, relate le journal satirique, aurait néanmoins estimé qu´il n´y avait « pas de preuve d´une activité fictive(…) Ces médecins ne peuvent pas mettre dehors les patients qui s´agglutinent devant leur cabinet », aurait-il fait valoir.

Néanmoins, un dénommé Pierre, généraliste dans les Yvelines et bénéficiaire lui aussi de ce système de bonus, aurait lâché en découvrant ces montants qu´il s´agissait d´une « prime aux tricheurs ! Comment peut-on justifier d´une telle activité quand on n´a que deux mains et un cerveau ? ». Et de préconiser- lui qui perçoit 16 000 euros de prime pour 80 000 euros de chiffre d´affaires – un plafonnement à 20 000 euros de l´aide à l´exercice en zone difficile.

Une idée « à creuser », aurait répondu Frédéric Van Roekeghem.