FLASH INFO 12/05/2020
Déconfinement et tracking

Comité Ethique Les Généralistes-CSMF

Notre système de santé actuel met au centre la Personne Humaine, qu’il soit patient, malade ou sain, et par ailleurs bénéficiaire ou non de l’assurance maladie. Le Médecin Généraliste libéral actuel est conscient de sa mission de réception de toute personne en demande de soins et d’amélioration de sa santé.

La crise actuelle et les erreurs initiales de sa prise en charge font que notre pays se trouve à un tournant : si l’on veut éviter un second confinement, dont les conséquences sanitaires et économiques risquent d’être pires que le premier, il faut repérer, dépister, traiter les patients suspects, mais aussi les isoler et rechercher tous les cas suspects pour les dépister et les isoler si besoin.

Les Généralistes-CSMF, en syndicat responsable et constructif, entend prendre pleinement sa part dans la lutte contre cette épidémie. Les questions éthiques ont fait l’objet de discussions intenses en notre sein. Nous vous proposons quelques réponses.

Pourquoi avoir insisté pour mettre le médecin généraliste au cœur du système ?

Pour Les Généralistes-CSMF, le médecin généraliste est celui qui connaît le mieux le patient et son entourage. Les Français, enquêtes après enquêtes, font en priorité confiance à leur médecin généraliste pour 90% d’entre eux. C’est donc l’interlocuteur privilégié du patient, surtout en période de crise sanitaire . Lire l’article

Le médecin généraliste doit-il signaler un patient Covid+ ou plutôt l’informer le mieux possible sur les enjeux de sa pathologie, pour lui et pour son entourage ?

Il est utile de rappeler que l’Article 12 du Code de Déontologie prévoit que « le médecin doit apporter son concours à l’action entreprise par les autorités compétentes en vue de la protection de la santé et qu’il participe aux actions de vigilance sanitaire. La collecte, l’enregistrement, le traitement et la transmission d’informations nominatives ou indirectement nominatives sont autorisés dans les conditions prévues par la loi ».
Pour que cet article puisse s’appliquer pleinement, il faut donc une loi référente. C’est un préalable indispensable.
D’autre part, la question principale pour le médecin de famille est de concilier cet aspect de sa fonction et le lien de confiance avec ses patients ?
La logique de la démarche serait de se fier au civisme et au bon sens de nos compatriotes qui veulent non seulement être dépistés et soignés, mais aussi protéger leurs proches ; aussi, le gouvernement et les autorités sanitaires ont tout intérêt à positionner le patient au centre du dispositif en le responsabilisant pour déclarer lui-même ses personnes contacts.
Le médecin généraliste, en tant qu’acteur clé verrait ainsi sa démarche facilitée et acceptable sur cet aspect éthique : le patient accepte sans réserve de participer au dispositif Contact Covid, de déclarer les cas contacts, tout en gardant la possibilité de préserver son anonymat vis à vis d’eux. Il nous apparaît essentiel de positionner résolument chaque patient comme responsable de sa personne dans le cadre de sa santé personnelle et de la santé collective.

Ainsi, le médecin peut en respect avec toutes les règles déontologiques et éthiques de la profession :
▪ Soigner, informer, sensibiliser le patient,
▪ L’aider à pratiquer son signalement selon un protocole préservant le secret médical et participant à la préservation des libertés individuelles,
▪ Lui détailler les modalités pour participer à une chaîne de solidarité dans le cadre de la Santé Publique.

Comme dans toute situation de soin, hors cas exceptionnel, le médecin ne doit pas décider à la place du patient ; son devoir éthique et moral est de lui apporter, outre les meilleurs soins, une information claire et responsable pour l’aider en toute autonomie à prendre sa décision.

La réglementation n’imposera peut-être pas d’obtenir le consentement du patient pour saisir les informations le concernant sur le portail de l’Assurance Maladie. Nous ne doutons néanmoins pas que chaque médecin aura à cœur, comme il le fait depuis toujours, de s’efforcer de l’obtenir.

Qui doit enquêter à domicile auprès des patients et des cas contacts ?

Les éventuelles personnes se déplaçant à domicile dans les cas complexes de potentiels foyers ne peuvent être que des professionnels, formés à ce difficile métier d’intervenir à domicile. Nous nous opposons formellement à l’envoi de bénévoles ou volontaires qui ne seraient pas conscients de la nécessité du respect du secret médical. Les organisations territoriales doivent être en mesure, quand cela le nécessite, de faire intervenir des professionnels de santé et des travailleurs sociaux.

Quid du lien ville hôpital dans cette épidémie ?

