En avril dernier, une réunion a rassemblé le conseil de l’Ordre, le ministère de la santé et les syndicats d’internes et de jeunes professionnels. L’objectif ? Allonger la durée de formation nécessaire à l’obtention d’une licence de remplacement.

 

Quel est le temps de formation nécessaire avant de pouvoir remplacer ? La question est restée en suspens. Pourtant, il y  a quelques semaines, l’Ordre avait décidé de plancher sur le sujet. Une réunion au ministère a même réuni le Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM), les syndicats d’internes et de jeunes professionnels. Résultat des courses, le principe d’une autre réunion est arrêté… mais aucune date n’a été fixée.

 

"En réflexion depuis quatre ans"

C’est le CNOM qui est à l’origine de ce débat sur l’allongement, ou non, du temps de formation pour obtenir une licence de remplacement. Selon le Dr André Deseur, président de la section exercice professionnel au sein du conseil de l’Ordre, il est temps de changer la loi. “Les critères d’obtention de la licence de remplacement sont fixés en fonction de la durée des études et ils n’ont pas changé depuis 1994” constate-t-il. En revanche, le temps d’études a lui augmenté depuis cette date. Or d’après le Dr Deseur, “la réglementation stipule que l’étudiant doit avoir effectué les deux tiers de sa formation pour être en mesure de remplacer”. Cela signifierait donc que le nombre de semestres à valider passerait de trois à quatre pour la médecine générale, de cinq à six pour la dermatologie ou la gastroentérologie et de  cinq à sept pour l’ophtalmologie ou l’anesthésie-réanimation.

Charline Boissy, présidente de l’ISNAR-IMG (InterSyndicale Nationale Autonome Représentative des Internes de Médecine Générale) s’étonne “de ne pas avoir été interrogée plus tôt sachant que le projet est visiblement en réflexion depuis quatre ans”. A la suite de la réunion au ministère, un conseil d’administration de l’ISNAR-IMG s’est réuni. Bilan : “Le C.A. ne souhaite pas qu’il y ait un allongement des conditions de remplacement” rapporte l’interne en médecine générale. Selon le syndicat, il faut laisser les internes remplacer à partir du moment où ils se sentent près à le faire, sans rien imposer. “Il y a certains internes qui vont se sentir suffisamment formés et capables de remplacer à partir du troisième semestre, d’autres vont préférer attendre le quatrième voire même le cinquième” constate Charline Boissy.

 

"Cheveux sur la soupe"

Si la jeune femme ne nie pas qu’il faille “sans doute rajeunir le texte de loi”, elle diverge cependant sur les points à revoir. “S’il y a  bien une incohérence dans le texte, c’est que la durée durant laquelle on est autorisé à être remplaçant sans avoir passé sa thèse est inférieure au temps restant pour la passer. Résultat, certains internes se trouvent bloqués et ne peuvent plus remplacer alors qu’ils n’ont pas encore soutenu. Il y a une réelle nécessité d’harmoniser les choses” juge Charline Boissy.

Du côté de l’intersyndicale REAGJIR (Regroupement Autonome des Généralistes Jeunes Installés et Remplaçants) on s’étonne aussi de cette réforme des conditions d’attribution de la licence de remplacement, notamment pour la médecine générale. “Ce projet est surprenant et il tombe comme un cheveux sur la soupe. A la base, cette réforme a été pensée pour les internes des autres spécialités. Du coup, ils ont aussi décidé de la proposer à la médecine générale” réagit Bérengère Crochemore, porte-parole de REAGJIR.

 

"Petits bouts par petits bouts"

Les jeunes médecins généralistes ne sont pas contre une augmentation de la durée de formation, mais sous certaines conditions. “Si on remet la formation en question, il faut le faire de manière globale et pas petits bouts par petits bouts” juge la porte-parole. D’autant qu’augmenter la durée d’étude d’un semestre n’est pas forcement pertinent dans le cas de la médecine générale. “Dans la plupart des cas, le semestre supplémentaire libre est effectué à l’hôpital et non en cabinet de médecine générale” constate Bérengère Crochemore, “il y a quelque chose d’illogique dans la façon de mener cette réforme” ajoute-t-elle. Autre question posée par REAGJIR, “est-il pertinent de concevoir cette réforme en pleine crise démographique, ce qui entraînerait pendant un an un déficit dans l’afflux des remplaçants, alors que tout le monde déplore le manque de main d’œuvre ? ”

Au 1er janvier 2011, 9 903 remplaçants étaient recensés en France, dont 6 700 en médecine générale. Le Dr Deseur tient à rappeler que “la France est le seul pays dans lequel un étudiant qui n’a pas terminé son cursus est en mesure de remplacer aussi bien un médecin libéral que salarié”. Le porte-parole du CNOM ne remet pas en cause le statut des remplaçants. Au contraire, selon lui, “les remplaçants ont une vraie utilité en terme d’accès aux soins. Il s’agit en plus d’une activité très formatrice” note-t-il. Avec cette réforme, le Conseil de l’Ordre montre qu’il assume son rôle. “L’Ordre est l’instance qui délivre les licences de remplacement, il engage donc sa responsabilité ” rappelle le Dr Deseur.

A quand la reprise des négociations ?  “Avec le changement gouvernemental cela risque de prendre un peu de temps, ce qui est certain c’est qu’il n’y aura rien avant l’été” conclut Charline Boissy.

 

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Sandy Berrebi