Les discussions conventionnelles se poursuivent, alors que la stratégie de la CNAM pour dépenser le moins possible, pourrait se résumer à une triade infernale. Comme un fil rouge, le Dr Luc Duquesnel, le président de l’UNOF-CSMF, témoigne de la falsification des chiffres des revenus des médecins généralistes présentés par l’Assurance Maladie, des impossibilités de cumuler revalorisation des actes de base avec les actes complexes et enfin, de la recherche du “mouton à cinq pattes”, un C complexe et rare qui serait revalorisé.

 

A la quatrième séance de “discussions” conventionnelles (terme employé à dessein puisque les partenaires autour de la table, à la CNAM, ne sont pas encore entrés dans le vif du sujet, les propositions), le sentiment qui prévalait à l’UNOF-CSMF, c’était que l’Assurance Maladie était “à côté de la plaque”. Au vu du retard pris sur le plan tarifaire et des insuffisances des précédentes conventions, l’état des lieux appelle à l’urgence. Alors que le directeur de la CNAM garde les yeux sur son tableau de bord comptable, sans vouloir tenir compte réellement des besoins des médecins généralistes, dont le niveau de vie et le décrochage de revenus avec leurs confrères spécialistes est pourtant patent.

Il ne s’agit pas d’une insuffisance de connaissance des dossiers – le directeur est en poste depuis la fin 2014 – mais bel et bien d’une stratégie, accuse Luc Duquesnel, le président de l’UNOF-CSMF.

Après quatre longues séances, sa religion est faite. “Le directeur de la CNAM nous a présenté des chiffres, l’évolution des revenus entre médecins généralistes et les autres spécialités cliniques. Mais, dans les autres spécialités, il présente une moyenne qui englobe aussi les généralistes, c’est de la manipulation”, dénonce le président des généralistes de la Conf’. Autre exemple où les caisses ont été prises la main dans le sac : les revenus “estimés” 2015. “Là, la CNAM a reporté 6 mois de majoration MPA, issus du bilan 2014, sur le bilan 2015 ! tacle Luc Duquesnel. Tout cela est fait pour présenter un bilan favorable de l’évolution des revenus des médecins généralistes, et minorer le différentiel qui se creuse avec les autres spécialités”.

Pour le président de l’UNOF-CSMF, les seuls chiffres valables ont été publiés par la DREES : les revenus des médecins généralistes ont augmenté de 0,3 % par an entre 2005 et 2011 et pour les spécialistes, de 0,8 % par an sur la même période. Rien à voir avec les publications de la CNAM qui font état d’une évolution moyenne des revenus par tête de 1,6 % entre 2011 et 2015, et de 1,4 % pour les généralistes et les MEP sur la même période.

“J’ajoute que les médecins généralistes travaillent en moyenne hebdomadaire 7 heures de plus que les autres spécialistes, et que leur rémunération annexe provenant d’un exercice salarié ne constitue qu’un quart de leur revenu en moyenne, contre 40 % ou plus pour les autres spécialités”, insiste le président de l’UNOF-CSMF.

Confronté à ce bilan et à des caisses bien vides pour la médecine ambulatoire, on comprend que le directeur de la CNAM cherche à louvoyer et ne tenir compte que des chiffres qui l’arrangent. Ainsi, lorsque le sujet des consultations complexes est venu sur la table, dont l’objet est notamment d’”accompagner le virage ambulatoire en favorisant la prise en charge libérale pour limiter le recours à l’hospitalisation pour des pathologies possiblement prises en charge en médecine de ville”, actes nécessitant une coordination avec les autres spécialités, les exemples brandis par la CNAM ont été la maladie de Parkinson, la polyarthrite rhumatoïde, l’asthme instable ou la dépression sévère de l’adolescent… “Autrement dit, des moutons à cinq pattes, des pathologies que l’on rencontre une fois tous les trois mois en médecine générale”, s’énerve Luc Duquesnel. “Nous avons identifié les besoins. Par exemple, la pathologie suscitant le plus d’hospitalisation en médecine ambulatoire, c’est l’insuffisance cardiaque. Et là, il n’y a rien, puisqu’il y a beaucoup d’actes et cela coûterait trop cher !”.

Car le directeur a également prévenu qu’il n’y aurait pas de transfert d’enveloppe entre l’hôpital et la ville et qu’en outre, il faudra choisir entre la mise en place d’un C lourd ou de 2 euros sur le C.

“On est clairement à côté de la plaque, s’insurge le président de l’UNOF-CSMF, tout est conditionné par l’enveloppe alors que rien n’a été fait sur la dernière période conventionnelle, et que le bilan des conventions précédentes n’est pas bon non plus. Pour les jeunes et par rapport à la problématique de la médecine générale, c’est un très mauvais message. Il y a un rattrapage à faire et cela n’en prend vraiment pas le chemin. Les jeunes de mon comité directeur considèrent que ce qui se passe est scandaleux ! “’.