“Médecins, chirurgiens et apothicaires” : Si les traités de médecine et de chirurgie du XVIIIe siècle recèlent les racines de la “clinique française”, il n’est pas toujours simple ou aisé de les consulter. Ensemble, remontons le temps, à l’aide de ces extraits d’ouvrages anciens, à la fois instructifs, révélateurs, et parfois distrayants. Une toute nouvelle rubrique à découvrir sur Egora tous les mois.
Cet article est rédigé par le Pr Jean-Claude Nouët, ancien PU-PH et vice-doyen de La Pitié-Salpêtrière (AP-HP).
L’extrait : “Manuel des femmes enceintes”*
* Cette observation est faite par messire Guillaume-René Lefebure, baron de Saint-Ildefont, médecin de Monsieur, frère du Roi, chef et directeur de ses infirmeries, Paris, chez Jean-François Bastien, 1777, D.M. “Manuel des femmes enceintes, de celles qui sont en couches et des mères qui veulent nourrir”.
Décryptage
L’emmaillotage que dénonce vivement celui-ci consistait à enserrer le nouveau-né, puis le nourrisson, dans des linges superposés en l’immobilisant du cou aux pieds, bras étendus et collés au corps, littéralement saucissonné.
De nombreux tableaux anciens, religieux ou non, et même des sculptures (dont l’une à Notre-Dame de Paris), témoignent de cette pratique. Au XVIIIe siècle, l’emmaillotage était pratiqué de l’Europe au Moyen-Orient, et même au-delà, avec des adaptations et des particularités liées au mode de vie (nomadisme), au climat, aux traditions propres à chaque pays, voire à chaque région. En France, le Vaucluse, le Morbihan, la Corse, le Finistère, l’Île-de-France, la Lorraine, la Charente, la Creuse avaient des techniques rituelles d’emmaillotage différentes, et portaient des ajouts ornementaux locaux, exactement comme étaient différents les costumes traditionnels régionaux.
C’est le principe même de l’emmaillotage que Lefébure dénonce, à cause de ses inconvénients, liés à l’immobilité imposée à l’enfant, empêché de faire le moindre mouvement. Il recommande de permette à ce dernier d’effectuer librement les mouvements qu’il désire.
Il donne des conseils pratiques (c’est le propre d’un manuel) et décrit la façon de couper et de coudre les tissus composant un emmaillotage confortable et respectueux de la physiologie du nourrisson. En cela, Lefébure pourrait bien avoir été l’inspirateur oublié des “emmaillotages” modernes, qui, à la fois, laissent toute liberté de mouvements et assurent le confort et la sécurité. Ce serait là un réel apport, à l’honneur de Lefébure.
Source :
www.egora.fr
Auteur : Pr Jean-Claude Nouët
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