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AUDIO – Marre de la médecine, cap sur les vignes !

La médecine mène à tout… A la politique (Bernard Kouchner, Philippe Douste-Blazy), au rire (Albert Dupontel), à l’écriture (Christian Lehmann, Martin Wincler), voire même à la viticulture. Bernard Léger-Plumet, lui, a quitté son cabinet il y a sept ans pour la vigne. Un choix qu’il ne regrette pas. Bien au contraire.

 

Il habite le petit village bourguignon de Solutré-Pouilly, niché au pied du Rocher de Solutré, lieu de pèlerinage apprécié de François Mitterrand. Pour des raisons personnelles, il s’est installé là avec sa femme il y a une vingtaine d’années et il n’est plus jamais reparti.

 

"Libre"

Son cabinet était installé à son domicile, comme c’est souvent le cas à la campagne. Il pouvait donc être dérangé à tout moment, du matin au soir, le jour, la nuit, le week-end. En 2004, juste après les vendages, il décide de tout arrêter. "Ce n’était plus possible de continuer comme ça, j’en avais plus qu’assez." Il ferme son cabinet brutalement, et dépose une lettre chez ses patients en leur expliquant sa décision.

Difficile pour lui de donner une raison en particulier, c’est plutôt un ensemble de chose qui ont fini par le lasser. Parmi elles, bien sûr cette vie de sacerdoce difficile mais qui serait acceptable s’il n’y avait pas en plus les pressions administratives (Ecoutez le témoignage sonore pour plus de détails).

Pendant quatre ans ensuite, le Dr Bernard Léger-Plumet fait des rapatriements sanitaires dans le monde entier après avoir suivi une formation à Paris. Puis, alors que lui et sa femme étaient propriétaires d’un domaine viticole, il commence à s’y intéresser de plus près. Il passe un brevet de technicien à la fac d’œnologie de Dijon et devient donc viticulteur à presque 60 ans. Le bonheur.

"Quand on est au milieu de la vigne, dans un cadre quand même incroyable, eh bien on a la paix, on est tranquille, on est libre." Quelques-uns de ses confrères ont eux aussi dévissé leur plaque pour rejoindre la plupart du temps l’hôpital et l’enviable statut de salarié. En 2010, le conseil national de l’ordre des médecins avait ainsi comptabilisé plus de 900 médecins qui avaient lâché la partie plus tôt que prévu.

 

Nostalgie

Une thèse soutenue en décembre 2010 à Rennes par Laure Jouatel tente de comprendre les raisons de cette désaffection. Il apparaît que parmi les facteurs déclencheurs, il y a d’abord, le rapport dégradé à l’environnement institutionnel et le manque de reconnaissance de la part des politiques. Viennent ensuite l’épuisement professionnel, la démotivation et l’inadéquation entre la vie professionnelle et la vie personnelle. Mais ce qui est remarquable chez la majorité des médecins reconvertis c’est qu’ils soutiennent haut et fort que "la médecine générale est le plus beau métier du monde". Laure Jouatel note derrière ce propos une “nostalgie de la médecine générale telle qu’ils ont pu la connaître en début de carrière.” 

C’est en effet ce qu’on ressent en écoutant le Dr Léger-Plumet. Un beau métier mais dont les médecins ne sont plus maîtres aujourd’hui. Selon lui, "ils ont d’ores et déjà perdu la partie" (Ecoutez le témoignage sonore pour plus de détails).

 

 Se taire et obéir

Son regard est donc très pessimiste sur l’avenir de la médecine générale. "Aujourd’hui, le généraliste c’est celui qui se tait et qui obéit, c’est un pseudo-salarié du ministère de la santé, sans les avantages. On va arriver à une médecine salariée déresponsabilisante et démotivante pour les jeunes médecins."

Interrogé sur le nouveau mode de rémunération introduit par la convention médicale de juillet 2011, le paiement à la performance, le médecin devenu viticulteur s’emporte une nouvelle fois. “Il ne reste plus qu’à mettre un micro et une caméra dans nos cabinets ! On est en quand même capables de travailler en notre âme et conscience, pourquoi est-ce qu’on est surveillé comme ça ? C’est abominable.”

Une anecdote lui revient alors à l’esprit. A 15 ans, quand il décide de faire médecine et qu’il l’annonce à son médecin de famille, celui-ci lui avait rétorqué : "Mais, il ne reste plus que quelques années à vivre à la médecine…" 

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Concepcion Alvarez