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“Troubles dys” : ce que le médecin traitant doit savoir

Devant les insuffisances et l’hétérogénéité des prises en charge des enfants présentant un “trouble dys”, la HAS vient de publier des recommandations. Une fiche spécifique est dédiée à la place du médecin traitant de l’enfant qui intervient à tous les niveaux de la prise en charge et coordonne les soins.

 

Les troubles spécifiques du langage et des apprentissages (Tsla), communément appelés “troubles dys”, sont fréquents puisqu’ils concerneraient 8% des enfants d’âge scolaire, en France. Des progrès ont été réalisés ces 15 dernières années, notamment en ce qui concerne les connaissances physiopathologiques de ces troubles, leur dépistage et leur diagnostic. Cependant, on manque encore à l’heure actuelle d’un véritable parcours de soins coordonné, centré sur les besoins de l’enfant, ce qui peut compromettre ses capacités futures, ainsi que son bien-être psychologique. Les prises en charge sont hétérogènes et inégales sur le territoire, avec “des retards dans les diagnostics et prises en charge, des orientations vers certains professionnels injustifiées ou par défaut, des prises en charge inadaptées ou indument prolongées”, constate la Haute Autorité de santé (HAS). En outre, les centres de références des Tsla, qui existent déjà, sont saturés.  C’est pourquoi la HAS s’est penchée sur ce sujet. Et elle vient de publier des recommandations, sous forme d’un « guide parcours de santé », et de fiches spécifiquement dédiées au médecin de premier recours et à l’enseignant.

Les Tsla sont liés à des anomalies dans le développement cognitif de l’enfant. Ils recouvrent des situations très diverses et peuvent concerner une ou plusieurs fonctions cognitives : le langage oral, les apprentissages scolaires (le langage écrit (la lecture, l’orthographe), le calcul), les fonctions praxiques gestuelles et/ou visuospatiales, et les fonctions transversales (attention, mémoire, fonctions exécutives) …, avec des conséquences sur la vie quotidienne des enfants, leur insertion scolaire, et  leur vie d’adulte.

Le guide de la HAS s’adresse donc aux différents acteurs de la prise en charge : soignants et enseignants. Il détaille le parcours de santé de référence de l’enfant : du repérage à la prise en charge, qui est graduée en trois niveaux selon la sévérité et la complexité du trouble.

 

Dépistage : des clés pour le médecin traitant

Tout d’abord, pour améliorer le repérage des Tsla, la HAS propose des tableaux décrivant, pour chaque âge clé, les signes d’alerte et les actions à mettre en œuvre en cas de difficulté dans les différents domaines d’apprentissage. Elle met l’accent sur la collaboration entre l’éducation nationale et les soignants. “L’enjeu est de rechercher le plus précocement possible une difficulté au travers de l’observation (pré­sence de signes d’alerte) ou à l’aide d’évaluations normées, dans l’objectif de prendre en charge les retards au plus vite, de corriger ces difficultés et de mettre en place les rééducations si nécessaire. La précocité de ces interventions permettra de prévenir les limitations d’activité ou les restrictions de participation à la vie en société”, affirme la HAS dans ses recommandations. Outre la famille, les professionnels de la petite enfance, et les enseignants, les professionnels de santé de premier recours ont un rôle majeur à jouer.

Un “trouble dys” doit ainsi être suspecté sur des signes évocateurs lors des examens obligatoires des enfants, ou sur des signes d’appel observés en consultation ou rapportés par les parents : lenteur, maladresse, sur (ou sous) investissement du langage, opposition (refus d’écrire, d’aller à l’école), agitation, comportements d’évitement, manifestations somatiques non spécifiques (douleurs, sommeil, humeur, comportement sommeil et/ou appétit perturbé). Le dépistage du trouble repose ensuite sur l’entretien avec les parents et l’enfant ; l’examen somatique à la recherche d’un déficit neurologique, moteur, visuel ou auditif, … ; l’appréciation des compétences cognitives ; l’utilisation d’outils de dépistage. Le médecin s’attachera aussi à évaluer le retentissement du Tsla sur la vie quotidienne et sociale de l’enfant, et sur son développement psycho-affectif et relationnel.

 

Trois niveaux de prise en charge en fonction de la sévérité

À l’issue de ce repérage, “des mesures pédagogiques doivent dans un premier temps, être mises en œuvre auprès des élèves en difficulté d’apprentissage”, ajoutent la HAS. Et, « afin de répondre aux besoins spécifiques de ces enfants », l’agence a structuré l’organisation du parcours de santé en 3 niveaux. “L’enjeu est d’éviter : soit la médicalisation de difficultés relevant d’un renforcement pédagogique, soit un retard dans la prise en charge médicale”, précisent les auteurs du texte.

