A 64 ans, Ben Carson, ancien neurochirurgien très réputé, est certainement le candidat le plus improbable à la Présidentielle américaine. Dans le trio de tête pour l’investiture Républicaine, ce catholique ultra-conservateur multiplie les gaffes et les déclarations polémiques qui lui valent les moqueries des médias qui affichent son incompétence. Pourtant, son parcours digne d’un scénario hollywoodien a très vite séduit les américains. Portrait.
 

 

Sans la moindre expérience en politique, Ben Carson est aujourd’hui le troisième homme des primaires républicaines aux Etats-Unis. En fin d’année dernière, il était même en tête des sondages dans certains états, comme l’Iowa, ce qui a médusé les observateurs politiques et ses adversaires comme Donald Trump. Il faut dire que cet ancien neurochirurgien est a priori à l’exact opposé de son turbulent adversaire. Marié, père de trois enfants, il est végétarien, parle toujours de façon très calme sans jamais élever la voix. C’est aussi un homme de foi, adventiste du septième jour (un courant protestant) qui assure partout que Dieu et la lecture de la Bible ont guidé sa vie personnelle et professionnelle.

 

Une success-story comme en raffole l’Amérique

Ben Carson a annoncé en mai dernier sa candidature à l’investiture républicaine et, contre toute attente, les sondages se sont vite révélés très positifs. Plus que son programme politique très approximatif, c’est le parcours de cet afro-américain de Détroit qui a séduit. Car la vie de Ben Carson est une success-story comme en raffole l’Amérique, elle a d’ailleurs déjà fait l’objet de six autobiographies et d’un téléfilm en plusieurs épisodes.

Le candidat républicain a grandi à dans une famille très pauvre de Détroit, élevé par une mère illettrée et un père pasteur, ouvrier chez Cadillac. Lorsque Ben a 13 ans, sa mère découvre que son mari mène une double vie et décide de le quitter. Carson raconte aujourd’hui qu’il a été un adolescent très violent, qu’il a notamment tenté de frapper sa mère avec un marteau et qu’il a essayé de poignarder un de ses camarades de classe qui avait osé changer la station de radio. Heureusement, la lame de poignard s’est arrêtée sur la boucle de ceinture… Après cet incident, le jeune homme se met à lire la Bible et va à l’église tous les dimanches. C’est Dieu qui l’a remis sur le droit chemin, explique-t-il.

Ben Carson devient alors un étudiant exemplaire, il est reçu à Yale, puis intègre l’école de médecine du Michigan. A 33 ans, il est nommé directeur du centre de neurochirurgie pédiatrique au prestigieux hôpital John Hopkins. Il réalise notamment une séparation de siamoises reliées par le crâne, une opération qui le rend célèbre.

 

Les Etats-Unis sont “très semblables à l’Allemagne nazie”

Aujourd’hui retraité, l’outsider républicain base sa campagne essentiellement sur son histoire personnelle. Son manque d’expérience en politique ? Aucun problème selon lui. Pour répondre à une critique à ce sujet, il a d’ailleurs tweeté : “Les gens qui ont construit l’arche de Noé étaient des amateurs et ceux qui ont construit le Titanic, des professionnels”. Mais au fil des mois de campagne, ses erreurs de jugements et son ignorance, en matière de politique internationale surtout, ont commencé à se faire sentir dans les sondages.

Les médias américains, eux, se font une joie de passer en boucle les propos du candidat. Il faut dire qu’il multiplie les gaffes. Il a qualifié Obama de “psychopathe” et a comparé la réforme de l’Obamacare à l’esclavage. Il estime que les Etats-Unis, aujourd’hui sont “très semblables à l’Allemagne nazie. L’Etat utilise les instruments à sa disposition pour intimider la population. Nous vivons à présent dans une société où les gens ont peur de dire ce qu’ils pensent vraiment”, juge-t-il.

Provocateur, Ben Carson assure qu’il “ne serait absolument pas d’accord à ce que nous donnions les rênes de ce pays à un musulman.” D’ailleurs, complète-t-il, les valeurs de l’Islam “ne sont pas conformes à la Constitution”.

Il est bien sûr un féroce défenseur du port d’armes. “Je pense que les chances d’Hitler d’atteindre ses buts auraient été grandement réduites si les gens avaient été armés”, a-t-il déclaré sur CNN.

Concernant les sujets scientifiques, les propos du médecin ne sont pas plus brillants. Au sujet du changement climatique, par exemple il a déclaré qu’il y aurait “toujours, soit un réchauffement, soit un refroidissement”. Il est aussi sceptique sur la théorie de l’Evolution et pense que la plupart des vaccins sont inutiles.

 

Les pyramides d’Egypte : des greniers à grains pour le père de Jésus

Parmi les sorties les plus mémorables du Dr Carson, une révélation édifiante sur les pyramides d’Egypte qui ne seraient pas du tout l’œuvre des pharaons mais servaient de grenier à grains pour Joseph… Le père de Jésus. “Désormais, les archéologues pensent qu’elles furent construites pour servir de tombeau aux Pharaons. Mais, si on n’y pense bien, cela voudrait dire alors que ces Pharaons seraient vraiment énormes”, a estimé le médecin lors d’une cérémonie de remise de diplômes à l’université Andrews, en 1998.

Outre ses propos qui en font la risée des médias américains, de nombreux journalistes ont également enquêté sur le passé du neurochirurgien. Beaucoup mettent en doute ses propos, notamment sur ses accès de violence pendant sa jeunesse. Ben Carson a en tout cas menti sur un point, au moins : il n’a jamais reçu d’offre de bourse de la prestigieuse école militaire de West Point. Il racontait partout qu’il avait dû, à contre cœur, refuser cette offre pour faire médecine.

Face à ce bashing médiatique Ben Carson répond par l’attaque. Si les journalistes s’acharnent contre lui, c’est tout simplement parce qu’il est une menace pour le “mouvement progressiste laïque” aux Etats-Unis, assure-t-il. Mais, si une frange très conservatrice du pays continue de soutenir le Dr Carson pour les valeurs qu’il représente, il y a de fortes chances que l’ascension de l’outsider s’arrête net. S’il est toujours, d’après les sondages, dans le trio de tête des candidats à l’investiture républicaine, son score a beaucoup baissé ces dernières semaines. La première étape de la primaire, le 1er février prochain, sera décisive. En jeu, l’Iowa, un état dominé par la droite évangélique, probablement le seul où le neurochirurgien a une chance de l’emporter.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : A. B.

 

[Avec Lepoint.fr, Courrierinternational.com et Lejournalinternational.fr]