Contrairement aux affirmations péremptoires du gouvernement, la gestation pour autrui (GPA) et la Procréation médicalement assistée (PMA) pour les célibataires et les homosexuelles sont déjà légalisées ou plus exactement dépénalisées. Un jugement de la Cour européenne des droits de l’homme et un arrêt de la Cour de Cassation ont fait sauter les derniers verrous.
 

 

Cette reconnaissance hypocrite fait entrer le recours aux mères porteuses et à l’insémination assistée dans une zone grise qui ouvre la porte à toutes les dérives – business de la procréation, aliénation de la femme, tourisme procréatif – contre lesquelles les interdictions officielles sont censées être un rempart.

Il faut sortir de cette hypocrisie et de cette zone grise par une réflexion sur la parentalité et un débat sur une légalisation assumée et encadrée de ces techniques de procréation.

“La politique sera toujours l’art d’agiter les peuples avant de s’en servir” disait Talleyrand.

 

Une réalité de fait

La Manif pour tous – qui a mis dans les rues de Paris le 5 octobre dernier entre 70 000 (selon la police) et 500 000 (selon les organisateurs) personnes pour s’opposer à la légalisation de la gestation pour autrui (GPA) – illustre à merveille cette sentence. Que le premier ministre et tout le gouvernement claironnent que la GPA ne sera jamais autorisée n’a pas entamé la détermination de ceux que Nicolas Sarkozy appelle en privé “les fascistes en loden”.

Ces opposants manifestent-ils contre un fantasme ou contre un projet caché du gouvernement ? Ni l’un, ni l’autre. La légalisation ou plus exactement la dépénalisation de la gestation pour autrui et de la procréation médicalement assistée pour les couples de femmes n’est ni un fantasme, ni un projet caché mais une réalité de fait…

Depuis de nombreuses années, des femmes (célibataires ou en couple avec une partenaire) se rendent en Belgique, en Espagne et dans d’autres pays européens en quête d’une insémination que la loi française leur interdit d’avoir à l’intérieur de nos frontières. Sont-elles poursuivies pour avoir obtenu, à l’étranger, cette assistance médicale à la procréation en violation de l’article L242-2 du code de la Sécurité sociale ? Jamais, pour la bonne raison qu’il est difficile de prouver “l’infraction”. Et la loi de 2013 sur le mariage pour tous a fait sauter le dernier verrou.

En effet, après s’être mariées avec leur compagne, plusieurs femmes ayant eu un enfant par insémination en Belgique ont demandé à un tribunal d’instance de prononcer l’adoption simple de leur “bébé Thalys” par leur conjointe. En application de la loi sur le mariage, les tribunaux ont accédé à cette demande. Mais des procureurs ont fait appel de ces jugements, considérant que le recours à la PMA à l’étranger constituait “une fraude à la loi sur l’adoption”. Saisie par un de ces couples, la Cour de Cassation a considéré, dans un arrêt du 22 septembre 2014 “que le recours à l’assistance médicale à la procréation sous la forme d’une insémination artificielle avec donneur anonyme à l’étranger ne fait pas obstacle au prononcé de l’adoption par l’épouse de la mère de l’enfant, dès lors que les conditions légales de l’adoption sont réunies et qu’elle est conforme à l’intérêt de l’enfant”. Fermez le ban ! Il ne reste rien de l’interdiction de la PMA aux couples de même sexe, si ce n’est un inégal accès compte tenu du coût d’une PMA à l’étranger : 2 000 € environ en Belgique et beaucoup plus en Espagne dans les cliniques privées.

 

La France condamnée par la Cour européenne

Cette dépénalisation hypocrite est encore plus frappante en ce qui concerne la Gestation pour autrui.

Le 26 juin 2014, www.egora.fr
Auteur : Philippe Rollandin*

 

*Philippe Rollandin est consultant, spécialisé en santé et protection sociale.