A Londres, une trentaine de médecins français accueillent depuis trois ans les francophones de la capitale anglaise au sein de La Maison Médicale (en français dans le texte). Ces praticiens ont fait le choix de travailler outre-manche, sans renoncer à leur activité en France pour autant.

 

Un pied à Londres, un pied à Calais, le docteur Jean-Michel Barbaste passe son temps à cheval sur le Channel. Une semaine par mois, cet angiologue quitte son cabinet calaisien pour La Maison Médicale de Kensington, un centre médical au cœur du quartier français de Londres qu’il a contribué à créer il y a quatre ans.

“Je suis arrivé en Angleterre il y a une vingtaine d’années, raconte le médecin.Habitant Calais, j’y allais beaucoup pour le tourisme. Et je me suis dit ce que serait un peu un défi de devoir aller faire des consultations en anglais.” Au cours d’un congrès, un collègue rencontre un médecin généraliste anglais intéressé pour aider à l’installation d’angiologues à Londres. “Notre spécialité n’existe pratiquement pas ici. Elle n’est pratiquée que par des chirurgiens, qui ne proposent donc que des traitements chirurgicaux. Il y a vraiment un manque.”

 

Maisons médicales peu répandues

Après une quinzaine d’années d’exercice, et riche d’une bonne connaissance du système de santé britannique, il décide avec trois confrères de se lancer dans un nouveau projet. “On voulait pouvoir offrir davantage de spécialités médicales et paramédicales réunies”, explique le médecin. Outre-manche, les maisons médicales sont peu répandues, même si on trouve quelques centres privés dans les grandes villes. Souvent, les médecins généralistes inscrits auprès du National Health Service (NHS, système de santé britannique) louent un local dans leur cabinet à des spécialistes privés, explique le Dr Barbaste.

Avant l’inauguration de la Maison Médicale, en octobre 2011, les quatre médecins n’ont pas eu la tâche facile : un an pour trouver des locaux, faire les lourdes démarches administratives locales et obtenir les autorisations de la tutelle. Une procédure particulièrement compliquée pour tout ce qui touche à la sécurité et à la protection des patients.”Les règles sont l’équivalent de ce qu’on trouve en France dans les cliniques et les hôpitaux, mais appliqué à un cabinet de consultation”, résume l’initiateur du projet.

Endocrinologues, psychiatres, gynécologues, mais aussi ostéopathes et “préparateurs au voyage”, une trentaine de médecins français regroupant une vingtaine de disciplines accueillent aujourd’hui des expatriés français et des Français installés à Londres. Mais pas de généralistes, qui sont déjà bien implantés dans la ville. “On travaille en correspondance avec des généralistes français qui nous envoient leurs patients en cas de besoin”, précise le médecin. Car même s’ils sont parfaitement bilingues et établis outre-manche depuis longtemps, en matière de santé, beaucoup des 225 000 Français de Londres préfèrent s’en remettre à un praticien Français.

 

240 € la consultation

“Ici, on essaye de travailler un peu comme en France. On essaye de les traiter comme ils ont l’habitude d’être traités. L’approche anglaise est un peu différente dans la consultation, mais surtout le système de santé anglais de manière générale est différent”. En Grande-Bretagne, les patients sont pris en charge à 100% par le NHS, pour ce que le NHS accepte de soigner uniquement. “Mais ils sont très restrictifs dans l’accès aux soins. Vous n’avez pas de possibilité d’aller voir un médecin spécialiste si votre MG ne vous adresse pas lui-même au spécialiste. Tout passe par le généraliste, qui a un pouvoir très important, et qui peut vous bloquer complètement l’accès aux soins spécialisés. Et il faut dire qu’ils ont une pression assez forte de la part de la tutelle pour limiter au maximum les dépenses.”

Les patients qui le souhaitent, et qui le peuvent, se tournent donc vers des praticiens privés dont les soins ne seront pas du tout pris en charge. A 240 euros (190 livres) la première consultation d’angiologie et une échographie, le responsable du centre assure pratiquer des tarifs nettement en-deçà de ses confrères anglais. Des honoraires qui attirent aussi un bon nombre de patients anglais.

Chacun dans leurs spécialités, les praticiens assurent des consultations à tour de rôle, pour pouvoir partager leur temps entre l’Angleterre et la France. “Dans notre spécialité, on est quatre. On a chacun notre semaine. Il y a une présence permanente en cas d’urgence, mais si les gens veulent me voir moi, je ne suis présent qu’une semaine toutes les quatre semaines”, détaille le Dr Barbaste.

 

Un rôle de “manager” compliqué

Même si officieusement, le Dr Barbaste revient beaucoup plus fréquemment. En plus de son travail de médecin, il assure un rôle de “manager”,comme disent les secrétaires de la Maison Médicale. Cette seconde casquette l’oblige à faire un saut à Londres chaque semaine, en plus de l’heure et demi de paperasse quotidienne qu’il gère par Internet.”Contrairement à la France, la partie administrative ici est vraiment très importante, assure-t-il. Les médecins doivent être certifiés tous les ans, dans toutes les spécialités, remplir des dossiers d’accréditations, sans parler des contrôles réguliers des infrastructures. Il y a un travail administratif énorme par rapport à un cabinet français de même taille.”

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Fanny Napolier