Comment enrayer le déclin de la PDSa ? Voilà plus d’un an qu’une mission parlementaire s’est penchée sur le sujet, et elle vient de rendre ses conclusions. Au menu : infirmiers cliniciens dans les Maisons médicales de garde, rémunération des gardes à vue et certificats de décès, ouverture de la PDSa aux remplaçants… Le président de la mission, le Dr Jean-Pierre Door, revient pour Egora sur ces mesures.

 

Egora.fr : La PDSa va mal, le constat est connu. Qu’est-ce qui ne va pas ?

Jean-Pierre Door : On assiste de manière certaine à une érosion du nombre de médecin pratiquant la permanence des soins, puisqu’on est passé de 80% à 60%. On connaît les facteurs : la réduction du nombre de médecins généralistes, le vieillissement, l’inégale répartition sur le territoire… Tout ça fait qu’il y a une érosion de la PDSa. C’est le premier point.

On évoque aussi le sujet d’une mauvaise information, communication des patients. C’est pour cela que les patients appellent parfois le 15, parfois le 18, ils sont un peu perdus. Cela entraîne une importante recrudescence aux urgences. Ce système est assez illisible pour les patients. Et sur le plan du coût, ça a considérablement augmenté. On est passé de 250 millions à 380 millions pour la PDSa en quelques années, sans une nette amélioration du système malgré l’augmentation.

Il y a aussi des différences, pas très satisfaisantes, de rémunération des astreintes. A certains endroits, on la trouve à 60 euros, dans d’autres régions à 150 euros. Il y a une inégalité dans la tarification des astreintes. C’est le résultat d’une mauvaise gouvernance. Le constat est connu, on n’invente rien. Je suis conscient que le rapport ne révolutionne pas la PDSa. Il y a un constat, une analyse objective. Ensuite il faut chercher quelques propositions.

Vous parlez de mauvaise gouvernance, pointez-vous le rôle des ARS ?

Non, les ARS ne sont pas à mettre en cause particulièrement. Le problème de la PDSa dépend quand même et avant tout des professionnels de santé eux-mêmes, avec les Comités départementaux d’aide médicale d’urgence (CODAMUTS) de la permanence des soins. Il y a des réunions régulières entre les professionnels de santé, les représentants de l’ARS, de la préfecture pour débattre de ces sujets-là. Les ARS ne sont pas les premières responsables.

Qui sont alors les premiers responsables ?

La première chose, c’est d’avoir une meilleure coordination entre tous les acteurs de la PDS via le renforcement du rôle de CODAMUTS. Il faut qu’ils puissent se rencontrer plus souvent pour discuter. Il faut qu’il y ait des rencontres permanentes. On sait par exemple qu’il y a des différences entre la PDS des médecins et celle des pharmacies. Il faut mieux coordonner tout ça pour éviter que le patient ait à faire des kilomètres et des kilomètres. Et pour cela, il faut absolument laisser la PDS à l’échelon départemental. Pas à l’échelon régional, ni à l’échelon national. C’est aux départements à gérer ça.

Dans le même temps, vous proposez le retour de la PDSa dans les négociations conventionnelles ?

Oui, tout à fait. Compte tenu de la diminution du nombre de professionnels dans la PDSa, il faut réintégrer le corps libéral dans ce débat. D’un côté, les CODAMUTS doivent permettre un débat à l’échelle départementale, mais au niveau national il faut passer par la convention. Il faut un espace de discussion avec les représentants libéraux, où ils puissent faire des propositions pour améliorer les choses, demander une rémunération plus attrayante… C’est le lieu où tout ça doit se passer.

La diminution du nombre de médecins volontaires pourrait vous conduire à revenir sur le volontariat ?

Pas du tout. Le volontariat est maintenu. Nous tenons à ne pas remettre en cause ce principe. Par contre, il faut augmenter le nombre d’acteurs intervenant dans la PDSa. Il faut aller rechercher non seulement les médecins libéraux, mais probablement aller chercher aussi les médecins retraités, les médecins salariés des centres de santé… Pourquoi ne pas favoriser des stages d’internat en Maison médicale de garde ? On pourrait aussi aller chercher les remplaçants, qui doivent avoir la possibilité de participer à la PDSa en leur nom propre.

Quelles sont les autres solutions que vous présentez ?

Il faut absolument soutenir les associations départementales de PDSa libérale. Il faut arrêter de leur mettre des bâtons dans les roues. Certains nous disent qu’elles sont mal aimées, il y a eu des difficultés. Alors qu’il y a des exemples qui marchent bien, il faut s’en servir. Il faut les conforter, à l’échelon local.

Il faut aussi soutenir les Maisons médicales de garde, et non pas réduire leurs subventions. Partout où elles existent, il faut les soutenir financièrement. Il faut donner la possibilité du remboursement par la Sécurité sociale du transport depuis le domicile jusqu’à la Maison médicale de garde. Aujourd’hui, ce n’est pas remboursé, donc les gens vont plus facilement à l’hôpital, où c’est gratuit.

Il faut aussi mettre au moins le tiers-payant dans les Maisons médicales de garde, par l’intermédiaire de la télétransmission.

Vous proposez des infirmiers cliniciens ?

Oui. L’idée c’est de voir si, dans les Maisons médicales de garde, on ne peut pas permettre l’adjonction de certains infirmiers qui pourraient venir soutenir, et qui seraient habilités à recevoir le patient, faire un diagnostic. Il faut aller vers la délégation de tâche. Ce sera une de nos propositions.

Que proposez-vous concernant les certificats de décès et examens de garde à vue ?

C’est un point qui m’importe beaucoup ! La difficulté pour répondre aux certificats de décès et aux examens de garde à vue est réelle. Alors que c’est obligatoire, il est parfois difficile d’avoir un médecin. Le vrai problème c’est qu’il n’y a pas de rémunération dédiée. Cette rémunération fera partie des propositions.

Pourquoi avoir attendu le vote de la Loi de santé pour rendre public ce rapport ? Une publication avant le vote n’aurait-elle pas permis d’intégrer certaines propositions ?

La réponse est toute simple. Qui connaissait la date du vote de la Loi santé ? Nous on travaille sur ce rapport depuis la fin 2013. La loi santé devait sortir au début 2014, puis au printemps… Il n’y avait pas de date fixe, c’était toujours reporté. C’est un malentendu entre nos auditions et la Loi santé. Si on avait pu le sortir avant, ça aurait été très bien. Maintenant, il faudra prendre des points intéressants pour les intégrer dans la deuxième lecture de la Loi santé. On va aussi communiquer le rapport aux sénateurs, qui vont travailler en commission dès le mois de juillet.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Fanny Napolier