Nous sommes fin avril et les 14 maisons médicales de garde du Languedoc-Roussillon n’ont toujours pas reçu leur budget pour l’année 2012. Si rien ne bouge d’ici la fin du mois, elles seront très sérieusement menacées de fermeture et 60 personnes pourraient être licenciées.

 

Il y a tout juste un mois, Nicolas Sarkozy déclarait que "dans toutes les urgences de l’hôpital, il faut créer à côté une maison avec des médecins libéraux de ville qui feront les urgences du quotidien". Une belle idée pour désengorger les urgences qui consiste, en somme, à généraliser les maisons médicales de garde (MMG) qui ont commencé à pousser il y a une dizaine d’années. Or aujourd’hui, en Languedoc Roussillon, ces fameux lieux de soins sont menacés de fermeture. La cause ? Nous sommes fin avril 2012 et les 14 maisons de garde n’ont toujours pas reçu leur budget de la part de l’agence régionale de santé (ARS).

 

Sur le fil du rasoir

Une MMG coûte en moyenne 120 000 euros par an. 80 % de ce budget est destiné au salaire des agents. "Si nous n’avons pas de réponse d’ici la fin du mois d’avril, la moitié des maisons médicales de garde va être obligée de licencier", soupire le Dr Thierry Stefanaggi, médecin coordinateur de la MMG de Bézier et porte-parole de la Fédération régionale des maisons de garde et maisons de santé du Languedoc-Roussillon. Car aujourd’hui, si les maisons médicales parviennent à tenir et à payer leurs salariés, c’est grâce au soutien des banques et des hôpitaux qui hébergent les MMG. "On demande des autorisations de découverts aux banques. Quand aux hôpitaux, ce sont eux qui paient les agents, puis nous les remboursons. A Béziers par exemple, ils ont accepté de repousser la facture jusqu’en juin", se félicite le Dr Stefanaggi.

Malheureusement, ce n’est pas la première fois que les MMG du Languedoc sont ainsi sur le fil du rasoir. L’an dernier, la situation était déjà très compliquée. "Nous avons eu le budget de 2011 en septembre 2011 ! C’est à ce moment là que nous avons appris que la somme était réduite de 10 % par rapport à l’année précédente" se désole le généraliste avant d’ajouter : "finalement, alors que nous avions menacé de faire grève le 1erjanvier, nous avons obtenu la rallonge budgétaire qui nous manquait deux jours avant la fin de l’année".

 

20 minutes d’attente

C’est aussi grâce à ces 20 000 euros par MMG obtenus au mois de décembre dernier qu’elles parviennent encore à tenir. Mais d’ici quelques jours, au-delà des licenciements de salariés, les MMG devront capituler. "Au mois de mai, si nous n’avons toujours pas de budget, on ne tiendra plus, on va devoir fermer" se lamente le Dr Stefanaggi.

Une situation qui serait très dommageable pour la région. En effet, en 2011, 100 000 personnes ont été prises en charge par les 650 généralistes qui interviennent dans les maisons de garde. Autant de personnes qui n’ont pas eu à se rendre aux coûteuses urgences pour se faire soigner. On estime qu’une consultation aux urgences revient à 250 euros, contre 100 environ en MMG. En outre, les maisons médicales font de l’éducation sanitaire et permettent aux résidants des secteurs ruraux et périurbains d’avoir un accès à la permanence des soins. "La moitié des personnes soignées viennent des zones  rurales. Contrairement aux urgences, dans les MMG, on n’attend que 20 minutes en moyenne avant d’être vu par un médecin" explique le Dr Stefanaggi.

 

Entre le marteaux et l’enclume

Du côté de l’ARS du Languedoc-Roussillon, on assure qu’il y aura un budget pour 2012 mais que ce dernier sera réduit. Comme partout en France. Quant à l’information, sur la date de versement du budget, personne ne sait. "A mon avis, l’ARS est prise entre le marteaux et l’enclume. On nous dit qu’il n’y a plus d’argent, que c’est la crise, mais visiblement, ce n’est pas la crise pour tout le monde" souffle le Dr Stefanaggi qui s’exaspère devant les millions alloués au DMP, dossier jugé prioritaire. "Chaque année, dans les budgets des ARS, 60 millions servent à alimenter le fond qui nourrit le DMP. Ces  60 millions représentent le budget de 500 MMG" calcule le médecin.

On compte environ 300 MMG en France (dont six opérationnelles à Paris), qui, bien souvent, ont connues elles aussi de cruels problèmes de financement non pérenne par le Ficqs (fonds d’intervention pour la coordination et la qualité des soins) avant l’entrée en piste des ARS. Elles ont vu progressivement le jour au décours de la grande grève des urgences en 2002, mais ont surtout connu un large essor à la suite du rapport Graal sur les urgences remis à Xavier Bertrand en 2006. En 2007, une circulaire conjointe du ministère de la Santé et de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (Uncam) leur a imposé de se plier à un cahier des charges national.

 

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Sandy Berrebi