Alors que pour la plupart des cliniques privées, faire appel à un interne relève de la mission impossible, celle de Brest a réussi l’exploit. Un interne collabore avec le service de chirurgie orthopédique depuis le mois de novembre. Une expérience qui bénéficie autant à l’étudiant qu’aux praticiens libéraux.

 

C’est l’histoire d’un hôpital et d’une clinique disposés à travailler main dans la main… Lorsqu’il y a un an, le Professeur Dominique Le Nen, chef du service de chirurgie orthopédique et de traumatologie au CHU de Brest, reçoit comme consigne de l’ARS d’accueillir un plus grand nombre d’internes, il s’interroge. “En tant que responsable, il m’était impossible d’augmenter les effectifs, sous peine de baisser le niveau de formation. Il n’y aurait pas eu assez de garde”, indique le chirurgien. “C’est alors que l’idée du privé a fait son chemin dans ma tête”.

 

Futur exercice

“Je me suis dit qu’il pouvait être intéressant de faire découvrir aux internes le secteur auquel ils ne sont pas du tout formés. Cela sera peut être leur futur exercice”, explique le Pr Le Nen. Le chef de service décide donc de contacter ses confrères de la clinique Pasteur de Brest. Sept chirurgiens orthopédistes y exercent, dont le Dr Olivier Riot, spécialiste de l’épaule. ll est venu vers nous et nous a proposé ce poste d’interne. Nous avons tous été d’accord”, raconte le chirurgien orthopédique à Pasteur.

Un accord synonyme de point de départ des démarches administratives. Impératif numéro un : les sept chirurgiens devaient être membres du Collège Français des Chirurgiens Orthopédistes, ce qui était déjà le cas. Ils ont alors du monter un dossier pédagogique validé par le référent régional d’orthopédie. Ils ont également dû faire une demande auprès du doyen de la faculté de Brest, mais aussi de l’ARS. Enfin, la clinique a été visitée afin de vérifier la. conformité du service. Tout cela en l’espace de trois mois, ce qui a été étonnamment rapide. “Je pense qu’à partir du moment où il n’y a pas eu d’opposition de la part du service d’orthopédie du CHU de Brest, tout a été très vite. Le Professeur Le Nen a appuyé notre demande auprès du doyen”, commente le Dr Riot.

 

Moins de moyens

Le 1er novembre dernier, Nicolas, interne de 31 ans, a donc fait ses premiers pas au sein de l’équipe de chirurgiens orthopédiques de la clinique Pasteur. “Cela nous a reboosté. Nous nous sommes tous un peu remis en question pour sortir de la routine quotidienne”, confie le Dr Riot. De son côté, Nicolas a été séduit par le fait d’être “le seul interne pour sept chirurgiens, alors qu’en CHU on est plutôt sept internes pour un chirurgien !”

Et les différences avec le CHU ne s’arrêtent pas là. “C’est moi qui fait les visites ou le courrier. Nicolas n’a aucune garde, en revanche il fait les aides opératoires et assiste à nos consultations. Il voit une approche différente de l’hôpital. Il n’y a pas de notion de hiérarchie à la clinique, il est considéré comme un futur collègue”, explique le Dr Riot avant d’ajouter qu’“on fait les même choses qu’à l’hôpital, mais avec moins de moyens. Pour une prothèse de hanche, nous ne sommes que deux à opérer alors qu’à l’hôpital, ils sont pléthores au bloc.”

 

Partenariat public/privé

Un mode d’exercice qui ravit Nicolas. “C’est une expérience très intéressante, où j’apprends énormément. Le fait d’arriver en fin d’internat est d’autant plus intéressant. A la clinique, je passe quatre jours au bloc et une journée en consultation alors qu’à l’hôpital, je ne passe que deux jours et demi au bloc. Le reste du temps se partage en garde, consultation, visites, avis dans les services…”

Quatre mois après ses premiers pas à la Clinique, l’expérience semble concluante, tant pour Nicolas que pour ses maîtres de stage. Au CHU, le Pr Le Nen s’occupe déjà du renouvellement de l’accréditation de la clinique à l’accueil de nouveaux internes. Si cette autorisation est valable cinq ans pour un hôpital, elle est à renouveler chaque année pour les cliniques privées.

Selon les Dr Riot et Le Nen, le partenariat public/privé est une voie à suivre. Si les praticiens savent que l’entente n’est pas cordiale dans une grande partie des hôpitaux et des cliniques, ils considèrent que “cette crispation n’a pas lieu d’être”. Le Pr Le Nen projette d’ailleurs d’organiser une soirée scientifique réunissant les acteurs du public et du privé.

 

Source :
www.egora.fr
Auteur : Catherine Le Borgne