Directrice de l’OGDPC, l’organisme de gestion du développement professionnel continu, Monique Weber dresse un bilan de cette première année de mise en place du DPC, évoque la mission de l’IGAS, nommée par Marisol Touraine, pour simplifier le dispositif. Et dessine le cadre dans lequel la dotation 2014 sera déterminée.

 

Egora.fr : Quel est le dernier bilan en date du DPC, pour les médecins ?

Mme Monique Weber : Au 18 août dernier, 21 806 médecins ont ouvert un compte sur www.mondpc.fr. Parmi eux, 17 923 sont inscrits à au moins un programme de DPC. En moyenne, un médecin a fait à ce jour un programme et demi. Nous avons exactement 27 981 inscriptions. Si l’on se réfère au conseil de gestion de décembre 2012, où l’objectif était de former 22 486 médecins différents à ce jour, 78,25 % ont suivi au moins un programme. Nous comptabilisons pour les médecins 1 363 sessions présentielles, 814 non présentielles et 2 098 sessions mixtes. Par ailleurs, tous les médecins éligibles* à l’indemnisation ont été indemnisés à l’exception de 22 % d’entre eux, il s’agit de ceux qui ne nous ont pas fourni de RIB (relevé d’identité bancaire).

 

Etant donné le retard pris par le dispositif au démarrage, est-ce un bilan satisfaisant ?

Oui, c’est satisfaisant. De plus, ce bilan peut être optimisé car il reste des inscriptions en masse à réaliser par certains organismes (procédure de régularisation des inscriptions passées). Je suis donc très confiante sur l’atteinte de l’objectif que le conseil de gestion s’était fixé pour 2013.

 

Quel est le montant de l’enveloppe allouée à chaque médecin ?

Hors la formation à la maîtrise de stage et la formation des formateurs, l’enveloppe de chacun est de 3 700 euros. Si les médecins souhaitent suivre l’une de ces deux formations, elle sera financée en plus.

 

Les médecins libéraux se sont souvent plaints de la complexité du dispositif et la ministre de la Santé, Marisol Touraine vient de nommer une mission de l’IGAS pour proposer des voies de simplification du mécanisme qu’elle souhaite rendre plus accessible aux professions de santé. Qu’attendez-vous de cette mission ?

Je pense être contactée par le responsable de cette mission dans les prochains jours. Cette mission peut nous aider dans la simplification du dispositif. Pour un professionnel de santé, il faut qu’il s’inscrive à un DPC, qu’il le suive et qu’il fasse son évaluation. C’est assez simple. Mais sa mise en œuvre et son organisation sont plus compliquées. En effet, l’OGDPC a de nombreuses instances (conseil de gestion, commissions paritaires, conseil de surveillance, commissions scientifiques) chacune ayant son objectif et sa mission. De plus, nous gérons actuellement plus de 2000 organismes, 1,5 million de professionnels de santé sont concernés par le DPC, dont 500 000 libéraux. Les professionnels de santé ont eu du mal à adhérer à ce dispositif, car il était différent de ce qu’ils avaient connu par le passé. C’est un vrai changement. Il faut effectivement que l’IGAS conforte les missions de l’OGDPC, propose les éventuelles simplifications à mettre en œuvre et amendements des textes. Je précise par ailleurs que l’OGDPC n’écrit aucun texte. C’est un organisme de gestion et de mise en œuvre de ces textes.

 

Des syndicats médicaux ont violemment protesté contre la suppression de la dotation conventionnelle pour la FPC, le financement du DPC reposant désormais sur la contribution de l’industrie pharmaceutique. L’enveloppe 2013 pour les médecins libéraux est de 83 millions d’euros. Sait-on déjà quel serait son montant l’an prochain ?

Comme ce fut le cas cette année, le montant de l’enveloppe sera déterminé en fin d’année, à l’occasion du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale 2014. En tant que directrice de l’OGDPC, je n’ai aucune visibilité sur le montant de cette dotation. Les décisions seront prises en fonction de l’effort de DPC des professionnels et de la consommation de l’enveloppe en 2013. Si cette année, l’enveloppe est bien consommée et si l’objectif est atteint, on peut espérer une progression l’an prochain. Lorsque le montant de cette enveloppe sera connu, il sera réparti par le conseil de gestion entre les différentes professions. Les commissions paritaires fixeront les forfaits de prise en charge comme elles l’ont fait cette année. Vous dites que les médecins n’ont pas été contents, mais le système a totalement changé : nous ne sommes plus dans le cadre des conventions et les fonds alloués au DPC ne sont plus conventionnels. C’est une toute autre organisation.

 

Pour les hospitaliers, le DPC est un échec

Les deux intersyndicales Avenir Hospitalier et la CPH ont diligenté ensemble une grande enquête à propos du DPC pour faire le point sur l’organisation de la formation médicale continue en temps, en contenu, et en argent. A lire les résutats de cette consultation, c’est un échec.

Selon ses initiateurs, cette enquête a permis de montrer le degré de “sous-information totale des médecins hospitaliers sur ce dispositif très complexe”, expliquent-ils, ainsi que la “méfiance globale envers notamment les CME pour organiser au plus près de leurs attentes ce DPC”. 5 500 praticiens hospitaliers se sont exprimés.

En 2010-2011, exposent les deux structures, 80% des PH se sont formés, y consacrant 5 à 10 jours par an et 2360 euros en moyenne. “En soi ces chiffres devraient constituer le socle de départ / de référence de toute réforme, qui par essence ne devrait que faire mieux.” plaident-ils.

A près d’un an du lancement, une telle avancée “n’est pas lisible” : c’est un dispositif dont le cadre réglementaire, “d’une rare complexité, est toujours en voie d’installation”. Les arrêtés sont publiés au fil de l’eau, est-il exposé, des “ambiguïtés ou flous résiduels subsistent” et les sanctions ordinales paraissent “mythiques : sanctions encore imprécises, mais nous sommes curieux de voir leur faisabilité et leur mise en application !”. Bref, une “faiblesse réglementaire qui ne peut que nous inquiéter en tant qu’organisation syndicale”.

De fait, 60 % des PH avouent ignorer tout du dispositif et 70 % d’entre eux regrettent de n’avoir pas été informés par leurs organisations professionnelles ou leur établissement. Par ailleurs, 3 PH sur 4 reconnaissent qu’ils n’ont pas réfléchi à leur DPC. Plus de 80 % d’entre eux (84 %) reconnaissent qu’ils n’ont pas connaissance des recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) en la matière.

On est donc loin d’atteindre les objectifs ambitieux des pouvoirs publics qui tablaient sur l’adhésion d’au moins la moitié des PH en 2013, critiquent les deux structures qui estiment que l’engagement actuel des PH au DPC est un “vrai fiasco”.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Catherine Le Borgne

 

* est entendu par “éligible” tout médecin ayant suivi un programme de DPC réalisé entre le 1er et le 30 juin 2013, dont le dossier est complet.