Ce ne sera pas le « grand soir ». Et comme le résume Jean-Pierre Door, rapporteur de la mission d’information de l’Assemblée nationale sur le Mediator, dirigée par le député Gérard Bapt, les députés  n’ont pas jugé de nécessaire « tout casser ». Il est en revanche, question de clafirier, décloisonner, coordonner… Le rapport adopté hier au soir, devrait être  officiellement publié avant la fin du mois. On attend pour la même date, la publication officielle du rapport de synthèse des Assises du médicament, ainsi que les conclusions de la mission menée au Sénat sur la crise du Mediator. Le temps sera alors venu pour Xavier Bertrand, le ministre de la Santé, de dévoiler ses intentions pour réformer par la loi,  la chaîne de pharmacovigilance mise à mal par la crise passée.

« Le système du médicament a souffert, dans le cas du Mediator, d’un cloisonnement exagéré entre autorités de santé », écrit le rapporteur de l’Assemblée nationale,  qui préconise la mise en place d’une cellule de coordination des agences sanitaires pour mettre fin au « cloisonnement excessif », qui a précédemment prévalu. Le rapport souligne la nécessité d’une information en direct des politiques en cas de problème, tant pour le médicament que pour les dispositifs médicaux.

Le texte propose ainsi la création d’une « task force », qui se réunirait régulièrement, où se retrouveraient le directeur général de la santé, l’agence française de sécurité sanitaires des produits de santé (Afssaps), l’Institut national de veille sanitaire (InVS), l’Assurance maladie, un membre du cabinet du ministre de la santé et les représentants des différentes commissions concernées par le médicament afin de garantir l’échange des informations et si besoin est, informer directement le ministre.

Mais avant tout, le rapport préconise de clarifier les responsabilités des agences. L’Affsaps pourrait en conséquence recevoir directement une subvention de l’Etat, lequel deviendrait destinataire des actuelles contributions et taxes acquittées par les laboratoires. Ensuite, les commissions de pharmacovigilance et d’AMM feraient l’objet d’un rapprochement et de travaux communs. La mission Bapt plaide  également pour une augmentation du nombre d’experts internes (dont la compétence avait été largement mise en cause dans le rapport Debré/Even), et une « clarification de leur rôle par rapport aux évaluateurs externes ».

Innovation du rapport : la commission de la transparence, installée à la Haute autorité de santé,  perdrait certaines de ses prérogatives.  Aujourd’hui chargée d’évaluer les médicaments ayant obtenu une AMM  en vue de leur inscription  sur la liste des médicaments remboursables, cette commission ne serait plus que chargée d’émettre des propositions en matière de SMR (service médical rendu) et d’Asmr (amélioration du service médical rendu),  soumises ultérieurement au vote du collège de la HAS. 

Jean Pierre Dor et les députés défendent également le principe d’une inscription en ligne de tous les liens d’intérêt existant entre les médecins et l’industrie pharmaceutique, ainsi que de tous les financements accordés aux diverses structures ou événements.

Par ailleurs, la mission parlementaire préconise une rénovation importante du système d’autorisation de mise sur le marché (AMM) et du suivi post-AMM.
Relevant que le Mediator n’a été correctement évalué ni durant ses 33 années de mise sur le marché, ni lorsqu’il a été prescrit hors AMM, les députés recommandent de ne délivrer l’AMM qu’ »en cas de démonstration d’une supériorité par rapport aux médicaments existants »,  ce qui impose une révision des textes européens.
Ils demandent également, relève l’APM,   que l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) vérifie la qualité des essais cliniques soutenant la demande d’AMM.
Le rapport se prononce également pour un suivi renforcé du médicament après l’AMM et suggère de lancer plus rapidement les processus de réévaluation du rapport bénéfices/risques. La suspension des AMM serait demandée si les laboratoires ne respectent pas les délais prévus pour la réalisation d’études post-AMM est -il encore préconisé.

Les auteurs du rapport souhaitent surveiller la prescription hors AMM, tout en maintenant cette possibilité. Ils rendraient ainsi obligatoire la mention "hors autorisation de mise sur le marché" sur la prescription et non pas seulement la mention "NR" (non remboursable).

Les députés souscrivent par ailleurs, à la demande du ministre de la santé Xavier Bertrand, d’un réexamen progressif de toute la pharmacopée.

En outre, la mission Bapt suggère d’augmenter les moyens alloués à la pharmacovigilance dans les centres régionaux et faciliter le signalement d’effets indésirables. Les députés souhaitent aussi,  en accord avec le ministère de la Santé, obliger un laboratoire commercialisant un produit en France à informer les autorités sanitaires du retrait éventuel de ce produit, dans un autre pays.

Enfin, pour « rétablir la confiance des acteurs du système de santé », Jean-Pierre Door et les députés de la mission Bapt envisagent plusieurs dispositions, comme une meilleure formation des visiteurs médicaux sur le plan scientifique et la prise en compte d’indicateurs de qualité dans le calcul de leur rémunération. Le développement de logiciels d’aide à la prescription intégrant des informations relatives au SMR et à l’évaluation médico-économique est également proposé.

Pour finir, les élus de l’Assemblée demandent qu’une mission de l’Igas soit chargée d’évaluer les conséquences des réformes prochainement envisagées.

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Catherine Le Borgne