Y-a-t-il un âge limite pour aller chez le dentiste ? A priori non et pourtant… Cela relève du véritable parcours du combattant pour les résidents d’Ehpad. Face à ce problème de santé publique, la Haute Normandie a peut être trouvé une solution. Depuis décembre dernier et pour une durée de deux ans, les résidents de neuf Ehpad de la rive gauche rouennaise pourront se faire soigner dans un “buccobus” qui viendra à eux, au moins une fois par mois.

 


Caries, pulpites, gingivites, les 950 résidents de neuf Ehpad de la rive gauche rouennaise vont enfin pouvoir se faire soigner par un dentiste. Car c’était loin d’être le cas. “60% de nos patients n’avaient pas vu de dentiste depuis plus de 10 ans. Plus de la moitié avaient besoin de soins”, résume Jean-Marc Vigny, directeur de l’Ehpad Pro BTP-RMS de Saint-Etienne-du-Rouvray et instigateur du projet “buccobus”. En effet, pour qu’un résident puisse aller se faire soigner chez un dentiste, il devait se faire accompagner par un proche. De plus, les dentistes n’étaient pas obligés de les accepter en fauteuil. Aujourd’hui, tout est beaucoup plus simple. “Le bus vient environ une fois par mois dans tous les établissements. Il s’agit d’un vrai cabinet dentaire dans lequel on peut faire des soins ou encore de la radiologie”, se réjouit Jean-Marc Vigny.

 

Géro-dontologie

L’association RG2 qui regroupe 9 Ehpad de la rive gauche rouennaise est à l’initiative de ce projet. Elle a su convaincre l’ARS de Haute-Normandie et l’Assurance maladie qui participent financièrement à cette initiative. “Ils sont venus nous proposer ce projet qui existe déjà en Ile-de-France. Nous avons voulu l’intégrer dans une démarche de centre de santé. Ils ont donc travaillé avec la mutualité française de manière à en faire une antenne de centre de santé de soins dentaires”, explique Anne-Marie Gallais du pôle organisation de l’offre de soins à l’ARS avant d’ajouter “ce buccobus répond à un vrai besoin”.

A bord de l’engin, similaire aux vieux véhicules de la médecine du travail, œuvrent le Dr Ourabah et son assistante dentaire. Après avoir exercé un temps en libéral, le Dr Ourabah a choisi le salariat. Et cette spécialisation en “géro-dentologie” est selon lui “particulièrement intéressante”. “La géro-dentologie est une spécialité qui n’existe pas encore et c’est bien dommage. Les patients sont très fragiles et à haut-risques. C’est un véritable problème de santé publique. Nous sommes tous concernés par la vieillesse” rappelle le dentiste. Très heureux de participer à ce projet ambitieux, le praticien aimerait tout de même aller plus loin. “Parmi les patients, il y a beaucoup d’Alzheimer sur lesquels on ne peut pas intervenir de manière classique. Ils sont dans un état de stress permanent. Il faudrait pouvoir les traiter sous anesthésie générale, ce qui permettrait de soigner en une seule fois plusieurs foyers infectieux et rendre aux patients une bouche saine” propose le Dr Ourabah.

 

190 000 € par an

Depuis le lancement du projet, le dentiste a réalisé des bilans à l’ensemble des 950 résidents enchantés d’être enfin suivis. Si le rythme de visites mensuelles est une réelle amélioration par rapport à la situation antérieure, le Dr Ourabah estime que ce n’est pas suffisant. “Il faudrait des visites au minimum une fois par semaine” juge-t-il. Car les problèmes dentaires ne se cantonnent pas à la bouche. “Cela crée de l’isolement, de la dénutrition, des complications cardiaques voire des esquarres” indique Jean-Marc Vigny qui planche désormais sur les problématiques des soins ORL et ophtalmologiques.

Mais le plus compliqué reste de trouver les financements. Le buccobus coûte 190 000 euros par an dont la moitié est financé par l’ARS. D’ici deux ans, il espère trouver d’autres subventions afin d’avoir une pérennité financière et prolonger le contrat du Dr Ourabah.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Sandy Berrebi