Alors que les premiers effets de la réforme de l’ASV se font sentir par une baisse sérieuse des allocations des jeunes retraités, l’assemblée générale de la CARMF informera aujourd’hui de la cessation de paiement, dès l’an prochain, du régime de base ! Une augmentation de 37 % sur 5 ans serait nécessaire pour le renflouer.

 

Désagréable découverte dans leurs boîtes à lettres pour nombre de médecins retraités. Ils viennent de recevoir un courrier de la Caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF) les informant de l’impact de la réforme du régime ASV, officielle depuis le décret du 25 novembre 2011. A savoir,  à compter du 1er juillet 2012, une baisse sérieuse du taux de rendement du régime (jusqu’à 16 %) sauvé in extremis de la faillite par le gouvernement sortant. A partir du 3e trimestre, la valeur du point passe en effet de 15,55  à 13 euros (16 % de baisse) pour les médecins ayant pris leur retraite après le 1er janvier 2011, et de 15,55 à 15,25 euros (2 % de baisse) pour leurs collègues retraités depuis 2006.

 

Furieux

Ce qui, pour le Dr Jean Hvostoff, jeune retraité habitant aux Molières, dans l’Essonne, se traduit par une perte sèche de 609 ,69 euros par trimestre, soit encore 2 438,76 euros par an. C’est-à-dire, écrit-il à Egora.fr,  “pratiquement un mois de retraite”.

Le Dr Hvostoff est furieux contre tout le monde : politiques, assurance maladie et syndicats signataires, car l’ASV est un gain conventionnel, issu du contrat originel, plaide-t-il. On peut comprendre sa rage. Car le médecin “moyen” n’est pas un nanti : en 2012, selon les derniers chiffres de la caisse nationale, la retraite moyenne du médecin libéral (régime de base, régime complémentaire et ASV) s’établissait à 2 639 euros par mois. Tout comme un cadre du privé.

Les médecins n’ont pas suivi l’actualité, ils n’ont pas connaissance du niveau important de dégradation des allocations retraites liées à la réforme de l’ASV”, reconnaît le Dr Claude Poulain, président de la FARA (Fédération des associations régionales des allocataires), la principale association de retraités de la CARMF. L’ASV représente 40 % du montant total de la retraite du médecin libéral. Une perte de 16 %, cela devient très vite énorme. Si un “ancien” retraité perd 500 euros, un “jeune” peut y laisser jusqu’à 2 000 euros annuels… “Nous sommes assaillis de courriers et de coups de fils, les réactions sont assez violentes”, reconnaît le Dr Poulain.

 

Inéquitable

Installé dans son bureau acajou, à la CARMF, le Dr Gérard Maudrux fait un geste d’impuissance en haussant les épaules. Tout le monde connaît le point de vue du président de la CARMF, créateur d’SOS retraite santé dans les années 90, pour, déjà, alerter sur la faillite programmée du régime. Et demander sa fermeture avec service des droits acquis.

La catastrophe a été évitée de justesse, il y a près d’un an, car Xavier Bertrand, le ministre de la Santé, ne voulait pas que son camp se présente avec un scalp à l’élection présidentielle du mois de mai. Mais à quel prix ! “Cette réforme a été voulue par le gouvernement et les syndicats. Je n’en voulais pas, car elle était inéquitable”, souligne le Dr Maudrux. Inéquitable et même pire : faussée…

Les projections ministérielles ont été élaborées sur des chiffres trafiqués” accuse le président de la CARMF, qui donne rendez-vous aux médecins en 2015. “Nous serons obligés de repousser la date de départ en retraite de 65 à 67 ans. Et de geler le montant des allocations de retraités” prophétise-t-il.

 

Nuages noirs

En sera-t-il fini des mauvaises nouvelles ? Pas du tout ! Voilà qu’arrivent de lourds nuages noirs au dessus du régime de base, en cessation de paiement en 2013 selon le Dr Maudrux !

C’est urgent ! Selon les projections de la CNAVPL (Caisse nationale vieillesse des professions libérales), il va falloir augmenter les cotisations de 37 % d’ici 2016, pour atteindre l’équilibre en cinq ans”. Ces projections laissent entrevoir la situation suivante : 1 milliards 716 millions d’euros de cotisations en 2012, contre 2 milliards 344 milliards d’euros de charges en 2016, comprenant le versement des retraites et les charges de la compensation nationale. “Il manque 630 millions d’euros, ce qui équivaut à une augmentation de 37 % du montant des cotisations, puisque les points sont indexés sur le coût de la vie” explique le Dr Maudrux. La CNAVPL devrait donc proposer, une augmentation de 15 % des cotisations dès l’an prochain, mais le gouvernement ne veut pas aller au-delà de 8 %, pour un an seulement. Problème, cette information sera donnée aux délégués de la Carmf, cotisants, retraités et conjoints survivants, qui se retrouveront aujourd’hui à Paris, en assemblée générale.

 

Panachage

Et le régime complémentaire ? Des inquiétudes pèsent également sur ce régime qui représente 42 % de la retraite moyenne du médecin. Certes, le régime est équilibré et possède près de six années de réserves statutaires, mais au-delà ? “Il faut envisager de repousser l’âge de départ à la retraite de 65 à 67 ans. Et pour les allocataires, la situation sera quasi inchangée” explique le Dr Poulain. Le Dr Maudrux confirme.

Lors de l’assemblée générale de demain, les délégués seront donc interrogés sur les orientations qu’ils veulent voir prendre à la réforme du régime, co-géré par la CARMF (contrairement au régime de base) : Sont-ils d’accord pour un départ à la retraite repoussé à 67 ans, préfèrent-ils sinon, une augmentation des cotisations, une baisse des allocations ou un panachage des deux ? Le questionnaire leur demandera également leur sentiment vis-à-vis de la réforme de l’ASV (!) et une question subsidiaire sur le régime invalidité décès qui, aujourd’hui, n’intervient qu’au bout de 90 jours d’interruption de travail. Alors que de nombreuses voix s’élèvent pour qu’il le fasse dès le 15e jour.

 

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Catherine Le Borgne