L’efficacité du système dépendra également du lien ville hôpital, dont cette crise montre toute l’importance. Contrairement à certains responsables, les acteurs de terrain ont bien conscience que chacun doit faire ce qu’il sait faire : l’hôpital soigne à l’hôpital, et la ville s’occupe de la ville. Un processus simple et clair de lien entre l’hôpital et la ville doit s’assurer de la transmission des informations, notamment le diagnostic fait à l’hôpital de sujets Covid, pour que le médecin traitant puisse organiser la prise en charge en lien avec les infirmières ou autres intervenants. Là encore, ce sont les organisations territoriales qui devront être les relais entre l’hôpital et la ville, pour s’assurer de cet échange d’information et de la prise en charge optimale des patients sans médecin traitant.

Utilisez les systèmes de suivi informatiques ou papier qui vous conviennent sur vos territoires, qui vous permettent de suivre vos patients entre professionnels. Nous sommes opposés à des systèmes d’information hospitalo-centrés qui transforment le médecin généraliste en supplétif de l’hôpital.

Est-ce que cela sera exhaustif et suffisant ?

Certainement pas. Nous savons que, dans ce dispositif, nous ne recenserons et suivrons que les patients qui pourront être inscrits dans le registre de l’Assurance Maladie, c’est à dire les patients avec un test PCR positif et/ou ayant eu un scanner confirmant le diagnostic. A l’heure où nous écrivons ces lignes il est prévu que ne seront pas comptabilisés tous ceux dont les symptômes nous évoquent une infection au Coronavirus mais pour lesquels les confirmations paracliniques manqueront. Notre accompagnement, basé sur la clinique et les soins personnalisés ne changera pas par rapport à ce que nous faisons de manière consciencieuse depuis le début de l’épidémie.

Dans la lignée de ce que demande le Conseil National de l’Ordre des Médecins, la CSMF sera vigilante sur :

▪ Le traitement et l’utilisation de données uniquement liées au COVID dans les systèmes d’information créés spécifiquement pour le déconfinement (garanties sur l’hébergeur et la non-utilisation de ces données) ;
▪ L’absence d’information médicale autre que la suspicion de Covid dans les données transmises ;
▪ La garantie que les personnes ayant accès à ces systèmes d’information soient des professionnels de santé sous l’égide du médecin conseil ;
▪ L’incessibilité de ces données ;
▪ La démarche volontaire et active du patient pour déclarer les sujets contacts, et de ce fait, abandonner l’histoire de rémunérer cette déclaration ;
▪ La supervision de la gestion de ces fichiers et des personnes y ayant accès par le CCNE, et leur suppression le plus rapide possible, dès qu’ils n’ont plus d’intérêts ;
▪ L’établissement tous les 3 mois, d’un rapport transparent et public sur l’utilisation des données collectées ;
▪ La garantie que ce fichier reste strictement confidentiel et qu’y figurer ne puisse constituer en aucune manière un frein à l’embauche ou à la souscription d’assurances.

Pour réagir sur le sujet, écrivez-nous!

Références:
1. Enquête Le Généraliste du 13/12/19 : www.legeneraliste.fr
2. Communiqué du Collège de la Médecine Générale du 07/05/20
3. Outil de suivi patient Suivi Covid
4. Communiqué du conseil de l’Ordre des Médecins

Le Comité Ethique des Généralistes CSMF sur la stratégie de déconfinement liée à la crise du Covid19, constitué sur proposition du comité directeur des Généralistes CSMF, en accord avec le Bureau des Généralistes CSMF, son Président le Dr Luc Duquesnel et sa Secrétaire Générale le Dr Sylvaine Le Liboux, composé de :

Dr Sophie Siegrist, médecin généraliste à Le Ban-Saint-Marin, Master 2 d’éthique, Professeure Associée de Médecine Générale à la Faculté de Médecine de Nancy, Vice-Presidente de la CPTS Metz et environs.
Dr Stéphane Attal, médecin généraliste à Saône, membre du bureau national de la CSMF, élu URPS ML Bourgogne Franche Comté, conseiller ordinal du Doubs,
Dr René-Claude Dacquigny, médecin généraliste à Saint-Omer, ancien président du CDOM du Pas-de-Calais, élu URSP Hauts-de-France,
Dr Yannick Frezet, médecin généraliste à Rive-de-Gier, Vice-président des URPS Auvergne Rhône Alpes, ancien président de la CSMF Jeunes Médecins,
Dr Jean-Daniel Gradeler, médecin généraliste à Saint-Privat-la-Montagne, trésorier adjoint des Généralistes CSMF, secrétaire général de la CPTS de Metz et environ, Coordinateur de la commission URPS Grand Est de médecine générale, coordonnateur du Collège Généralistes à l’URPS Grand Est
Dr Mickaël Riahi, médecin généraliste à Paris 19, vice-¬président des Généralistes-CSMF délégué à l’exercice coordonné, membre du bureau national de la CSMF, élu URPS ML Ile de France,
Dr Rémy Sebbah, médecin généraliste à Marseille, Président CSMF 13, élu URPS Médecins Libéraux PACA,

Relation presse :
Laurence NOEL :
Tel: 01.43.18.88.30
Portable 06.12.72.00.57
Mail : lesgeneralistes@csmf.org