Ainsi, le niveau 1 correspond aux situations dans lesquelles la pose du diagnostic et la mise en œuvre thérapeutique sont les plus simples. Il permet une prise en charge par les professionnels de proximité de ville. “Les médecins généralistes et pédiatres libéraux sont à même de poser les diagnostics simples”, confirme la HAS. Le praticien pratiquera un bilan auprès du professionnel spécialiste du domaine concerné par le Tsla (orthophoniste, psychomotricien, psychologue…).

Le second niveau concerne des enfants ayant un trouble plus complexe. Il peut s’agir : de troubles nécessitant plusieurs intervenants, et donc une coordination ; de difficultés diagnostiques ; de l’existence de comorbidités (autres troubles cognitifs, psychologiques, etc.) ; ou encore d’enfants répondant insuffisamment à la prise en charge de 1ère intention. “Ces prises en charge de niveau 2 existent par endroit. Toutefois les organisations pluri-professionnelles restent peu formalisées et peinent à se structurer sur l’ensemble du territoire”, précise la HAS. En outre, les délais pour obtenir un avis spécialisé sont souvent trop long. Pour améliorer cette situation, la HAS décrit le cahier des charges à suivre par les organisations de ce niveau de complexité. Ainsi, ce niveau est constitué d’équipes pluridsciplinaires composées d’un médecin spécialisé dans le Tsla, – qu’il soit généraliste, pédiatre, neuropédiatre ou d’une autre spécialité – , de psychologues et de rééducateurs formés. D’autres ressources pourront éventuellement être mobilisées selon les besoins de l’enfant. La création de ce niveau vise à « assurer un maillage territorial garantissant un accès de proximité et dans un délai raisonnable à une expertise pouvant servir d’appui pour le premier niveau, et de recours pour les familles » souligne la HAS.

Enfin, le niveau 3 est destiné aux cas les plus sévères. Il correspond aux centres de référence des troubles du langage et des apprentissages(Crtsla) rattachés à des centres hospitaliers universitaires. Ces entités existent déjà, cependant, elles sont souvent “saturés par des sollicitations trop fréquentes et pas toujours justifiées car obtenir un avis spécialisé en dehors de ces structures est difficile à l’heure actuelle”, regrette la HAS.
Pour chacun des trois niveaux, le projet de soins comprend un axe rééducatif (orthophonie, psychomotricité, ergothérapie, orthoptie, etc.), un axe psychologique si nécessaire, et un axe médical si besoin.

 

Importance de l’accompagnement et des adaptations scolaires

Le médecin traitant à un rôle central dans le suivi de l’enfant. Il transmet et explique le diagnostic et la prise en charge du trouble identifié aux parents et à l’enfant. En ce sens, il a un rôle d’écoute et d’accompagnement majeur. Il rédige une note récapitulative dans le carnet de santé de l’enfant. Il apprécie son évolution et coordonne les adaptations pédagogiques et scolaires nécessaires. Enfin, il informe l’enseignant quant aux conséquences fonctionnelles des troubles et met éventuellement en place, selon les besoins de l’enfant, un Plan d’accompagnement personnalisé (PAP), ou un Projet personnalisé de scolarisation (PPS), après reconnaissance d’une situation de handicap par la Maison départementale des personnes handicapées (Mdph).

 

Améliorer la formation

La HAS souhaite renforcer la formation des professionels en proposant aux médecins de premier comme de second recours, des formations aux Tsla, avec adaptation à leurs niveaux d’intervention dans le parcours. Il s’agit aussi de développer des formations au développement cognitif de l’enfant, aux interventions pédagogiques précoces, aux adap­tations pédagogiques et aux outils de compensation, pour les enseignants à tous les niveaux du parcours scolaire.

Pour la HAS, ce parcours de soins doit s’accompagner d’une valorisation de l’ensemble des contributions médicales et paramédicales, ou encore psycholo­giques, “que ce soit sous la forme de consultations longues, de temps de synthèse ou de temps de coordination pour les soins ou avec l’institution scolaire”, précise l’organisation sanitaire. Elle souhaite aussi faciliter l’accès aux professionnels libéraux non conventionnés : psychologues, ergothérapeutes, psychomotri­ciens.

Enfin le texte souligne que “une attention particulière doit être portée aux populations socialement vulnérables pour lesquelles les difficultés scolaires sont plus fréquentes et les inégalités d’accès aux personnels spécialisés de l’Éducation nationale et aux soins sont plus importantes”.

[Avec La Haute Autorité de Santé : Comment améliorer le parcours de santé d’un enfant avec troubles spécifiques du langage et des apprentissages
et Signes d’alerte à l’intention du médecin de premier recours et actions à mettre en œuvre]

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Marielle Ammouche

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