Le conseil départemental de l’Ordre des médecins de Paris expérimente depuis quelques mois des consultations de prévention à destination des médecins libéraux en exercice. Un moyen pour les praticiens de faire le bilan sur une santé qu’ils négligent. Le tout, de manière anonyme et gratuite. Plusieurs pathologies ont déjà été détectées, notamment des burn-out.

 

Si les cordonniers sont les plus mal chaussés, il est évident que les médecins sont les plus mal soignés… “Ils fonctionnent par copinage et se font examiner par les copains médecins mais comme ils ne veulent pas déranger, ils ne sont jamais vus par personne” résume le Dr Irène Kahn-Bensaude, vice-présidente du conseil national de l’Ordre des médecins et présidente du conseil départemental de l’Ordre des médecins de Paris. Les médecins salariés sont suivis par la médecine du travail mais ce n’est pas le cas des médecins libéraux.

 

90% des praticiens n’ont pas de médecin traitant

Pour remédier à ce problème, le conseil départemental de l’Ordre de Paris expérimente depuis le 15 février dernier des consultations de prévention à destination des médecins libéraux en exercice. “Mieux vaut prévenir que guérir” juge le Dr Kahn-Bensaude. En effet, selon une thèse de médecine générale sur la santé des généralistes, réalisée en 2006, 90% des praticiens n’ont pas de médecin traitant. Ils sont également 86% à se prescrire eux-mêmes leur traitement psychotrope et 31% à ressentir le besoin d’un soutien psychologique.

Pour bénéficier des consultations de prévention, les médecins peuvent prendre rendez-vous, via le site de l’Ordre, ou par téléphone via le secrétariat de l’institution. Ils doivent alors répondre à un questionnaire de santé détaillé puis ils reçoivent une liste d’examens sanguins à faire en amont de la consultation. Tout est pris en charge par la Caisse d’assurance maladie de Paris. “Ils nous ont mis à disposition deux médecins au sein du centre de santé Broca dans le 5ème arrondissement de Paris” se réjouit le Dr Kahn-Bensaude.

Deux demi-journées par semaine, le Dr Grégory Tosti, praticien de l’AP-HP et un de ses confrères endossent le rôle de médecin de prévention. “J’examine 4 patients par demi-journée. Chaque consultation dure en moyenne 45 minutes” indique-t-il. “Une consultation de prévention pour un patient lambda dure une vingtaine de minutes” renchérit le Dr Kahn-Bensaude “quand ils consultent, les médecins ont beaucoup de choses à dire”.

 

“Problème d’épuisement professionnel pour 30% des médecins”

“Ces consultations apparaissent très clairement comme étant utiles. Pour l’instant, tous les patients que nous recevons sont leur propre médecin traitant. Nous avons détecté un panel très large de troubles, de l’hypertension à l’hypercholestérolémie en passant par des anomalies lipidiques” estime le Dr Tosti avant d’ajouter: “Nous avons décelé des burn-out. 10% des praticiens examiné ont été orienté vers la psychiatrie et nous avons constaté un problème d’épuisement professionnel pour 30% des médecins”.

Plus de 200 praticiens ont déjà pris rendez-vous et d’autres sont déjà sur liste d’attente. Les plages de consultations sont tout le temps pleines. “Les médecins ressortent satisfaits de ces consultations. Il n’y a aucune réticence de leur part. Chacun reste dans son rôle” constate le Dr Tosti. Si besoin, un praticien hospitalier de chaque spécialité est à disposition du “médecin malade” explique le Dr Kahn-Bensaude.

Si ce projet expérimental a été initié par l’Ordre, le Dr Tosti insiste sur la confidentialité des données. “Les consultations sont anonymes. Nous ne prenons pas la carte vitale. Aucune donnée n’est enregistrée au niveau informatique. L’Ordre n’a aucun retour.” Si ce test est concluant, les consultations de prévention seront développées dans toute la France.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Sandy Berrebi-Bonin