En revenant avenue de Ségur, Xavier Bertrand avait promis aux médecins libéraux, de résoudre une fois pour toutes le problème de l’assurance en responsabilité civile professionnelle (RCP), particulièrement aigu pour les praticiens des spécialités à risque, chirurgiens, obstétriciens et anesthésistes, et pour les victimes. Il semblerait que cela soit quasiment chose faite. Plus d’action récursoire, ni de trous de garanties et la connaissance précise des montants de provisions des assureurs. Adopté hier au soir dans le cadre de la reprise de l’examen en deuxième lecture du projet de loi Fourcade à l’Assemblée, l’amendement gouvernemental 277 à l’article 38 se donne cet objectif. Approfondissant l’article 24 adopté en commission des affaires sociales, l’amendement entend régler définitivement le problème de la RCP pour toutes les spécialités, y compris la médecine générale, au-delà des seules spécialités à risque. Le texte s’inspire des deux rapports commandités à Gilles Johanet, l’ancien directeur de la caisse nationale d’assurance maladie (Cnam), en octobre dernier. Et des multiples concertations et études techniques de faisabilité qui ont suivi.

« Le dispositif sera de nature publique et financé de manière entièrement mutualisée entre les professionnels concernés », a expliqué le ministre de la Santé devant l’hémicycle. « Le seuil de déclenchement devrait être fixé à 8 millions d’euros par sinistre, afin de ne pas empiéter sur le marché existant. Je rappelle en effet que la plupart des assureurs proposent aujourd’hui des couvertures excédant le minimum réglementaire de 3 millions d’euros. Enfin, pour éviter l’existence d’un trou de garantie entre les 3 millions évoqués et les 8 millions d’euros, le seuil minimal sera relevé à 8 millions d’euros, c’est-à-dire au point de déclenchement du dispositif de mutualisation »,  a-t-il détaillé.

En outre, corrélativement à l’élargissement de la couverture, l’amendement gouvernemental envisage une actualisation « régulière » du barème de l’aide financière versée par l’assurance maladie aux médecins conventionnés exerçant une spécialité à risque, ceci afin de garantir que la solvabilité des professionnels de santé « ne sera pas affectée par la survenance d’un accident médical, sans empiéter sur le marché existant ». Xavier Bertrand a également annoncé qu’il se fixait comme objectif, une entrée en vigueur du dispositif au début de l’année 2012 et au plus tard, en 2013.

Provisions et primes

Par ailleurs et dans un deuxième temps, la solution présentée par le gouvernement prévoit de développer l’utilisation de référentiels, nomenclatures et barèmes communs pour la définition des sinistres de responsabilité civile médicale. Il est ainsi prévu « d’harmoniser les missions d’expertise médicale transmises aux médecins afin de mettre en place une technique d’évaluation des dommages corporels, d’instaurer un barème unique de conversion des rentes en capital et enfin, d’instaurer une nomenclature unique des postes de préjudices, qui pourra consacrer la nomenclature Dintilhac déjà appliquée par la juridiction », a expliqué Xavier Bertrand. Pour finir le gouvernement a proposé aux députés  d’étudier l’opportunité et les modalités de mise en œuvre d’une ou plusieurs bases de données en matière d’indemnisation du préjudice corporel, accessibles au public, permettant de recenser à la fois les transactions et les décisions judiciaires. Inspirée de la proposition de loi de Guy Lefrand en matière d’indemnisation des préjudices corporels consécutifs à des accidents de la circulation, cette base permettra de disposer d’une meilleure information sur la sinistralité. Elle devrait également, confiait le ministre, permettre d’y voir un peu plus clair dans la façon dont les assureurs provisionnent les risques. « Je connais un peu ce secteur d’activité (Xavier Bertrand était assureur avant de se lancer à plein temps dans la politique. Ndlr) (…) je me souviens de la manière dont procèdent les assureurs : ils provisionnent les risques de façon plus élevée que les sommes qui seront effectivement déboursées. En attendant, les primes sont, elles, calculées en fonction des provisions (…) Il faut davantage de lisibilité ( …) ce dont chacun bénéficiera »

L’Umespe (médecins spécialistes de la Confédération des syndicats médicaux français – Csmf), s’est immédiatement félicitée du vote de cet amendement qui « sécurise définitivement les problèmes de responsabilité civile professionnelle des médecins libéraux ».

Le syndicat espère qu’ « aucune intervention inappropriée ne viendra désormais interrompre le processus législatif mis en place » et  rappelle  qu’il est important que le coût de la RCP soit intégré dans le cadre conventionnel, afin que le reste à charge ne soit  jamais supérieur à 5 000 euros par an et par praticien.

Source :
http://www.egora.fr/
Auteur : Catherine Le Borgne